En Espagne, la représentativité de la communauté musulmane est régie par deux fédérations, deux entités qui se tirent à boulets rouges. Une organisation bipartite qui divise bien souvent les musulmans du pays ibérique. Détails. Une question se pose au lendemain des attentats qui ont frappé Barcelone et Cambrils : Comment est organisé l'islam en Espagne ? Le quotidien francophone La Croix a tenté de se pencher sur cette question, dans un article publié hier. Lorsqu'il s'agit de l'islam chez le voisin ibérique, deux entités sont les plus importantes : l'Union des communautés islamiques d'Espagne (UCIDE) et la Fédération espagnole des entités religieuses islamiques (FEERI). Ce sont «les deux plus grosses fédérations islamiques d'Espagne», explique la même source, affirmant que les deux entités sont rassemblées autour d'une seule et même «commission islamique espagnole» (CIE). Créée en 1992, elle fait partie intégrante du Conseil musulman de coopération en Europe (CMCE), l'organe représentatif auprès de l'Union Européenne. La CIE est donc l'organe représentatif officiel de l'islam et des musulmans aux yeux de l'administration espagnole et est le principal interlocuteur quant à la représentation, les négociations ou encore les signatures et suivi des accords. Ce n'est qu'en 1967 que l'Espagne promulgue la première loi offrant aux musulmans du pays de s'organiser en associations et fédérations au niveau local mais aussi national, administrant ainsi un cadre juridique jusque-là inexistant, poursuit La Croix. Deux fédérations pour plus d'un million de musulmans D'après le média français, l'islam en Espagne compte «plus d'un million de fidèles selon le dernier recensement du département religion du Pew Research Center (2010)». Une communauté importante sur le territoire espagnol, chose qui implique une représentativité à l'échelle nationale voire internationale, d'où le rôle de l'UCIDE, de la FEERI et de la CIE. Cette dernière vise à «surveiller et garantir les pratiques et espaces religieux musulmans dans le pays». «La formation des imams, la nomination de professeurs de religion islamique et même les allocations ou subventions du ministère de la Justice» sont aussi assurées par l'entité espagnole. Il n'empêche que chacune de ses deux composantes compte parmi ses membres différents profils. L'UCIDE compte parmi ses fidèles une majorité de «musulmans espagnols d'origine marocaine ou syrienne», confie le Père Gonzalo Villagran, spécialiste de l'islam dans l'Espagne contemporaine. A contrario, la FEERI, elle, est «plutôt composée d'Espagnols convertis». «Ces deux fédérations entretiennent de mauvaises relations, chacune se présentant comme la plus légitime et représentative», précise le spécialiste. Des tensions qui nourrissent et qui contribuent ainsi à des «situations de blocage» au sein même de la CIE. Après à peine 50 ans de formalisation des relations entre l'Etat ibérique et la communauté musulmane établie en Espagne, le chemin reste long alors que d'autres associations continuent de voir le jour. La Croix donne l'exemple de l'Association musulmane en Espagne (AME). Créée en 1971 par Riad Tatary Bakry, un Syrien naturalisé espagnol, l'ONG est aujourd'hui d'envergure nationale. L'association est à l'origine de la «première mosquée moderne de Madrid depuis 1085 : la mosquée Abu Bakr». Il est aussi important de noter que beaucoup de mouvements islamistes, marocains en l'occurrence, se développe en Espagne, à l'instar d'Al Adl Wal Ihsane (AWI). D'ailleurs, l'un des adeptes de la Jamâa, Mounir Benjelloun, est aux commandes aujourd'hui de la FEERI. Le mouvement interdit mais toléré au Maroc a même tendance d'étendre son influence en Espagne. En septembre dernier, AWI lançait la première université islamique en ligne en Europe. La Croix conclut par rappeler qu'en Espagne, 21% de l'ensemble des lieux de culte sont destinés aux musulmans avec 1 400 lieux de prières musulmans selon un rapport de l'UCIDE, publié en 2015.