Le dernier congrès du PJD s'était tenu en juillet 2012. Les statuts de la formation du chef du gouvernement stipulent qu'un congrès doit être organisé tous les 4 ans. Mais à l'approche des élections, le PJD a estimé plus utile de retarder sa grand-messe de quelques mois, d'où ce congrès extraordinaire. Explications Le Secrétariat général du PJD a donc décidé, voici quelques semaines, de tenir un congrès extraordinaire pour décider du report du congrès ordinaire. Or, le congrès est l'instance suprême du parti, qui élit aussi bien le Conseil national que le secrétariat général que, enfin, le secrétaire général. Ces instances seront donc prorogées de quelques mois, le temps que les élections se tiennent. Le président du conseil national et ancien ministre des Affaires étrangères le Dr Saadeddine Eltomani nous a expliqué qu' « il est difficile d'organiser un congrès général en même temps que la préparation des élections. Pour ce congrès, il faut élire des délégués dans des congrès régionaux, et cela nécessite beaucoup de temps et de travail. C'est très difficile de faire cela en période électorale où les cadres et les membres du parti sont occupés à mobiliser les électeurs ». Fort bien. Mais est-ce légal ? Apparemment oui, car la loi est souple et peut accorder un délai. Alors pourquoi organiser un tel congrès, en grande pompe, alors qu'il aurait fallu aviser le ministère de l'Intérieur d'un report de six mois de la tenue, et que le chef du PJD est aussi le chef du gouvernement, et donc du ministre de l'Intérieur ? Parce que les pairs de Benkirane souhaitent adresser un message à qui de droit… En effet, si Benkirane est toujours secrétaire général du parti et que celui-ci remporte les législatives du 7 octobre, le roi Mohammed VI, bien que libre de désigner qui il veut à la tête du gouvernement, pris au sein de la formation arrivée première, serait en quelque sorte « tenu » de reconduire Benkirane. C'est le but de toute la manœuvre du congrès extraordinaire, nous explique un cadre du parti qui souhaite garder l'anonymat. Et Abdelilah Benkirane, bien qu'il ne le dise pas explicitement, se verrait bien, très bien même, repartir pour un autre tour de cinq ans à la tête de l'Exécutif. Lors d'une émission sur Medi1TV en octobre dernier, il avait expliqué qu' « au PJD, on ne dit jamais vouloir une fonction, mais on accepte toujours ce qu'on vous confie »… C'est dit. C'est donc en quelque sorte une légitimation nouvelle de Benkirane par les membres de son parti que l'on recherche, et une manière de faire pression pour qu'il reste en fonction. En dehors de lui, en effet, deux autres dirigeants peuvent nourrir des espoirs de devenir chef du gouvernement, Mustapha Ramid et Saadeddine Elotmani. Le premier est trop marqué idéologiquement, faisant partie des « faucons » du PJD, et le second, bien plus modéré et consensuel, est régulièrement chahuté par un Benkirane qui ne lui a jamais pardonné d'avoir été élu à sa place à la tête du parti en 2004. Une forte animosité oppose les deux hommes. Le congrès extraordinaire sera donc une occasion pour Benkirane et Elotmani de prendre leurs marques, car les deux resteront en fonction de respectivement numéros 1 et 2 de la formation islamiste.