La nouvelle scène musicale au Maroc a connu ces dernières années, la montée de plusieurs jeunes troupes qui se sont imposées avec force. Par Abilkassem Abdellatif Fnaïre compte aujourd'hui parmi les rares groupes de la nouvelle scène qui ont su imposer leur propre griffe. Leur rap, dit "traditionnel", distille intelligemment sonorités modernes et bon vieux patrimoine. Un mélange qui a valu au groupe l'amour de nombreux fans dont certains n'hésitent pas à enfiler des t-shirts à l'effigie des Fnaïre. Aujourd'hui Mohcine, Khalifa et Achraf enchaînent les succès et tiennent toujours à être fidèles à la mémoire de leur ancien collègue Hicham Belkas, tragiquement décédé en l'été 2008 dans un accident de voiture. Au début ce fut un doux rêve L'histoire de Fnair remonte à l'année 2000. L'idée de fonder un groupe était encore un doux rêve qui caressait l'imagination de trois jeunes marrakchis : Mohcine, Khalifa et Achraf. Le rêve ne tardera pas à devenir réalité, puisque deux ans après, naquit Fnaïre, avec l'ambition d'apporter une allure nouvelle à la musique des jeunes tout en restant attaché au patrimoine marocain. Le concept fera son chemin et les portes de la notoriété ont commencé à s'ouvrir, surtout après leur sacre par L'Boulevard en 2004. Pour mieux transmettre son message, explique Khalifa, le groupe devait d'abord se trouver une appellation originale, une tâche ardue qui a nécessité plus d'une année de réflexion avant que ne vienne l'inspiration. "Au hasard des jours, nous étions assis dans un bazar quand nos yeux sont tombés sur des Fnaire", se rappelle Khalifa expliquant que " c'était immédiatement le déclic ". "Ce choix n'a pas été fortuit en ce sens que les Fnaïre peuvent aussi bien contenir une bougie, symbole de ce qui est traditionnel, qu'une ampoule qui est le signe de la modernité". Et c'est toujours dans un esprit brassant tradition et modernité, que sortira le premier album du groupe "L'ftouh". Un intitulé savamment médité, explique Khalifa, puisqu'il renvoie à une notion bien de chez nous qui signifie "la première rétribution" avec laquelle un jeune travailleur démarre sa vie professionnelle. "C'est l'une des valeurs essentielles que nous voulions faire passer à travers cet album qu'on a produit par nos propres moyens", insiste-t-il. -
Le tandem tradition et modernité En mixant des rythmes rap avec des poèmes marocains d'antan, les Fnaïre provoquent chez le public une sensation de nostalgie. "Et c'est là tout le concept de +rap traditionnel+ qui surf sur la vague de modernité sans pour autant renier l'authenticité ", explique Khalifa. Mais bien que leur textes plaisent à beaucoup, il y'en a ceux qui reprochent à Fnaire d'utiliser le rap, un style qu'ils estiment "étranger à notre culture ". Des critiques que Khalifa se contente de balayer d'un revers de la main, arguant que le style rap est à son tour puisé dans un patrimoine cent pour cent africain, tels la musique des gnaouas. "Donc, rien n'empêche qu'on s'en serve", conclu-t-il. Mais en plus des paroles puisées dans le répertoire marocain, le groupe utilise aussi des sonorités locales dans ses compositions qui "sont bien appréciées par un public de tout âge, qu'il soit résident au Maroc ou à l'étranger". Mélodies patriotes A chaque fois qu'ils sont interrogés sur le message qu'ils veulent véhiculer à travers leur musique, les Fnaïre répondent, à l'unisson, que c'est la citoyenneté et la fierté de la culture marocaine, selon eux, "à la base de tout changement". Ainsi, dans leur tube "Azz L'khail Mrabetha", les trois rappeurs lancent un appel à tous les Marocains pour qu'ils soient fiers de leur culture et rompent avec le pessimisme dominant chez certains milieux. Des thèmes comme la lutte contre l'analphabétisme, la dénonciation du terrorisme et de l'intolérance ou encore la marocanité du Sahara sont très récurrents dans leurs chansons, et c'est ce qui la amené, par exemple, à chanter en duo avec la star du raï, Cheb Bilal, pour "clamer la fraternité entre Marocains et Algériens". Et comme tout groupe à succès, Fnaïre ont leur propre "chanson fétiche " qui est, incontestablement, " Yed El Henna ". Un tube largement plébiscité et qui, raconte Khalifa, a poussé Omar Said à qualifier le jeune groupe de "Nass El Ghiwane de la nouvelle époque". "Yed El Henna", figure parmi les titres de leur dernier album, qui a coûté 120.000 dh.