Ces ventes, effectuées en dehors de tout cadre légal et sanitaire, ne répondent à aucune norme internationale, dénonce l'association. Elle souligne également que les animaux n'étant pas vaccinés, ils peuvent être porteurs de maladies. Des animaux confinés dans de toutes petites cages, sans eau ni nourriture et exposés en plein soleil. L'association Comme chiens et chats Maroc (CCC) a dénoncé, hier sur sa page Facebook, la vente «anarchique et illégale» d'animaux de compagnie, en l'occurrence des chiens et des chats, «dans des conditions affreuses», en témoignent les photos diffusées par l'association qui ont été prises dans un souk à Nador. Le souk n'est pas le seul espace de ces ventes en dehors de tout cadre légal et sanitaire adéquat. A Casablanca, les souks d'El Korea, de Jmiâa à Derb Sultan et de Hay Hassani proposent la vente des animaux de compagnie, mais aussi sauvages, notamment des hérissons, des tortues ou des caméléons, ces derniers étant prisés pour la sorcellerie, témoigne Hind Moustaghfir, présidente de l'association Comme chiens et chats Maroc. «Ces ventes se font tous les jours, particulièrement le dimanche. Les animaux y sont vendus entre 300 et 1 000 dirhams et proviennent d'élevages ou ont été volés. Certains servent à la reproduction, d'autres sont vendus à des agents de sécurité par exemple. Ces ventes ne répondent à aucune norme internationale. Les animaux peuvent être porteurs de maladies car ils ne sont pas vaccinés, ni castrés ou stérilisés», ajoute la responsable associative. Ceci est sans compter que ces pratiques contribuent à augmenter le nombre d'abandons. Certains acheteurs croient en effet acheter des chiens de race et, lorsqu'ils se rendent compte de la supercherie, les relâchent tout bonnement dans la rue. «Certains propriétaires nous contactent pour nous demander de récupérer l'animal, mais ceux-là sont très peu nombreux à le faire. La plupart les abandonnent dans la rue», déplore Hind Moustaghfir. Vacciner pour arrêter l'hémorragie des animaux errants La saisie de ces animaux vendus illégalement est rendue impossible en raison du vide juridique relatif à la protection animale au Maroc. «On a les mains liées : sans l'autorisation du procureur général du roi, on ne peut intervenir et récupérer de force les animaux maltraités, aussi bien dans les souks que chez les particuliers», ajoute la présidente de CCC Maroc, découragée par l'extrême lenteur de ce type de procédure. Celle-ci préconise l'application, sur l'ensemble du Maroc, du programme TNVR, pour «Trap, Neuter, Vaccinate, Return» («Piéger, stériliser, vacciner, retourner»), le seul moyen selon elle de contrôler la surpopulation canine et féline et d'arrêter l'hémorragie d'animaux errants au Maroc, même s'il ne fait pas toujours l'unanimité auprès des militants de la cause animale. «La rage existe toujours au Maroc, en 2019, car l'Etat a opté pour des solutions simples qui n'ont aucune portée à long terme. Quand les chiens sont castrés et les chiennes stérilisées, il n'y a plus de meutes, les chiens sont moins agressifs et les risques de morsures diminuent. Les territoires où s'implantent les meutes sont alors protégés contre l'intrusion d'autres chiens. En revanche, si ces zones se vident car les chiens qui y étaient sont abattus, d'autres meutes viendront à coup sûr les remplacer», explique Hind Moustaghfir. «Solution de bricolage» C'est ce que nous avait déjà expliqué Ahmed Tazi, président de l'Association de défense des animaux et de la nature (ADAN) : «Si on relâche un animal sur son territoire, il n'est pas perdu, perturbé et désorienté. Il défend son territoire en ne laissant pas venir d'autres chiens ou chats éventuellement porteurs de maladies : c'est un agent sanitaire qui agit 24 heures sur 24. De même que lorsqu'ils sont vaccinés, ils ne sont plus susceptibles de contaminer l'homme, y compris en cas de morsure.» Le programme TNVR est déjà appliqué au Maroc à toute petite échelle, notamment dans certains quartiers de Casablanca avec l'aide de vétérinaires, et à Dar Bouazza dans le cadre d'une convention de partenariat avec la commune. «Mais on a besoin de fonds pour le généraliser à tout le Maroc, reconnaît Hind Moustaghfir, or l'Etat n'adhère pas à cette politique ; il préfère l'abattage, solution de bricolage.» Pour rappel, le Maroc est membre de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE), une organisation intergouvernementale chargée de définir des normes de santé animale visant à améliorer la santé et le bien-être des animaux. En août 2018, des chercheurs britanniques avaient pointé du doigt les conditions épouvantables des animaux en captivité mis en vente dans les animaleries traditionnelles et les souks du royaume. «Plus de 88 % des animaux ont été hébergés dans des situations ne respectant pas les libertés vitales (…) L'accès à l'eau, l'exposition au soleil, à la chaleur et la capacité de se cacher des facteurs de stress étaient particulièrement faibles», notaient les auteurs, exhortant le gouvernement marocain «à remplir son engagement à établir des lois protectrices et à consacrer des ressources à leur application».