En Tunisie, une commission présidentielle recommande la dépénalisation de l'homosexualité et l'égalité hommes-femmes dans l'héritage. Le Maroc est à des années-lumières des développements que connaît notre voisin maghrébin. Sur le dossier des libertés individuelles, la Tunisie est en passe de consacrer son exception dans l'espace maghrébin. Mardi 12 juin, une commission présidentielle a remis un rapport de 200 pages au chef de l'Etat, Béji Caïd Essebsi, préconisant des mesures progressistes en faveur des minorités sexuelles et des femmes. L'instance réclame l'abrogation de l'article 230 du code pénal tunisien, pénalisant l'homosexualité jusqu'à trois ans de prison ferme. La proposition s'inscrit dans le cadre de revendications déjà soulevées par des associations des droits de l'Homme locales, mais rejetées par les précédents gouvernements. En témoigne le refus, début décembre 2014, du ministre de la Justice sous le cabinet Mehdi Jomaâ d'abolir ledit article. Héritage : vers une égalité entre homme et femme Depuis l'élection d'Essebsi à la présidence tunisienne, le 31 décembre 2014, les choses ont nettement évolué. En mai 2015, les autorités avaient reconnu la légalité de l'association «Shams», qui défend les droits de la communauté LGTB en Tunisie. Un premier pas en direction de l'abolition de l'article 230, le pendant du 489 au Maroc. De plus, au pays de la révolution du jasmin, la présence du drapeau arc-en-ciel lors de manifestations n'est plus une surprise. La Commission présidentielle recommande également une révision des règles de l'héritage en Islam vers l'établissement d'une égalité successorale. Une recommandation conforme aux promesses annoncées par Béji Caïd Essebsi, le 13 août 2017 à l'occasion de la commémoration de la journée des femmes en Tunisie. Cette fête est célébrée chaque année pour rendre hommage à l'action de Habib Bourguiba. Le 13 août 1956, le premier président de la Tunisie indépendante avait en effet promulgué le Code du statut personnel, mettant ainsi la loi islamique au placard. Le Maroc en retard Le Maroc est à des années-lumières des développements que connaît la Tunisie. Les minorités sexuelles n'y sont pas encore reconnues par les autorités. Leur dernière tentative de se réunir sous une seule bannière, fin décembre 2016, avait été rejetée par le ministère de l'Intérieur. De son côté, le ministre d'Etat chargé des droits de l'Homme multiplie les déclarations contre les intérêts de la communauté LGTB et la liberté de conscience au Maroc. En témoigne son interview publiée par le quotidien Assabah dans son édition d'aujourd'hui. Par ailleurs, les demandes des associations féministes de réviser les lois de l'héritage sont encore timides. Elles réclament pour l'heure une modification des règles du «Taâssib». En 2011, la Ligue démocratique des droits des femmes avait lancé un plaidoyer pour rendre justice aux filles héritières qui n'ont pas de frère, mais sans réel succès. Il en est de même pour le rapport du CNDH, rendu public en octobre 2015, préconisant d'«amender le Code de la famille de manière à accorder aux femmes les mêmes droits dans la formation du mariage, dans sa dissolution et dans les relations avec les enfants et en matière successorale, en conformité avec l'article 19 de la Constitution et l'article 16 de la CEDEF (Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes)».