Si Stephen Smith avait prédit, en février dernier, une «invasion subsaharienne» du Vieux Continent en 2050, une étude de l'INDE vient démonter cette thèse pour affirmer que les Subsahariens représenteront tout au plus 3% ou 4% de la population européenne en 2050. La thèse, signée du journaliste Stephen Smith et affirmant que l'Europe sera d'ici 2050 peuplée à 25% d'Africains subsahariens, n'est qu'un pétard mouillé. Ce mercredi, une nouvelle étude publiée par l'Institut national d'études démographiques (INDE) vient invalider la supposée «invasion prévisible de l'Europe par la population d'Afrique subsaharienne en 2050». Auteur d'un article intitulé «L'Europe et le spectre des migrations subsahariennes», qui sort aujourd'hui dans la revue Population et sociétés de l'institut français, François Héran, sociologue, anthropologue et démographe, répond à cette «prophétie» avec des statistiques et des chiffres à l'appui. «L'ordre de grandeur le plus réaliste est cinq fois moindre», a-t-il même mesuré, réfutant le spectre d'une Europe à 25% afro-européenne, comme le rapporte Le Monde. Pour lui, «les Subsahariens, qui représentent 1% de la population européenne, représenteront tout au plus 3% ou 4% de la population des pays du nord en 2050». Le chercheur à l'INDE et statisticien à l'Insee précise aussi que «70% des migrants subsahariens s'installent dans un autre pays africain, 25% se répartissent entre le Golfe et l'Amérique du Nord, et 15% viennent en Europe». «Si l'on intègre la croissance démographique projetée par l'ONU, c'est-à-dire le passage de 970 millions d'Africains en zone subsaharienne à 2,2 milliards en 2050 (…), les immigrés subsahariens installés dans les pays de l'OCDE pourraient représenter en 2050 non plus 0,4% de la population, mais 2,4%.» François Héran «L'Afrique émigre moins que l'Asie centrale» Une hausse «importante mais qui ne permet en aucun cas de parler d'invasion, même en ajoutant la seconde génération», ajoute le chercheur. A l'heure actuelle, «sur les 420 millions d'habitants d'Europe de l'Ouest, 5,3 millions sont nés en Afrique du Nord, et 4,4 millions dans le reste du continent africain», insiste-t-il pour établir un état des lieux. «Autrement, l'Europe compte 1,5% de populations d'origine maghrébine et 1% de Subsahariens, quand, en France, ces taux sont de 4,3% pour les natifs d'Afrique du Nord et de 1,5% pour les Subsahariens», détaille le média français. Les analyses de François Héran, qui s'appuient «sur des statistiques de plus en plus fiables qui autorisent à se passer des états civils parfois lacunaires», permettent de démontrer «que l'Afrique émigre moins que l'Amérique centrale, l'Asie centrale ou les Balkans». Pour arriver à cette conclusion, à ce chiffrage précis, le chercheur a travaillé sur un outil construit par la Banque mondiale, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et le Fonds monétaire international, qui recense depuis quinze ans le nombre de natifs d'un pays résidant dans un autre. Les mouvements des populations aujourd'hui «confirment un résultat connu, de longue date, des économistes : plus un pays est pauvre, moins ses habitants ont de chance de migrer au loin. S'ils émigrent, c'est d'abord dans les pays limitrophes». Une thèse citée par… Emmanuel Macron Professeur d'études africaines à l'Université Duke aux Etats-Unis, ancien journaliste collaborant avec plusieurs rédactions de quotidiens français dont Le Monde et Libération, Stephen Smith avait publié, en début d'année, «La ruée vers l'Europe. La jeune Afrique en route pour le Vieux Continent» (Editions Grasset, 2018). Il y prédit que l'Europe va «s'africaniser», affirmant que les transferts migratoires massifs constatés de nos jours «n'en sont qu'à leurs débuts». Selon une critique publiée sur la plateforme française Non fiction, Stephen Smith élabore cinq «scénarios d'avenir» pour l'Europe, en guise de conclusion : «l'Eurafrique», «l'Europe forteresse», «La dérive mafieuse», un «retour au protectorat» ou encore une «politique de bric et de broc». Une prophétie tellement prise au sérieux qu'Emmanuel Macron l'avait citée en avril dernier. «Nous sommes face à un phénomène migratoire inédit. Nous avons un phénomène migratoire qui est là et qui va durer», a poursuivi le président de la République, affirmant que Stephen Smith a «formidablement bien décrit» le phénomène de la migration.