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Printemps arabe : Et maintenant où on va ?
Publié dans Yabiladi le 18 - 10 - 2011

L'autre soir je suis allé voir le dernier film de Nadine Labaki, cinéaste libanaise, metteuse en scène notamment de «Chocolat», que je n'ai pas vu en dépit des nombreux prix remportés à l'étranger. Ce film, «Wa halla' la wayn ?» («Et maintenant où on va ?»), raconte l'histoire d'un village libanais à la Clochemerle ou à la Brescello (village où se confrontaient le curé Don Camillo – joué à l'écran par Fernandel - et le maire communiste Peppone).
Les femmes du village, maronites et sunnites, se liguent pour empêcher que les troubles sectaires agitant le reste du Liban n'atteignent leur village et donc leurs maris et fils. Le film se déroule – très habilement – selon le schéma classique des comédies moyen-orientales, jusqu'à la dernière phase, où les femmes se convertissent d'un commun accord à la religion de l'autre communauté, les chrétiennes devenant musulmanes et vice-versa. Elles, apostrophant alors maris et fils «vous voulez tuer les chrétiens/musulmans ? Eh bien commencez par moi». Survient l'incident tragique : un adolescent chrétien est tué lors d'un déplacement loin du village, pris au milieu de violences confessionnelles. Les femmes réussissent tant bien que mal à éviter l'escalade lors des funérailles, lors duquel le cercueil est porté par chrétiens et musulmans, suivis plus loin derrière par les femmes du village. Le cimetière étant divisé en deux moitiés, une musulmane et une chrétienne, les porteurs, ne sachant plus où enterrer le défunt, restent plantés au milieu du cimetière entre le carré musulman et la partie chrétienne et se retournent vers les femmes, en leur posant la question qui a donné son titre au film – «Et maintenant où on va ?». Le film termine sur cette question.
Il n'y a pas qu'au Liban que cette question est d'actualité. Le printemps arabe se mue en automne et bientôt en hiver, avec ses feuilles mortes, ses intempéries et les rigueurs du froid. Bien malin qui peut déterminer précisément la situation du Yémen, entre assassinats ciblés étatsuniens, prix Nobel de la paix et vrai-faux retour d'un président honni et convalescent. La boucherie syrienne se poursuit, mais sans qu'une réelle perspective de chute de la sanglante dictature baathiste semble probable. Si l'ordre dynastique sunnite semble avoir été imposé à la majorité chiite au Bahreïn, c'est sans aucune perspective de changement d'un régime qui pratique l'épuration et la discrimination ethniques comme l'Afrique du Sud de l'apartheid ou Israël. L'Egypte, si prometteuse au printemps, se livre à son tour à ses démons confessionnels, et le peu d'empressement de l'armée à lâcher les rênes d'un pouvoir détenu indirectement depuis 1952 (tous les présidents égyptiens ont été des militaires de carrière) n'incite à aucun optimisme. La Libye, seul pays arabe jusqu'ici à pouvoir se targuer d'avoir vraiment mis fin à la dictature, ne sait encore par quoi remplacer le pouvoir personnel et tribal de Kadhafi, et se trouve confrontée, en plus, aux ingérences étrangères (c'est le seul pays arabe dans ce cas, avec bien évidemment Bahreïn et dans une bien moindre mesure le Yémen). Quant à la Tunisie, qui ouvrit le bal en décembre dernier, elle semble se conformer le mieux à ce que l'on pourrait espérer d'un processus de transition démocratique, avec les premières vraies élections législatives libres du monde arabe après celles de 2006 en Palestine (mauvais augure…) , bien qu'elle semble aussi demeurer la proie d'une psychose collective autour du poids et des ambitions allégués des islamistes, camp qui dans l'esprit de certains esprits laïcs va des égorgeurs takfiris aux opposants à l'accès à la pornographie sur Internet – de fait, ce serait surtout le poids des soutiens de l'ancien régime de Benali qui devrait inquiéter les personnes soucieuses d'une transition démocratique effective...
Reste les retardataires : sans considérer le cas de l'Irak, envahi et occupé mais qui a connu une mue vers le parlementarisme à défaut de la démocratie, les autres pays arabes ne voient pas leurs régimes respectifs menacés de perspectives de démocratisation brusques et spectaculaires : une Algérie où la contestation, pacifique ou non, a pignon sur rue depuis 1988 mais où le vrai pouvoir, aux mains d'une clique de hauts gradés, n'est guère menacé ; une Arabie Saoudite – et des pays du Golfe – où les termes de la contestation politique sont totalement différents de tous les autres pays arabes ; et un Liban tétanisé par les dissensions confessionnelles, et où le confessionnalisme du système le protège en quelque sorte contre la contestation populaire.
