La succession au président Alassane Ouattara aux commandes du pays à partir de 2020 continue de peser de tout son poids sur l'échiquier politique ivoirien. Les événements qui laissent planer l'incertitude et le doute sur la quiétude et la stabilité d'un pays longtemps déchiré par les guerres et les crises politico-militaires se sont succédés et continuent de se produire au fil des jours. Guerre intestine, manque de cohésion, et gestations en série au sein des partis politiques les plus influents, en l'occurrence le Parti Démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI-RDA), de l'ancien président Henri Konan Bédié, et le Rassemblement Des Républicains (RDR), le parti de l'actuel locataire du palais d'Abidjan, tiraillements politiques de tous bords entre militants et partisans d'autres partis politiques qui forment la coalition au pouvoir dite ''le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix : (RHDP)'' qui ont déjà manifesté des prétentions présidentielles pour 2020, meublent le paysage politique ivoirien depuis des mois. Au plan sécuritaire, les attaques récurrentes et non jugulées contre plusieurs postes (commissariats, brigades..) des forces de l'ordre de sécurité, les mouvements d'humeur des ex-combattants (qui n'ont pas été intégrés dans l'armée républicaine), et les mutineries de militaires, sont d'autres faits marquants venus s'ajouter à la liste, pour fragiliser le pays et semer un climat de psychose au sein des Ivoiriens malgré, les déclarations rassurantes et les tentatives d'apaisement menées, depuis, par le pouvoir. Dans cette logique évolutive, le fait le plus marquant ces derniers jours, demeure l'arrestation et l'incarcération tout récemment, de Souleymane Kamagaté Koné, ''Soul II Soul'', directeur du protocole du président de l'Assemblée Nationale (PAN), Guillaume Kigbafori Soro (GKS), dans le cadre de l'affaire de découverte d'une cache d'armes dans sa demeure à Bouaké (épicentre de la rébellion de 2002), lors de la dernière mutinerie ayant secoué le pays. Cette arrestation, selon des observateurs, viendrait donc jeter de l'huile sur le feu dans la relation entre Ouattara et Guillaume Soro, déjà ''tendue'' depuis des mois, alors même que les partisans du GKS y voit clairement ''une guerre ouverte'' contre leur Mentor supposé déjà avoir des prétentions présidentielles pour 2020, bien que le patron de l'ancienne rébellion des Forces Nouvelles, ne les a jamais affichées explicitement, se contentant de placer son actuel mandat sous le signe du Pardon et de la Réconciliation de tous les Ivoiriens. Dans un communiqué publié le 9 octobre, le chef de service de communication du GKS, Moussa Touré écrit : ''Nous apprenons l'arrestation ce jour, de Koné Kamaraté Souleymane dit ''Soul II Soul'', ministre plénipotentiaire et directeur du protocole de l'Assemblée Nationale, une inculpation qui intervient dans le cadre de l'affaire dite découverte d'une cache d'armes dans un domicile à Bouaké''. ''Soul II Soul a déjà fait la prison en 2000 pour la cause du président Alassane Ouattara (....)'', rappelle le communiqué qui ajoute que le PAN, informé de la situation, apporte son soutien à la famille de son collaborateur, appelle les Ivoiriens au calme et à la sérénité et espère que la justice fait librement son travail. Accusé de ''complot contre l'autorité de l'Etat'' et placé sous mandat de dépôt, Soul II Soul s'en est pris directement dans une lettre ouverte, le mercredi 11 octobre, au chef de l'Etat, l'accusant de viser le PAN. ''Aujourd'hui à cause de mon patron Guillaume Soro je suis en prison. Parce que ce n'est pas moi qu'on vise (....) C'est mon patron qu'on cherche'', écrit le directeur du protocole de Soro, avant de poursuivre dans cette missive : ''Est- ce c'est parce qu'on estime que Soro serait un obstacle au troisième mandat d'Alassane Ouattara à la tête de la Côte d'Ivoire en 2020''. Officiellement, le régime en place nie l'existence de toute ''discorde'' entre Guillaume Soro et Ouattara, deux ans ayant mené le combat ensemble. ''Il n'y a pas de raison qu'il y ait des dissensions entre Guillaume Soro, et le président de la république'', déclare le même jour, le porte-parole du gouvernement ivoirien, Bruno Nabagné Koné au terme d'un conseil des ministres, avant de poursuivre : ''en tout cas, s'il y en a le cas, cela ne viendra pas du président de la République''. Cette guéguerre au sommet de l'Etat pourrait jeter un gros nuage sur l'avenir du pays, alors que le climat de quiétude repris il y'a quelques mois, commence à se volatiliser cédant la place à un état de torpeur au sein des Ivoiriens. Il s'agit d'une situation délétère surtout, que des réactions continuent de foisonner de partout comme pour évoquer le déclenchement d'une guerre ouverte de positionnement par rapport aux prochaines échéances de 2020, entre le camp Soro, et celui de Ouattara qui, semblablement, se trouveraient engagés dans une ''course'' sans merci pour le pouvoir. Poussant encore le raisonnement très loin, certains médias locaux sont allés jusqu'à avancer un éventuel projet en cours pour la destitution du président de l'assemblée nationale, Guillaume Soro dans le cadre d'une stratégie visant à lui barrer la route pour l'élection de 2020. Une information vite mise à nu par des cadres du RDR en fonction en tant que membres du gouvernement. Ces derniers ne manquent pas de rappeler que Soro est cadre agissant au sein du RDR a été élu légalement à ce poste, sous la bannière du parti présidentiel, et qu'il a toujours sa place au sein de cette formation politique. Le principal parti politique de l'opposition, le Front Populaire Ivoirien (FPI), appelé à analyser la situation politique, par le biais de son patron, Pascal Affi N'Guessan, a réagi vendredi 13 octobre face à l'arrestation de Soul II Soul, considérant qu'il s'agit là d'un ''élément déclencheur de la guerre entre Soro et le camp Ouattara, avant d'ajouter que ''cette situation s'apparente à une crise au sommet de l'Etat'' et que par l'affaire Soul II Soul, c'est Soro que l'on veut atteindre. Par ailleurs, Un regard depuis l'étranger sur la situation en Côte d'Ivoire, laisse constater également que des pays ayant des intérêts stratégiques sur le sol ivoirien, manifestent cette inquiétude, à l'image de la France pour qui : en Côte d'Ivoire, il y a des signaux d'instabilité, ou encore les USA pour qui, une telle inquiétude pourrait être basée sur des menaces terroristes, alors que la guéguerre entre les deux hommes d'Etat complique davantage la donne. Si du côté du camp Ouattara, le discours se veut plus apaisant si ce n'est un silence radio sur une éventuelle discorde avec Soro, du côté du camp Soro, les accusations sont ouverte et les discours se montrent plus virulents et vont jusqu'à évoquer ''une politique d'épuration qui est en marche contre Soro et ses proches'', et soutenir que Ouattara ''venait d'ouvrir la boîte de Pandore''. Certes, il s'agit d'une ''nouvelle période d'épreuves qui vient de s'ouvrir en Côte d'ivoire''. Alors qu'Ouattara et Bédié procèdent et tentent de s'accorder sur les derniers réglages pour la mise en place avant de la fin de l'année, d'un parti unique (RHDP), le défi est primo, d'œuvrer pour un retour de la cohésion au sein RDR, et secondo de parvenir à plus grande échelle, à se mettre d'accord sur le nom de la personne pouvant se présenter comme candidat au Scrutin Présidentiel de 2020. Aussi le pays réalise actuellement des taux de croissance parmi les plus élevés au monde, et vit depuis des années aux rythmes de chantiers grandioses et de projets structurants. Les pouvoirs sauront donc faire prévaloir la voie de la sagesse et de la raison, pour épargner au pays de s'engouffrer, de nouveau, dans une crise, dont les conséquences pourraient être lourdes dans les années à venir, sur les plans économique et social pour l'ensemble des Ivoiriens épris de paix et de quiétude.