Avec une moyenne de 250 000 transactions par an réalisées sur les dix dernières années, le Maroc connaît un boom immobilier incontestable. Dans la foulée, différents métiers du bâtiment et de la promotion immobilière en ont profité. Les agents immobiliers ont également surfé sur la vague. Pourtant, ce métier reste aujourd'hui opaque, peu structuré et dispose de peu d'indicateurs chiffrés, voire pas du tout. Aucune indication sur le nombre d'agents immobiliers au Maroc, aucun cadre juridique ni de tutelle ministérielle. Bref, un corps de métier qui échappe à tout contrôle. « Au Maroc, tout le monde peut s'improviser agent immobilier », résume M. Alteresco, DG de Ramses Consulting & Repimmo Investment, qui dispose de pas moins de huit agences immobilières à Fès, Marrakech, Tanger, Meknès, Rabat, Casablanca, Agadir et Marrakech. La seule mention légale réglementant l'intermédiation immobilière figure dans la loi de janvier 1945 sur les agents d'affaires et les conseils juridiques. Néanmoins, le président de l'Association nationale des conseils juridiques et des agents d'affaires, Moulay M'hamed Laraki, précise que, concrètement, il s'agit d'un corps de métier à part qui dispose de sa propre organisation professionnelle. Certes, une association d'agents est née il y a plusieurs années, mais ses actions demeurent très limitées. Autant dire que la porte est ouverte à tous les abus. « Il existe 30 millions d'agents immobiliers au Maroc », ironise Samir Benmakhlouf, responsable au Maroc de la master franchise de Century 21. Dans ce secteur, on trouve de tout : une multitude de petites agences, des samsar traditionnels qui gèrent de petits portefeuilles clients mais aussi, et de plus en plus, de grandes agences modernes et professionnelles qui travaillent la plupart du temps avec de grands groupes immobiliers. Selon les estimations des professionnels, il y aurait près de 700 agences à Casablanca et plus de 400 à Marrakech. Evidemment, l'absence de cadre légal influe directement sur la qualité et la fiabilité des prestations de ces agences immobilières. A commencer par les honoraires, qui ne sont pas uniformisés. Et, en attendant, le secteur fonctionne sur la base des usages. Ainsi, quand il s'agit d'un achat, il faut en général compter une commission de 1 à 2,5 % hors taxes du montant de la transaction. Laquelle commission est payée soit par l'acheteur soit par le promoteur, soit par les deux à la fois. Aussi bien les modalités que le montant sont généralement, et de préférence, fixés dès le départ. Des tarifs... à la tête du client ! Quand il s'agit de location, les honoraires sont arrêtés en fonction du loyer à payer : entre un et deux mois. Détail important : le niveau des honoraires et les modalités peuvent changer d'une ville à l'autre. « A Rabat, par exemple, les honoraires pour une opération de location sont payés par le locataire uniquement alors qu'à Casablanca le propriétaire doit lui aussi passer à la caisse », explique Adil Rahmoune, DG d'Immo Clair Service. En dehors de ces principes généraux, il faut dire que les honoraires n'obéissent à aucune règle fixe. « Ils sont décidés en fonction des prestations fournies », précise pour sa part William Simoncelli, DG de Carré Immobilier Maroc. Ce dernier explique ainsi que la valeur ajoutée que peut apporter un professionnel à la transaction immobilière comprend le service, le filtrage de la clientèle, la communication organisée autour d'un projet donné en plus du conseil apporté avant le début de la commercialisation. Ce pan du métier, à savoir le conseil, n'est quasiment pas développé au Maroc. Il demeure l'apanage de professionnels étrangers ou de représentants de grands groupes internationaux qui ont choisi de s'installer au Maroc. Ces derniers sont en effet de plus en plus nombreux à ouvrir des succursales ou des franchises dans les grandes villes du Royaume. Century 21, premier réseau mondial d'agences immobilières, est ainsi installé au Maroc depuis début 2006. « Nous avons ouvert huit agences dans six villes du Maroc en plus de six autres agences en cours d'ouverture. Nous disposerons à fin 2007 d'un réseau de 18 agences à travers le pays », explique Samir Benmakhlouf. A côté de Century 21, deux autres grands noms de l'intermédiation immobilière ont ouvert des franchises au Maroc. Il s'agit notamment de Guy Hoquet qui a commencé par ouvrir une agence à Casablanca avant de s'installer à Rabat et Marrakech. L'enseigne prévoit l'ouverture de 17 agences. Quant à La Forêt, elle ouvrira bientôt une agence en franchise dans la capitale économique. On notera également l'arrivée d'opérateurs spécialisés dans des niches de plus en plus pointues. C'est le cas de CBRE, par exemple, un agent immobilier porté sur le segment professionnel et les bureaux qui a ouvert une filiale à Casablanca. Mais, malgré l'arrivée de nouvelles enseignes, d'autres, elles aussi nombreuses, ferment boutique à cause de la concurrence déloyale, de l'informel et de l'anarchie qui règne dans le secteur.