Restent la Jordanie et le Maroc, les deux monarchies non-pétrolières du monde arabe, conviées par ailleurs à fournir au Conseil de coopération du Golfe (CCG) la main d'œuvre dont manquent les appareils répressifs des monarchies pétrolières. Je ne prétendrai pas donner une description exhaustive de la situation en Jordanie, où les espoirs soulevés lors d'une succession dynastique il y a une dizaine d'années a laissé place au désenchantement et à une difficile situation socio-économique (tiens, ça me rappelle un autre pays…), et où les manifestations populaires ont semblé s'essouffler en début d'année.
Pour ce qui est du Maroc, la mort ce 13 octobre à Safi de Mohamed Boudouroua vaut plus que tous les discours et toutes les analyses enjoliveurs, courtisans et intéressés : qu'est ce qui a véritablement changé au Maroc ? Alors que les révélations se sont succédées – sans conséquence pour l'intéressé - sur les marchés publics irréguliers passés par le ministère de la Jeunesse et des sports dirigé par Moncef Belkhayat, alors que des révélations renforcent les doutes sur le choix unilatéral sans discussion préalable du TGV, alors que le Maroc est confronté à ce qu'il faut bien appeler des violences ethniques à Dakhla, qui peut décemment prétendre que la réforme constitutionnelle du 1er juillet a changé la pratique du pouvoir au Maroc ?
Une nouvelle constitution, rédigée par un aréopage désigné par le chef de l'Etat, a été adoptée avec un score se situant dans la fourchette des référendums de feu Driss Basri après une campagne référendaire faisant plus penser au général Tapioca et à «Tintin et les Picaros» qu'aux votations populaires suisses, est entrée en vigueur le 30 juillet. Il est probable que l'entrée en vigueur du nouveau Code de la route aura eu plus d'impact dans la vie quotidienne des Marocains que celle de cette constitution. Verse-t-on moins de bakchich dans les muqata'a du Royaume depuis ? La police assure-t-elle désormais de manière impartiale la sécurité et la tranquillité du citoyen lambda ? Les auteurs de violences policières sont-ils désormais poursuivis par une justice indépendante ? La justice est-elle désormais intègre ? La compétence est-elle désormais déterminante dans le choix des dignitaires du régime, plus que le fait d'avoir fait sa scolarité au Collège royal ?
Un des dossiers les plus lourds auxquels le Maroc est confronté, en termes politiques, diplomatiques et même économiques, est celui du Sahara. En quoi la réforme constitutionnelle aidera-t-elle à résoudre ce dossier ? En quoi des incidents – pour utiliser un terme pudique – comme ceux de Dakhla pourront-ils être évités ? En quoi une opinion sahraouie volatile pourra-t-elle faire confiance dans l'engagement du Maroc de leur laisser une autonomie irrévocable? Quel changement positif y a-t-il eu sur ce dossier ces derniers mois ?
Et ne parlons même pas de la situation économique : la balance des paiements est déficitaire depuis 2008, et au vu de la crise touchant l'Union européenne, de très loin principal partenaire économique et financier du Royaume, l'évolution des exportations, des revenus touristiques, des transferts de devise des MRE, des investissements directs et de l'aide publique au développement ne saurait inciter à de l'optimisme à court terme. Les réserves de devises équivalent à 5 mois d'importation. Les dépenses publiques sont handicapées par le poids de la caisse de compensation dont tout le monde s'accorde à dire depuis des années qu'elle fonctionne de manière inefficace et inéquitable, et par la faiblesse d'une fiscalité qui exempte les exploitants agricoles et peine à contrer l'évasion fiscale des sociétés et des professions libérales. Quels motifs de satisfaction nous auront procuré 2011 sur ce plan ?
Quant aux élections législatives, les débats portent sur la cuisine électorale habituelle du mode de scrutin, de désignation des candidats et de spéculations sur lequel des partis administratifs ou officieux aura l'insigne honneur de mettre en œuvre le programme de Sa Majesté – qui, parmi les Marocains, croit véritablement que le changement viendra du RNI, du PAM, de l'Istiqlal ou de l'USFP ?
Voilà donc une année paradoxale : le pouvoir marocain a habilement manœuvré en faisant adopter une révision constitutionnelle que lui-même estimait inutile avant le 20 février, et que le Mouvement du 20 février estime insuffisante. Les partis, hormis le PSU, le PADS et le CNI (fort honorables mais ne faisant pas le poids numériquement), ont unanimement entonné le refrain de la propagande d'Etat. Les bailleurs de fonds étrangers du Maroc ont roté d'aise à l'annonce des résultats du référendum. Bref, en apparence, la situation politique est sous contrôle, et ce en dépit des manifestations populaires persistantes du Mouvement du 20 février. Mais quel Marocain, pour peu qu'il maîtrise sa peur de l'inconnu, croit réellement que les choses ont véritablement changé sur le plan institutionnel ? Quel Marocain croit réellement que les graves problèmes économiques et politiques du Maroc sont plus près d'être résolus aujourd'hui qu'hier ?
Bref : et maintenant, où on va ?
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