Le président français a confié à son nouveau ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, la mission de rétablir les liens avec Rabat, mis à mal par plusieurs crises diplomatiques ces dernières années. La tâche s'annonce ardue. Alors que les relations entre la France et le Maroc traversent une période de turbulences depuis quelques années, le président français Emmanuel Macron a décidé de confier à son nouveau chef de la diplomatie, Stéphane Séjourné, la responsabilité de renouer le dialogue avec le Maroc. Une nomination qui n'est pas sans susciter des interrogations, tant le parcours de l'ancien eurodéputé centriste est marqué par des prises de position qui ont froissé Rabat, notamment en janvier 2023, où le royaume avait pris très personnellement le fait d'être visé par le vote d'une résolution accusatrice au Parlement européen dont... Stéphane Séjourné, à l'époque chef du groupe centriste Renew à Bruxelles, avait été l'un des principaux architectes. A l'époque, les autorités avaient dénoncé une « ingérence » et une « instrumentalisation » de l'instance européenne. Un an plus tard, le même Stéphane Séjourné se retrouve à la tête du quai d'Orsay, avec pour mission de « personnellement » œuvrer au rapprochement entre Paris et Rabat, selon ses propres mots dans un entretien au quotidien français Ouest-France. Le nouveau ministre des Affaires étrangères français assure avoir eu « plusieurs contacts » avec ses homologues du Royaume depuis sa prise de fonction, le 12 janvier dernier, et affirme que le président Macron lui a demandé « d'écrire un nouveau chapitre » dans la relation franco-marocaine, qui est « stratégique » et « historique » pour les deux pays. Il s'agit, selon lui, de « porter des priorités communes, écrire une nouvelle page et avoir un nouvel agenda politique entre nous », tout en cherchant à « regagner la confiance » du Maroc. Un climat de défiance Mais cette confiance a été sérieusement ébranlée par plusieurs affaires qui ont émaillé les rapports entre les deux pays ces dernières années. La plus récente et la plus grave est sans doute le scandale Pegasus, révélé en juillet 2021, qui accusait à tort le Maroc pour son utilisation. Le Maroc a nié ces accusations, et a porté plainte dans plusieurs pays notamment en France et en Belgique et en Allemagne, plainte dont les tribunaux de ces pays refusent d'instruire. Autre source de tension : la politique de rapprochement avec l'Algérie voulue par le chef d'Etat français, qui a effectué une visite historique à Alger en août 2022, alors que le pays a décidé de rompre ses relations avec le Maroc avec une accusation fantaisiste contre le Royaume de « conduites hostiles ». Alors que l'Algérie s'est de manière volontaire et calculée immiscée dans le dossier du Sahara marocain en instrumentalisant une milice, le Polisario et torpiller en même temps tout processus de paix. Sur ce dossier, la France a toujours affiché son soutien au plan d'autonomie proposé par le Maroc, qu'elle juge « crédible » et « sérieux », tout en appelant à la reprise du dialogue sous l'égide des Nations unies. C'est d'ailleurs sur ce point que Stéphane Séjourné semble vouloir envoyer un signal d'apaisement à Rabat, en rappelant dans son entretien à Ouest-France que la France a toujours été « au rendez-vous, même sur les dossiers les plus sensibles comme le Sahara « occidental » ». Mais cette position française n'est pas sans susciter des réactions négatives de la part de l'Algérie, qui accuse Paris de faire preuve de « partialité » et de « complaisance » envers le Maroc. Le nouveau ministre des Affaires étrangères français va donc devoir faire preuve d'un grand sens de l'équilibre diplomatique tout en préservant les intérêts de la France dans la région. Un geste d'ouverture Le climat entre la France et le Maroc n'a pas toujours été aussi tendu. Les deux pays ont longtemps entretenu des relations privilégiées, fondées sur des liens historiques, culturels, économiques et sécuritaires. Mais ces liens se sont distendus au fil des ans, à cause de divergences politiques, de malentendus et de crispations. Les relations entre les deux pays semblaient alors au plus bas, avant qu'un geste d'ouverture ne soit fait le 19 octobre où le Roi Mohammed VI a nommé Samira Sitail au poste d'ambassadrice du Maroc en France. C'est dans cette dynamique de décrispation que Samira Sitaïl, sera reçue le 29 février 2024 à l'Elysée par le président Emmanuel Macron, auquel elle remettra ses lettres de créance.