L'Espagne vient de demander officiellement à l'Angleterre de renégocier sa souveraineté sur le Détroit de Gibraltar. Au cas où l'Angleterre accepte de rendre ce territoire à l'Espagne, cette dernière n'aura pas d'autre choix que de rendre les présides de Sebta et Melilia au Maroc. Quel est le point commun entre le Maroc, l'Espagne et l'Argentine ? Chacun de ces pays revendiquent leur souveraineté sur des territoires : Sebta et Melilia pour le Maroc, le détroit de Gibraltar pour l'Espagne et l'archipel des Malouines pour l'Argentine. Espagne versus Angleterre Les tensions diplomatiques entre ces pays risquent d'être ravivées depuis que le nouveau gouvernement conservateur espagnol a officiellement demandé hier mercredi 1er février aux autorités britanniques de revenir à la table des négociations pour tenter de récupérer Gibraltar, un rocher de 6 km2 situé au sud espagnol et peuplé de 30 000 habitants, rapporte le Monde. C'est en 1713, que l'Espagne avait cédé ce territoire à l'Angleterre via le traité d'Utrecht. Si un jour, l'Angleterre décide de renoncer à ce territoire, il reviendra alors à l'Espagne. Mais l'Angleterre n'est pas prête à y renoncer, Gibraltar constituant pour l'ancien plus grand empire colonial, un point stratégique donnant sur la Méditerranée et l'Afrique. Le gouvernement de Gibraltar a d'ailleurs rejeté de son côté toute négociation invitant fermement l'Espagne à «oublier ses revendications historiques». Les Anglais, des durs à cuire De l'autre côté de l'Atlantique, en Amérique du Sud, l'Angleterre est au cœur d'un autre conflit territorial avec l'Argentine au sujet des Iles Malouines, situés à 500 kilomètres des côtes d'Argentine, au Nord de l'Antarctique. Plus de 3000 personnes vivent dans ces 800 petites îles éparpillées sur l'océan représentant au total la superficie de l'Irlande, une région réputée pour ses richesses en hydrocarbures. L'Argentine revendique cet archipel depuis la moitié du 19ème siècle. Dans les années 80, une guerre commence entre les deux pays après que l'Argentine décide d'envahir l'une des plus grandes îles. La Grande Bretagne réplique et intervient militairement. L'Argentine est humiliée. De plus, l'arrivée prochaine du Prince William dans les îles pour terminer sa formation militaire de pilote d'hélicoptère n'arrange pas les choses. Cette arrivée est vue comme une néocolonisation et intervient à la veille du 30e anniversaire du conflit anglo-argentin en avril prochain. La pillule a du mal à être avalée par les Argentins. Une nouvelle fois, pour les Anglais, il est hors de question de céder ces îles à l'Argentine. De son côté, le gouvernement argentin a rappelé dans un communiqué que «Les Nations Unies se sont déjà prononcées à de multiples reprises en indiquant que les deux pays devaient résoudre ce conflit territorial dans des négociations bilatérales», souligne le Monde. Sebta et Melilia Ce qui est important de souligner est que ces deux conflits territoriaux sont étroitement liés à la situation actuelle du Maroc qui revendique de son côté sa souveraineté sur les présides de Sebta et Melilia et d'îlots rocheux. Le Maroc est tributaire de la résolution de ces dossiers pour récupérer ces deux enclaves, tel un effet domino. Si la Grande Bretagne renonce aux Iles Malouines, l'Espagne lui mettra la pression pour récupérer Gibraltar, et si Gibraltar est récupéré par les Espagnols, le Maroc se lèvera pour réclamer Sebta et Melilia. L'ironie dans ce dossier est que l'Espagne revendique officiellement sa souveraineté sur Gibraltar mais qu'elle ne cédera jamais sur les demandes actuelles du Maroc concernant sa revendication sur ces deux territoires. «Peut être que l'Espagne changera d'avis sur Sebta et Melilia lorsqu'elle réussira à récupérer Gibraltar des Anglais mais de toute manière il est légitime de faire cette liaison entre les deux situations», souligne le politologue Mohamed Darif. «Mais la question qui se pose actuellement est de savoir comment résoudre ces conflits qui sont des conséquences de la période coloniale. C'est aberrant de voir que les Iles Malouines sont proches du territoire argentin et qu'elles sont actuellement occupées par l'Angleterre, c'est la même chose ici au Maroc avec Sebta et Melilia», poursuit-il. Lignes rouges Selon Mohamed Darif, la résolution du dossier de Sebta et de Melilia ne doit pas se faire par la force mais par le biais de négociations. «Il y a des lignes rouges que le Maroc et l'Espagne ne peuvent pas traverser. On a tendance à mettre ce problème de côté pour ne pas ternir les relations entre les deux pays. Mais on est encore loin d'un affrontement violent militaire entre les deux pays», précise-t-il. Alors que l'Espagne vient officiellement de demander à l'Angleterre de renégocier sa souveraineté sur Gibraltar, est-ce l'opportunité également pour le Maroc de rebondir et de revendiquer une nouvelle fois Sebta et Melilia ? Pour Mohamed Darif, le Maroc n'a jamais cessé de revendiquer sa souveraineté sur ces deux présides rappelant qu'en 2007, Abbas El Fassi avait fait allusion à ce dossier dans sa déclaration gouvernementale et qu'Abdelilah Benkirane a fait la même chose dans sa récente déclaration gouvernementale.