Mardi 4 mai, le Franco-marocain Adil Sefrioui a reçu sa convocation au tribunal correctionnel de Dole. Son agresseur sera jugé le 28 mai pour violences et injures racistes. Le père de famille espère une requalification en tentative d'homicide. Le 28 mai, Adil Sefrioui assistera à l'ouverture du procès du septuagénaire poursuivi pour «violences volontaires avec arme et injures racistes» auprès du tribunal correctionnel de Dole. Le 21 avril dernier, l'artisan électricien franco-marocain a été agressé devant son domicile, après avoir abordé l'homme de 72 ans qui prenait des photos des enfants en terrasse. Mais le parquet de Lons-Le-Saunier n'a pas retenu la tentative d'homicide volontaire, qui aurait renvoyé l'affaire aux assises. Contacté par Yabiladi, le père de famille a confirmé avoir reçu sa convocation au tribunal, mardi 4 mai. Cela dit, il souhaite une requalification des faits. «Nous pensons que cela devrait se faire, compte tenu de ce qui a été dit dans la vidéo documentant la tentative de meurtre préméditée», a déclaré la victime. Cette dernière rappelle les images où l'agresseur apparaît en train de la suivre en l'insultant et en la traitant de «bicot», un croisillon à la main, ou encore celles à la fin de la vidéo, où le père de famille est renversé. Entre ces deux moment, l'agresseur aurait sommé Adil de «[s]'abaisser sous le capot». «Lorsqu'il a pris le volant et que j'ai ouvert sa portière, il pouvait s'arrêter aussi, mais il a continué à rouler sur près de 200 mètres, avant de prendre la route pour faire demi-tour et essayer de m'écraser par l'arrière. Sur la base de cette succession de faits, je considère qu'il y a bien eu une volonté de tuer.» Une tentative d'homicide raciste sous-estimée Cette version laisse entendre qu'il y a eu en effet préméditation, bien que la défense invoque la légitime défense. L'agresseur, qui a reconnu les injures racistes, a déclaré avoir été ébloui par la lumière, peu avant de renverser Adil. Mais ce dernier persiste sur la qualification de tentative d'homicide volontaire. «Il roulait doucement en attendant de me mettre devant la terrasse pour accélérer et m'écraser ma famille et moi, c'est comme cela que j'ai entendu le bruit du moteur et que j'ai compris qu'il allait me renverser. J'ai vu la mort et j'ai à peine eu le temps de me retourner puis de sauter au-dessus du capot», se souvient le père de famille. «Lorsque mon torse a percuté le pare-brise, je l'ai vu garder la main sur la boîte à vitesse tout en continuant à accélérer. J'ai sauté ensuite en essayant d'éviter la vitre d'une fenêtre et en voulant atterrir dans le gazon, je me suis cassé le nez et le doigt sur du béton», se rappelle-t-il amèrement. France : Un Marocain victime d'une violente agression raciste à Dole «Une deuxième ambulance après celle qui m'a conduit à l'hôpital est venue recueillir mon agresseur. Des témoins sur place l'ont entendu dire encore 'enlevez-moi ces bicots de ma vue, j'en ai marre de voir leurs gueules'», nous confie encore Adil, soulignant que «les policiers et les pompiers étaient sur place et tout le monde a entendu». Cependant, «les personnes qui ont assisté à la scène n'ont pas été convoquées pour enregistrer leurs déclarations». «J'ai l'impression qu'on a voulu faire en sorte que l'affaire n'aille pas plus loin», déplore la victime. Pour cause, les agents dépêchés sur les lieux n'«ont effectué ni traçage au sol, ni balisage de la zone de l'accident», selon Adil Sefrioui. Il ajoute ne pas les avoir vus non plus dresser de procès-verbal sur place. «Un agent demandait seulement à la radio s'il embarquait le chauffeur ou pas et une policière a demandé à mon épouse si on appelait les pompiers, alors que j'étais en sang», se rappelle-t-il. «Du début à la fin, il est sûr que les faits ont été pris à la légère. Mon agresseur a été admis aux urgences pendant que j'y étais et au lieu d'être placé sous surveillance de la police, il a été ramené chez lui et laissé en liberté avant sa garde à vue, alors que cet homme a failli me tuer.» Un foyer familial affecté par l'attaque raciste Adil dit avoir reçu un bref appel de soutien de la part du maire de Dole que douze jours après les faits. Lesquels se sont passés aussi sous le regard des enfants et de leur maman, dont on entend les cris de panique à la fin de la vidéo documentant l'attaque. Ce mardi, les petits ont eu leur premier rendez-vous avec le psychologue. «Ils arrivent à mettre des mots sur ce qui s'est passé, mais le nombre de séances sera défini en fonction de ce que recommandera le spécialiste», nous annoncent les parents. France : L'agresseur d'Adil Sefrioui poursuivi pour violences et injures racistes Pour la mère de famille, «Adil est en vie et on s'occupe des enfants, ce qui est le principal». En revanche, la victime est en arrêt d'activité alors qu'elle travaille à son compte, ce qui impacte la situation économique du ménage. Le jour de l'attaque raciste, l'hôpital de Dole a évalué son temps d'immobilisation à 30 jours. «Alors que l'examen légiste pour évaluer le préjudice corporel sous forme d'ITT devait se faire assez rapidement, les urgentistes m'ont annoncé vaguement que je le ferais une semaine plus tard», a-t-il ajouté. Psychologiquement et physiquement, Adil estime que la situation reste «difficile à gérer», d'autant que la mobilisation ne se ressent pas considérablement, au niveau du tissu associatif local. Toutefois, la victime a reçu, lundi, la visite de représentants de SOS Racisme. Elle a également été contactée par la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA), ainsi que le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP).