Il fallait s'y attendre, les éditeurs marocains réunis au sein de la Fédération marocaine des éditeurs de journaux, ou FMEJ, ont publié un communiqué dans lequel ils annoncent leur rejet des dispositions comprises dans le « pack » législatif proposé par le ministre de la Communication Mustapha el Khalfi. Un bras de fer, un nouveau, s'annonce donc entre les patrons de presse marocains et leur ministre. L'Assemblée générale a reconduit le directeur d'al Ayyam, Noureddine Miftah, pour un 3ème mandat à la tête de la FMEJ. Les trois textes de lois sont ceux du Code de la presse, du Conseil national de la presse et du statut du journaliste. Les deux derniers sont déjà passés en Conseil de gouvernement et de ministres et se trouvent aujourd'hui dans la phase parlementaire. Le Code de la presse n'a pas encore été examiné en conseil de gouvernement. Les éditeurs de journaux se sont dits surpris d'apprendre que les deux textes sont au parlement alors que selon leurs discussions avec le département d'el Khalfi et el Khalfi lui-même, il s'agissait d'un « pack » homogène, comprenant les trois textes. L'approche participative, tant chantée et louée par le ministre, est tout simplement démentie par les éditeurs qui affirment ne plus avoir eu de discussion avec Mustapha el Khalfi depuis… novembre 2014 ! Ledit ministre, lui, semble satisfait de la mouture des trois textes qui ont été élaborés par son département Alors la FMEJ, à l'issue de son assemblée générale, a publié un communiqué où elle rejette un certain nombre de points inscrits dans les trois projets de loi et qui, selon eux, mettent en danger les journalistes. Florilège de ces mesures rejetées par les éditeurs : le retrait définit de la carte de presse et l'interdiction d'exercer durant 10 ans, la possibilité de suspension d'un journal ou d'un site poursuivi en justice avant même le début de l'examen de son affaire par les juges, les passerelles prévues entre Code de la presse et Code pénal qui font peser beaucoup de périls sur les journalistes, les restrictions à certaines publicités (comme les jeux de hasard), la volonté de soumettre le Conseil national de la presse au gouvernement en prévoyant un représentant de l'Exécutif dans ce conseil… Selon un responsable de la FMEJ qui s'est confié à PanoraPost, « s'il n'y a plus, en effet, de peines de prison dans le nouveau Code de la presse, les choses n'en sont pas moins très graves car les passerelles existant entre Code de la presse et Code pénal exposent les journalistes à des peines inédites, comme l'interdiction d'exercer et la déchéance des droits civiques et familiaux ! ». La FMEJ déclare en conséquence avoir décidé « de se dresser contre ce Code de la presse avec tous les moyens et de toutes les manières possibles, sachant que le processus de législation a été introduit avant tout accord avec les professionnels ainsi que cela est stipulé dans le discours royal de 2002. Cela dément toutes les allégations sur une approche participative et met en doute la volonté d'une réforme réelle ». La FMEJ évoque aussi les chutes des ventes des journaux en papier, du fait de cette pratique qui se généralise consistant à « louer » des journaux pour la lecture. Le Maroc doit être le seul pays connu à faire cela… Enfin, les éditeurs ont débattu des graves problèmes financiers liés à la chute de leur chiffre d'affaires publicitaires. Ainsi, le CA a été réduit de 17 à 23% sur le volume publicitaire global. De plus, l'augmentation du nombre des intermédiaires pour la publicité a eu comme conséquence d'imposer des commissions allant jusqu'à 30% du CA commandé. Si on compte aussi le comportement des annonceurs qui préfèrent aller en masse pour leurs annonces vers les géants de la publicité, c'est au final tout un secteur, celui de la presse électronique qui est menacé. La FMEJ en appelle donc à tous les intervenants dans son secteur pour tenir compte de ces difficultés et appelle les autorités publiques, les annonceurs et agences et régies publicitaires, en plus des distributeurs et des partenaires sociaux, à déployer tous les efforts requis pour soutenir ce secteur primordial pour la profession.