Bien que la digitalisation des petits commerces s'impose en tant que choix incontournable pour moderniser le mode d'approvisionnement et faciliter l'accès du client au produit, il est primordial de cerner les enjeux qui lui sont afférents en vue de profiter du plein potentiel qu'offre ce virage. A travers les technologies numériques, les petits commerçants peuvent gagner en efficacité commerciale et servir une clientèle qui veut gagner en temps et réduire les déplacements en se faisant livrer chez soi, grâce à une expérience utilisateur simplifiée et à de meilleures solutions. Pour les petits commerçants, habitués à des modes de gestion et d'approvisionnement traditionnels, la transition vers des canaux digitaux nécessite un accompagnement afin de pouvoir changer certaines habitudes et se préparer aux éventuels risques. De l'avis du professeur universitaire à l'Ecole nationale de commerce et de gestion (ENCG) de Settat et expert-consultant, Smail Ouiddad, la digitalisation du petit commerce nécessite tout d'abord d'accepter le changement dans la culture du travail, et d'accepter de passer du modèle de commerce traditionnel vers un modèle plutôt moderne. Le changement doit être incrémental, et on doit s'attendre à ce que son acceptation prenne un peu de temps, a ajouté M. Ouiddad dans une interview accordée à la MAP, notant que le petit commerçant de proximité est actuellement dans une zone de confort, et c'est une situation qu'il conserve précieusement. En effet, le type de relation qu'il entretient avec ses fournisseurs traditionnels fait qu'il soit habitué à des modes de facturation, de paiement et de règlement qui, au regard de ses marges qui restent minimes pour la majorité des cas, l'arrangent parfaitement et lui garantissent la continuité de son exploitation, a-t-il expliqué. Ainsi, l'instauration de nouveaux processus de gestion de la relation fournisseur, et de gestion de la relation client risquent de revisiter le business modèle d'un certain nombre de petits commerçants, selon l'expert. En outre, il a noté que certains nouveaux acteurs digitaux se contentent uniquement de la digitalisation de la distribution, ce qui constitue une limite en soi, mettant en exergue l'importance d'accompagner l'activité digitale avec une vraie économie de l'information basée sur l'exploitation de la Data, avec toutes les potentialités que cela pourrait offrir comme opportunités business. Lire aussi : Hausse de 22,8% de l'indice du commerce extérieur au T3-2022 Collaborer pour créer un écosystème en faveur de la digitalisation du petit commerce Les efforts ne sont pas épargnés pour créer un écosystème pour accélérer le processus de digitalisation du commerce. Dans ce sillage, la plateforme de digitalisation du secteur du commerce « Moroccan Retail Tech Builder » (MRTB) qui est le fruit d'un partenariat entre le ministère de l'Industrie et du Commerce, l'Université Mohammed VI polytechnique et la Fondation OCP, a été lancée en 2022. Le MRTB a pour objectif d'accompagner des porteurs de projets dans le développement de solutions digitales innovantes au profit du secteur du commerce, notamment le commerce de proximité qui a besoin d'outils digitaux simples et accessibles lui permettant à la fois de se moderniser et d'améliorer sa valeur ajoutée. Par ailleurs, une convention de partenariat a été signée récemment entre le ministère de l'Industrie et du Commerce et la société Avito pour l'accompagnement de la digitalisation des petits commerçants. A travers cette convention, Avito.ma va dispenser des formations adaptées aux commerçants et développera des solutions clés en main aux petits commerces, qui bénéficieront du trafic important enregistré sur cette plateforme (6,5 millions de visiteurs uniques par mois, 8,4 millions de contacts par mois et compte 1.700 boutiques actives). Ce partenariat, qui permettra de générer 5.000 opportunités d'emplois directs et indirects, prévoit l'ouverture et le référencement de boutiques digitales sur la plateforme Avito.ma, ainsi que l'accompagnement et le suivi de plus de 3.000 petits commerces qui seront représentés au niveau de la marketplace. En plus du ministère de l'Industrie et du Commerce et des plateformes de vente et d'achat en ligne, plusieurs acteurs contribuent au processus de transformation digitale du petit commerce. Il s'agit en fait de l'ensemble des acteurs du marché qui investissent dans l'amélioration ou le développement de la culture, la technologie et les structures du marché de la vente du détail en vue de créer une valeur ajoutée palpable, basée sur les potentialités du Digital, pour l'ensemble des parties prenantes, selon M. Ouiddad. Dans ce sens, « tous les acteurs impliqués devraient trouver des moyens de collaboration pour créer un vrai écosystème et concevoir un réel projet commun », a relevé le professeur universitaire. Les solutions numériques permettront sans doute au commerce de proximité de tirer parti du potentiel sous-exploité et de dynamiser l'économie marocaine, en donnant une visibilité en ligne aux commerçants et en incitant les clients encore plus à la consommation locale.