L'adhésion du Maroc au Centre Nord-Sud (CNS) du Conseil de l'Europe, officialisée en juillet 2009, constitue une "reconnaissance des avancées réalisées par le Royaume sur la voie des réformes", a souligné, mardi à Lisbonne, l'ancien Premier ministre, M. Abderrahmane El Youssoufi. Cette adhésion constitue également un "encouragement pour le Maroc pour aller de l'avant dans ses efforts déployés sur la voie d'une démocratisation accrue de nos institutions et d'un respect plus scrupuleux des droits de la personne humaine et des règles inhérentes à un Etat de droit", a ajouté M. El Youssoufi qui intervenait, en sa qualité d'ancien lauréat du Prix Nord-Sud (1999), lors d'une table-ronde sous le thème "Le XXIème siècle, siècle de l'interdépendance et de la solidarité mondiales", organisée, à Lisbonne, à l'occasion du 20ème anniversaire de la création du CNS. Intervenant dans le cadre de la première séance de cette table-ronde, consacrée au "Nouveau modèle de développement", M. El Youssoufi a estimé qu'à l'ère d'une mondialisation en crise, la mise en place d'un nouveau modèle de développement est rendue nécessaire, ajoutant que les défis que posent cette question revêtent un intérêt politique majeur et un enjeu géostratégique certain pour l'avenir des relations Nord-Sud et pour la destinée du développement humain durable dans le monde. Il a, à cet égard, indiqué que la détérioration de la situation économique, financière et sociale dans de nombreux pays du Nord et du Sud, particulièrement en Afrique, constitue une "véritable source d'inquiétude pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement, et nous invite à reposer en termes nouveaux la problématique même du développement". Face au développement de phénomènes concomitant inquiétants notamment une évolution différenciée et irrégulière des taux de croissance au Nord comme au Sud, une hausse des taux de chômage dans la plupart des pays développés du Nord et une baisse des investissements directs étrangers en particulier à destination des pays du Sud, la mise en place d'une "gouvernance concertée et maîtrisée" de l'économie mondiale s'avère nécessaire plus que jamais, a-t-il poursuivi. Après avoir souligné que la crise financière et économique mondiale a démontré que le marché libre ne saurait, à lui seul, conduire à la réalisation des grands équilibres macro-économiques, financiers et sociaux, M. El Youssoufi a souligné la nécessité de réhabiliter le rôle de l'Etat comme acteur économique de choix en tant que régulateur de l'activité économique mais aussi en tant que producteur. Il a, dans ce sens, appelé les pays aussi bien du Nord que du Sud à se doter d'un système de protection sociale et de filets de solidarités pour amortir les effets de la crise, ajoutant que cette donne confirme que la stabilité, la compétitivité et la réactivité de l'économie mondiale aux crises sont intimement liées à l'existence de mécanismes et d'instruments favorisant la cohésion sociale. Il a de même estimé que la bonne gouvernance mondiale des crises est indispensable pour la stabilité du système de l'économie mondiale et pour une prospérité partagée. Et M. El Youssoufi de souligner l'importance de la bonne gouvernance pour la moralisation des actes économiques, la promotion de l'éthique des affaires, la régulation positive des fluctuations des marchés financiers et la maîtrise anticipée des aléas, des incertitudes et des risques divers. "L'enseignement nodal de la crise économique et financière internationale actuelle demeure la prise de conscience des composantes du système mondial de la nécessite d'opérer une rupture radicale avec le modèle économique dominant aujourd'hui dans le monde", a-t-il dit. Selon M. El Youssoufi, cette rupture requiert une "préparation audacieuse et anticipée de l'ensemble des acteurs de changement dans nos sociétés", mais également la mise en place des conditions humaines, financières en vue de promouvoir des modes de production et d'échange à même de produire des biens de consommation en quantités suffisantes pour nourrir toute la population mondiale. La mise en Âœuvre des enseignements tirés des dernières décennies de politiques de développement suppose une volonté politique affirmée des composantes agissantes de la Communauté internationale, une refonte radicale de la gouvernance du système mondial, une mobilisation générale et citoyenne des sociétés civiles et une solidarité active entre le Nord et le Sud, a insisté M. El Youssoufi lors de cette table ronde à laquelle ont assisté notamment Mme M'Barka Bouaida, présidente de la Commission des Affaires étrangères à la Chambre des Représentants, et Mme Karima Benyaich, ambassadeur du Maroc à Lisbonne. Plusieurs responsables des pays membres du CNS, d'anciens lauréats du Prix Nord-Sud et d'éminentes personnalités disposant d'une expertise dans le domaine du dialogue interculturel Nord-Sud ont pris part à cette table-ronde. Il s'agit notamment du président islandais, Olafur Ragnar Grimsson, de la ministre suédoise de l'Intégration et de l'égalité des genres, Sabuni Nyamko, de l'ancien président portugais Mario Soares, du Haut Représentant des Nations unies pour l'Alliance des Civilisations et ancien président du Portugal, Jorge Sampaio ainsi que de la présidente du Conseil exécutif du CNS, Deborah Bergamini. Les débats, qui sont déroulés dans le cadre de deux séances, ont porté sur "Le nouveau modèle de développement " et "La gouvernance démocratique de la diversité culturelle".