Un figurant à barbe blanche qui a participé à plus de 80 films depuis Lawrence d'Arabie en 1962 mais qui doit gagner sa vie en tant que pompier, des documentaires sur l'Egypte tournés au Maroc, des plateaux de tournages qui ont vu passer des personnages bibliques mais aussi la reine Cléopâtre, Léonardo Di Caprio, Jamel Debbouze ou encore Brad Pitt... Le cinéma à Ouarzazate a mille facettes. Réalité et fiction se côtoient quotidiennement. [Diaporama] Ouarzazate, ville du septième art. Nul autre qu'Alfred Hitchcock y est venu dès 1956 tourner quelques scènes de L'homme qui en savait trop (The man who knows too much, 1956). Le film légendaire Lawrence d'Arabie, de David Lean, suivra en 1962... Une impression étrange se dégage lors du casting de figurants organisé par la Ouarzazate Film Commission en décembre 2011 pour mettre en place une base de données en ligne des figurants de Ouarzazate. Dans la longue file d'attente... ..on croit avoir déjà vu ces visages quelque part, même si la première visite à Ouarzazate. Ici, dans presque toutes les familles, il y a des personnes qui ont figuré dans des films, connus ou moins connus.« Vous voyez tous ces barbus à Ouarzazate ? » , demande Youssef « Ils ne portent pas la barbe pour des raisons religieuses, mais parce que souvent, les réalisateurs veulent des figurants avec barbe », explique ce développeur informatique. Productions sur les temps bibliques ou le terrorisme islamiste obligent. Pourtant, la figuration reste un dépannage, même pour ceux qui, de temps en temps, ont des rôles secondaires à jouer. Les boutiques pour touristes sont un moyen de gagner sa vie en exposant des photos de tournages. « J'ai été figurant dans Lawrence d'Arabie », explique Habib Lahcen qui a participé à plus de 80 films. Quel acteur pourrait en dire autant ? Malgré son palmarès, il gagne simplement sa vie en tant que pompier à Ouarzazate. Depuis toujours, l'atout principal de Ouarzazate pour les cinéastes a été sa lumière, les couleurs fabuleuses et les paysages variés de la région entre le Haut Atlas et le Sahara. Montagnes enneigées, villages pittoresques coincés dans de petites vallées, casbahs, ..dunes et oasis sont devenus des lieux de tournages. Ici, les producteurs de Sex and the City ont fait marcher les protagonistes de la série en talons aiguilles. La Casbah d'Ait Benhaddou, inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO, a accueilli plusieurs productions, dont Gladiator de Ridley Scott (2000), La Momie (1999), Kundun (1997), Kingdom of Heaven (2005)... Venir à Ait Benhaddou c'est se promener dans le décors de scènes mythiques. Cet amphithéâtre naturel n'a pas seulement vu Russel Crowe alias Maximus, .... mais aussi, 40 ans plus tôt, Lawrence d'Arabie, première grande production tournée au Maroc. Ce n'est qu'en 1983 que l'industrie du film se développe plus systématiquement à Ouarzazate. Cette année là sont fondés les Studios de l'Atlas. Vraie ou fausse casbah ? Avec des plateaux artificiels, les possibilités qui s'offrent aux réalisateurs sont presque illimitées. Chaque studio évoque plusieurs films à la fois. Les décors, en métal, bois et aux facades en plâtre, permettent de créer des décors très réalistes. Voici les marches du palais de Cléopâtre dans Astérix et Obélix, mission Cléopâtre, tourné en partie à Ouarzazate. L'envers du décor ne ressemble plus du tout à l'original. Au final, Cléopâtre a récompensé Jamel pour un palais visiblement inachevé. Pas étonnant non plus que le bateau des pirates coule à chaque passage d'Astérix et Obélix. Il a seulement un bout de coque, le reste n'est qu'effets spéciaux. Le catapulte est plus costaud, mais c'est bien le seul utilisé pour tout le film. Dans les studios cinématographiques on peut trouver un bouddha adossé à une mosquée en écoutant sonner la cloche d'une église chrétienne. Ici, d'anciens studios italiens (Aster) devenus le musée du cinéma de Ouarzazate. Photos : Pau Esculies, www.pauesculies.es Ouarzazate Film Commission, Juan Antonio Muñoz Frédéric Schmachtel Mis à jour le 30 janvier 2012 Jusqu'où remonte l'origine du cinéma à Ouarzazate ? Certains journaux, de nombreux sites internet et même des brochures publicitaires de la Ouarzazate Film Commission mentionnent Louis Lumière comme premier cinéaste à avoir planté sa caméra au Maroc – en 1897 ! Cette information est, cependant, erronée. « Ce n'est pas la première fois que nous sommes questionnés au sujet d'un "Chevalier marocain" (et parfois "Chevrier marocain") qui aurait été tourné par un des opérateurs Lumière en 1897 au Maroc », indique Jean-Marc Lamotte de l'Institut Lumière de Lyon. Les « opérateurs Lumière » étaient des voyageurs-cinéastes engagés par les frères Lumière très vite après l'invention du cinématographe en 1895 pour filmer et projeter des courtes séquences dans différents lieux à travers le monde. Ils ne sont cependant pas passés par le Maroc. « En tout cas, ajoute M. Lamotte, ce film - s'il existe - n'est pas du tout un film Lumière : il n'y a en effet aucun film du catalogue Lumière tourné au Maroc, catalogue qui comprend seulement des films tournés en Algérie /Tunisie/Egypte et en "Turquie d'Asie" (Syrie, Israël, Liban, Turquie, Cisjordanie). » Wikipedia attribue un autre film très ancien à Ouarzazate : Ali Baba et les 40 voleurs, un film de Jacques Becker, avec Fernandel dans le rôle d'Ali Baba, sorti en 1954. D'après la Cinémathèque française, Ouarzazate n'a pourtant pas été lieu de tournage du film, qui a été tourné à Taroudant et dans les Studios de Billancourt, dans les Hauts-de-Seine. L'histoire du cinéma à Ouarzazate peine à être écrite.