Le gouvernement conservateur de Theresa May était plongé dans la crise lundi après la démission du ministre du Brexit David Davis, affaiblissant la Première ministre britannique dans les négociations sur la sortie de l'UE. « Crise »: le mot était à la une de la plupart des titres de la presse britannique lundi matin, qui s'interrogeait sur un possible « effet domino ». Le départ de M. Davis laisse « un trou béant au sommet du ministère mis en place par Mme May pour planifier et négocier la sortie du Royaume-Uni de l'UE », a souligné le journaliste Jack Blanchard, du site Politico. « Et plus inquiétant encore pour Downing Street, (sa démission) place Mme May en position de vulnérabilité alors que d'autres ministres pro-Brexit se demandent s'il faut lui emboîter le pas et tenter de la faire tomber », a-t-il ajouté. David Davis, un eurosceptique convaincu de 69 ans, a démissionné dimanche deux jours après une réunion de Mme May avec ses ministres qui avait abouti à l'annonce d'un accord sur la volonté de maintenir une relation commerciale étroite avec l'UE. Dans sa lettre de démission, il estime que cette voie ne permettrait pas de faire ce pour quoi les Britanniques ont voté. « Au mieux, nous serons dans une position de faiblesse pour négocier » avec Bruxelles, a estimé ce vieux routier de la politique britannique. Lundi sur la BBC, il a estimé que Theresa May survivrait à son départ, affirmant qu'il n'avait pas l'intention, à ce stade, de disputer son leadership. « Si j'avais voulu faire tomber Theresa May, ça n'aurait pas été le bon moment », a-t-il déclaré. Downing Street devrait annoncer dans la matinée le nom de son successeur. Parmi les noms les plus cités figurent notamment ceux de deux ministres eurosceptiques influents, Boris Johnson (Affaires étrangères) et Michael Gove (Environnement), mais aussi David Lidington, secrétaire d'Etat auprès du cabinet de la Première ministre. M. Davis avait été nommé en juillet 2016 pour prendre la tête du ministère créé au lendemain du vote des Britanniques pour quitter l'UE. Cela faisait des mois que la rumeur de sa démission courait mais il s'était toujours montré loyal en public envers Mme May. Lire aussi :Brexit: Londres propose une « zone de libre échange » avec l'UE Réagissant à cette démission, le leader de l'opposition travailliste Jeremy Corbyn a estimé qu'elle mettait en danger les négociations avec Bruxelles sur la sortie de l'UE, prévue le 29 mars 2019. « Le départ de David Davis à un moment aussi crucial montre que Theresa May n'a plus d'autorité et est incapable de mettre en oeuvre le Brexit », a-t-il déclaré sur Twitter, décrivant un gouvernement en plein « chaos » alors qu'il vient à peine de présenter son plan pour l'après-Brexit. Ce plan, dévoilé vendredi soir, prévoit de mettre en place une zone de libre échange et un nouveau modèle douanier avec les 27, afin de maintenir un commerce « sans friction » avec le continent. Avant de les présenter à Bruxelles, Mme May doit les détailler lundi aux députés britanniques ainsi qu'à son Parti conservateur. Mme May doit leur dire que son projet est « le bon Brexit », « le Brexit qui est dans l'intérêt national ». Mais la réunion s'annonce désormais houleuse, avec des députés conservateurs favorables à un Brexit dur en embuscade. Dimanche, Michael Gove a défendu l'accord tout en admettant qu'il n'était pas celui qu'il espérait, mais qu'il était « réaliste ». Le député conservateur europhobe Jacob Rees-Mogg a, lui, dénoncé le « défaitisme » du gouvernement, affirmant qu'il voterait contre son plan et qu'il ne serait pas le seul, dans le Daily Telegraph. Le monde économique a également fermement rejeté le plan, pour des raisons opposées. Dans une lettre ouverte, le fondateur de la marque de boissons Innocent, Richard Reed, rejoint par une centaine d'entrepreneurs et dirigeants d'entreprise, a estimé que « le coût, la complexité et la bureaucratie engendrés par la sortie de l'union douanière et l'adoption d'arrangements alternatifs sont la dernière chose dont nos entreprises ont besoin ».