Les gendarmes de la section de recherches de Marseille se sont notamment aperçus que le meurtre de Ghislaine Marchal «ne cadrait pas vraiment» avec la vie menée par le suspect en 1991. Vingt-six ans après les faits, le mystère qui entoure le meurtre de Ghislaine Marchal demeure entier. L'homme soupçonné depuis octobre 2016 d'être impliqué dans le meurtre de cette riche veuve, commis en 1991 à Mougins (Alpes-Maritimes), a été mis hors de cause par les enquêteurs début février, d'après les informations du quotidien 20 minutes. De nouvelles expertises effectuées sur les pièces à conviction, il y a un peu plus d'un an, avaient révélé des similitudes entre un ADN mêlé au sang de la victime et celui de cet homme, qui figurait alors sur le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg). Jean-Michel Prêtre, le procureur de Nice, avait ordonné aux gendarmes de localiser ce suspect et de prélever son ADN afin de pouvoir le comparer directement avec celui découvert sur la scène de crime. Cette enquête a été réalisée à la demande d'Omar Raddad, ressortissant marocain condamné pour ce meurtre en 1994, mais qui tente toujours de faire établir son innocence, rappelle 20 minutes, malgré avoir bénéficié de la grâce présidentielle en 1996. Après des «recherches laborieuses», ainsi que les a qualifiées le magistrat, le nouveau suspect a fini par être localisé fin janvier, dans la Nièvre (centre). Né en 1969, le concerné est seulement connu de la justice pour des «faits d'une relative banalité». Des portes manipulées à de très nombreuses reprises «Nous avons prélevé son ADN fin janvier. Le résultat de la comparaison avec celui retrouvé sur les scellés est revenu début février et cela ne 'matche' pas», a confié au journal une source proche de l'enquête. Les gendarmes de la section de recherches de Marseille (Bouches-du-Rhône), saisis par le procureur, se sont également aperçus que le meurtre de Ghislaine Marchal «ne cadrait pas vraiment» avec la vie menée par le suspect en 1991. L'avocate d'Omar Raddad, Sylvie Noachovitch, avait réclamé ces nouvelles expertises ADN dans le but d'obtenir un procès en révision pour innocenter définitivement son client. De son côté, Jean-Michel Prêtre avait appelé à la prudence dans ce dossier. Les portes abritant en lettres de sang les célèbres inscriptions «Omar m'a tuer» et «Omar m'a t», sur lesquelles l'ADN suspect avait été retrouvé, ont été manipulées à de très nombreuses reprises en l'espace de vingt-six ans, y compris lors du procès d'assises ayant conduit à la condamnation d'Omar Raddad, a expliqué le magistrat. Le soupçon d'erreur judiciaire Le 2 février 1994, la cour d'assises des Alpes-Maritimes avait condamné ce jardinier marocain, protagoniste malgré lui d'une affaire judiciaire rocambolesque, à 18 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de Ghislaine Marchal, veuve fortunée d'un équipementier automobile. L'audience avait révélé une enquête bâclée, truffée de négligences imbriquées les unes sur les autres : la fameuse porte n'a pas été protégée, les scellés n'ont pas été correctement conservés, la principale arme du crime, un couteau, n'a jamais été retrouvée... Deux ans après sa condamnation, Omar Raddad avait bénéficié d'une grâce présidentielle accordée par Jacques Chirac. Il avait été libéré le 4 septembre 1998, après sept ans d'emprisonnement, et ne sera pas rejugé : une requête en révision, déposée en janvier 1999, avait été rejetée en novembre 2002. La justice a fini par désigner un coupable mais la grâce présidentielle, en divisant par deux la peine, a renforcé le soupçon d'erreur judiciaire.