Le programme [email protected] qui aide les MRE d'Italie à obtenir le regroupement familial ouvre un nouveau bureau à Rabat, après Casablanca. Plusieurs centaines de familles ont déjà bénéficié de son aide. Le programme [email protected] (Formation Orientation Regroupement familial) lancé en novembre 2017 et actif jusqu'en septembre 2019 dispose d'un nouveau centre d'accueil à Rabat. Mis en œuvre par les Patronato ACLI (Association chrétienne des travailleurs italiens) et INCA CGIL, il est destiné à aider les étrangers en situation régulière en Italie à bénéficier du droit au regroupement familial. «Nous offrons à leur famille un accompagnement dans les démarches administratives comme la demande de visa ou la traduction des documents nécessaires en italien, ainsi que des cours d'Italien et une initiation à la culture, aux institutions et lois italiennes», a expliqué, jeudi 7 février à Rabat, Claudio Piccini, coordinateur des activités sur les migrations du Patronato INCA CGIL. «11 pays d'origine des immigrés vivant en Italie sont concernés et le Maroc représente à lui seul 46 % du programme. Au total, 5 000 personnes sont ciblées», a expliqué, hier, Marco Calvetto, responsable des Services de protection du Patronato ACLI. «Au Maroc nous avions pour objectif d'aider 4 000 personnes à rejoindre un membre de leur famille en Italie. Pour l'instant 1 066 personnes ont été contactées et 723 ont achevé leur formation.» Marco Calvetto Un programme qui couvre tout le Maroc Un MRE qui peut attester qu'il perçoit un revenu et d'un logement suffisants pour faire vivre sa famille en Italie a, en effet, le droit de faire venir à ses côtés son conjoint et ses enfants, ainsi que ses parents si ces derniers n'ont aucun autre enfant susceptible de les prendre en charge au Maroc. Jusqu'ici, le programme s'opérait à Casablanca dans les locaux de l'association Maan, rattachée à l'ONG ACLI, situés tout près du consulat d'Italie qui accompagne d'ordinaire les MRE d'Italie et leur famille dans leurs démarches administratives et dans les locaux de l'association marocaine ANOLF et du Patronato INCA. Désormais, [email protected] aura également accès au bureau de la Fondation Soleterre à Rabat, sis 12 rue Pékin, Résidence les Fleurs, au quartier Océan. Une localisation qui reste très éloignée de Beni Mellal-Khénifra, la région d'origine de la majorité des Marocains résidant en Italie. «Nous couvrons tout le Maroc, car le point de départ de chaque démarche se situe en Italie. Ce sont les Marocains résidant en Italie qui prennent d'abord contact avec le Patronato ACLI pour obtenir la "nulla osta", un document qui atteste que rien n'empêche qu'ils aient droit au regroupement familial et nous contactons ensuite leur famille, ici au Maroc où qu'elle vive», explique Latefa, coordonnatrice du projet au Maroc. Nous nous sommes d'abord installés à Casablanca, parce que c'est là que se situent le consulat, où les familles doivent demander leur visa, et les traducteurs assermentés arabe-italien.» Faciliter l'intégration de personnes en situation régulière «Aujourd'hui, le regroupement familial est le seul moyen d'immigrer légalement en Italie depuis que le gouvernement a mis un terme aux permis de travail temporaires en 2011», rappelle Claudio Piccini. Le droit au regroupement familial est le dernier moyen d'entrer légalement en Italie pour les citoyens non-européens parce qu'il est inaliénable, consacré par la Convention européenne des droits de l'Homme. Si aucun pays européen n'a le droit de supprimer le regroupement familial, rares sont cependant les actions comme celle des deux Patronato à promouvoir ce droit, faute de volonté politique et, par-là, de financement. En fait, [email protected] est financé grâce au Fonds Asile Migration et Intégration 2014-2020 du ministère de l'Intérieur italien, lui-même abondé par l'Union européenne pour plus de 381 millions d'euros. Il relève d'un vaste financement européen accordé en 2015 pour aider les pays européens à faire face à l'arrivée massive de migrants et de réfugiés suite à la guerre en Libye et en Syrie. En août 2015, la Commission européenne a ainsi accordé un financement exceptionnel de 2,4 milliards d'euros pour la période 2014-2020 dont 560 millions ont été accordés à l'Italie et 473 millions à la Grèce. Au final, plus de 381 millions d'euros ont été accordés par l'UE pour le Fonds Asile Migration et Intégration 2014-2020 depuis 2015 et le reste va à la surveillance des frontières. Le programme [email protected] ne pèse donc pas très lourd sur le budget propre du ministère italien de l'Intérieur. Le seul fait que ce dernier, dans le contexte de fermeture des frontières voulu par le ministre de l'Intérieur Italien Matéo Salvini, accepte d'accorder une partie de ce Fonds – 3 millions d'euros – est tout de même remarquable et exceptionnel. «Dans ce programme nous ne traitons que d'immigration légale, justifie l'ambassadrice de l'Italie au Maroc, Barbara Bergato. Surtout, il s'agit de faciliter l'intégration de personnes en situation régulière qui ont le droit de se déplacer et de venir au Maroc.» Les Patronato, c'est quoi ? La position très spécifique des «Patronato» en Italie peut également expliquer cette décision remarquable du ministère italien de l'Intérieur d'allouer une partie non négligeable de ses fonds au regroupement familial. Plus que des associations, mais pas tout à fait des organismes publics, les Patronato sont des institutions très spécifiques qui n'existent que dans le droit italien. Ils sont nés dans l'Italie d'après-guerre pour défendre les droits sociaux des travailleurs italiens émigrés en Europe. Depuis, les Patronato ont élargi leur activité à tous les travailleurs en Italie. Cette position influente a pu leur permettre de défendre, avec plus de succès que d'autres, leur volonté d'améliorer l'accès au regroupement familial aux travailleurs étrangers en Italie auprès des services du ministère de l'Intérieur pour en obtenir une aide financière.