L'intégration financière des pays du Sud, qui est un phénomène endogène à l'évolution de l'économie mondiale, est tributaire d'une gestion macroéconomique monétaire et budgétaire responsable associé à un cadre macroprudentiel approprié, a estimé le président de la Banque centrale du Pérou, Julio Velarde. Ce haut responsable péruvien, qui est en poste depuis 17 ans et auquel la majorité des analystes attribue la stabilité de l'économie péruvienne malgré les soubresauts politiques des dernières années, a souligné que l'intégration financière des pays du Sud reflète « le processus accéléré d'intégration commerciale, non seulement avec les économies du Nord, mais aussi avec la Chine », tout en présentant des avantages nets pour les économies émergentes. Dans ce contexte, Velarde recommande aux pays du sud de déployer un plan d'action pour aller de l'avant dans leur intégration financière. Inter/ Réformer les quotes-parts du FMI et de la BM. En premier lieu, dit-il dans un entretien avec la MAP à l'occasion de sa participation aux Assemblées annuelles de la Banque mondiale (BM) et du Fonds monétaire international (FMI) ouvertes ce lundi à Marrakech, ces pays sont invités à plaider en faveur d'une réforme des quotes-parts du FMI et de la BM afin de parvenir à une représentation plus équitable au niveau de ces institutions. Ils doivent en outre « rechercher une plus grande coopération financière pour réduire l'impact de la fragmentation économique sur les revenus des groupes les plus vulnérables (en particulier en matière d'alimentation) et accroître le financement multilatéral pour le développement durable des économies du Sud (infrastructures, connectivité, environnement). Ces actions comprennent également un renforcement de la coopération financière internationale au niveau régional, en complément des initiatives multilatérales et des efforts nationaux pour l'accumulation des réserves de change. Inter/ Intégration financière et inclusion numérique. Velarde a fait remarquer que la thématique de l'intégration financière sera abordée à Marrakech à travers deux focus relatifs à l'inclusion numérique et au financement institutionnel du développement. Pour lui, un avenir numérique inclusif est « particulièrement pertinent ». Et pour cause : en 2022, près de 3 milliards de personnes ne sont pas connectées à internet, 1,4 milliard de ne sont pas bancarisées et 850 millions de personnes n'ont pas de papiers d'identité officiels. Pour ce qui est du financement institutionnel du développement, Velarde a considéré que des questions clés pour les économies émergentes seront examinées, en rapport notamment avec les projets attrayants pour les investisseurs dans les marchés émergents et les économies en développement. Interrogé sur le rôle que pourraient jouer les pays du Sud pour corriger la fragmentation économique et politique du monde et peser davantage sur l'économie internationale, Velarde a commencé par faire observer que l'intégration commerciale a perdu de son élan ces dernières années, face à des événements tels que le Brexit, la guerre en Ukraine et les tensions entre la Chine et les Etats-Unis, en plus des effets « cicatrisants » de la pandémie du Covid et son impact négatif sur les chaînes de valeur mondiales. Inter/ « Cicatriser » les effets de la pandémie du Covid. Il est évident pour lui que « le centre de gravité économique s'est déplacé vers les économies émergentes, et que ces nations ont un rôle essentiel à jouer pour contrer cette fragmentation économique et politique et ce, en encourageant la coopération multilatérale et en renforçant le système économique mondial ». Pour Velarde, des actions doivent être mises en œuvre pour renforcer ce système économique, en veillant à ce que la voix des pays émergents et en développement soit prise en compte dans les débats et les décisions au niveau mondial. Il faut aussi promouvoir des politiques macroéconomiques saines, renforcer les échanges Sud-Sud et Sud-Nord en consolidant la mise en œuvre des accords commerciaux existants. Il recommande aussi la consolidation de la coopération Sud-Sud par l'intégration régionale, et la prévention des perturbations commerciales (en particulier dans le commerce des denrées alimentaires et d'autres biens essentiels) afin d'éviter un impact majeur sur la pauvreté dans les économies émergentes. Evoquant le monde post-covid et le rôle des institutions financières, Velarde a expliqué que son institution, à l'image des principales banques centrales du monde, a œuvré à la préservation de la stabilité monétaire en suivant des « objectifs explicites d'inflation dans une fourchette de 1 à 3 % ». « L'inflation récente, a-t-il reconnu, est un phénomène mondial causé par des augmentations significatives des prix internationaux de l'énergie et des denrées alimentaires et par des problèmes dans la chaîne d'approvisionnement mondiale », rappelant qu'au Pérou l'inflation avait atteint son maximum en juin 2022, avec un taux de 8,8 % en glissement annuel. Les travaux des Assemblées annuelles de la BM et du FMI ont débuté, ce lundi à Marrakech, avec la participation du gotha mondial de l'économie et de la finance, afin d'examiner les principaux enjeux liés aux financements des économies, à la croissance économique et aux changements climatiques. Plus de 12.000 participants, dont 4.500 délégués officiels de 190 pays, prennent part à ces Assemblées qui se déroulent jusqu'au 15 octobre courant.