Depuis la reconnaissance par l'administration Trump de la souveraineté marocaine sur le Sahara, la ministre espagnole des Affaires étrangères multiplie les déclarations contradictoires, marquant ainsi une rupture avec la politique longtemps suivie par les gouvernements à Madrid. Le Département de sécurité nationale (DSN), qui relève de la tutelle directe de la présidence du gouvernement espagnol, a reconnu dans son rapport 2020 sur les défis sécuritaires menaçant la stabilité du pays, que la reconnaissance par les Etats-Unis de la marocanité de la province va «aggraver la complexité de la situation». Depuis, la ligne politique observée par l'exécutif ibérique sur ce sujet a perdu le nord. Si auparavant Madrid plaidait pour une «solution politique acceptées par les parties» avec parfois une mention selon les circonstances à «l'autodétermination du peuple sahraoui», l'heure est à la confusion depuis le 10 décembre, avec des prises de positions contradictoires. La dernière sortie de la ministre espagnole des Affaires étrangères sur la «responsabilité» de son pays, indique que sur la question du Sahara, la cheffe de diplomatie navigue à vue. Au lendemain de la décision de Donald Trump, elle avait mis tous ses œufs dans le panier de Joe Biden. Avant même que le démocrate ne soit officiellement investi président des Etats-Unis, elle s'est empressée de souhaiter, le 14 décembre, que l'administration Biden «puisse évaluer la situation et voir de quelle manière elle va se positionner et travailler en vue d'une solution juste et durable qui ne dépend pas d'un alignement d'un moment sur un camp ou sur l'autre». Un pari qui s'est révélé infructueux. Apres Biden, Gonzalez parie sur l'ONU La ministre a attendu des semaines et des mois un signe en provenance de la Maison blanche révoquant la décision de Trump, avant de se résoudre à accepter la réalité des faits et miser sur l'ONU, le maillon le plus faible dans l'équation de ce conflit. «C'est aux Etats-Unis de décider de leur position sur le Sahara. Ce que l'Espagne a toujours dit, c'est qu'il est important que nous donnions une impulsion aux négociations aux Nations unies», a-t-elle souligné, le 15 juin, soit cinq jours après l'échec de la réunion Biden-Sanchez en marge du sommet de l'OTAN à Bruxelles. Une semaine plus tard, la cheffe de diplomatie revient sur le même sujet avec une nouvelle déclaration fracassante, soulignant que son gouvernement est «prêt à considérer toute solution que le Maroc apportera» pour le règlement du différend territorial, balayant ainsi d'un revers de main le plan d'autonomie proposé par le Maroc en 2007, qualifié depuis par le Conseil de sécurité comme étant une initiative «crédible et réaliste». La ministre des Affaires étrangères a continué sa navigation erratique sur la question du Sahara, en prétextant la «responsabilité» de son pays dans le conflit. Autant de déclarations sur le même sujet en quelques mois alors qu'auparavant, les gouvernements espagnols de droite comme de gauche se contentaient de souligner publiquement et brièvement le maintien de la position de l'Espagne sur le dossier du Sahara. Une position qui satisfaisait à la fois le Maroc et le Polisario. Un message qu'Arancha González Laya avait, d'ailleurs, transmis à Rabat le 24 janvier 2020, lors de son entretien avec son homologue marocain, Nasser Bourita. La ministre espagnole des Affaires étrangères affirmait que sur le différend territorial, son pays «a une politique d'Etat qui n'est pas tributaire des changements de gouvernements ou de coalition». Des affirmations que la cheffe de la diplomatie a visiblement oubliées dans le chamboulement provoqué par la reconnaissance de la marocanité du Sahara par les Etats-Unis. C'est cette confusion que le chef du Parti Populaire a pointée du doigt dans ses interventions en pleine crise autour de l'hospitalisation de Brahim Ghali en Espagne, estimant que la fébrilité du gouvernement Sanchez a nui aux relations de son pays avec le Maroc. Article modifié le 2021/07/06 à 17h02