Le secteur des média a connu un véritable changement de paradigme provoqué par une profonde mutation marquée essentiellement par la révolution numérique et la convergence technologique, a souligné, jeudi à Rabat, Nathalie Sonnac, spécialiste de l'économie des médias et du numérique. Lors d'une conférence placée sous le thème "les nouveaux modèles économiques des médias" (Questions autour de l'économie numérique de la création), à l'Institut supérieur de l'information et de la communication (ISIC), la directrice de l'Institut français de presse (IFP) de Paris a affirmé que cette révolution numérique et cette convergence technologique ont impacté l'économie des médias et leurs modèles d'affaires. Ces deux paramètres ont, de ce fait, entraîné un bouleversement de l'offre et de la consommation des médias et provoqué non seulement une accentuation et une exacerbation de la concurrence mais également un changement profond au niveau des paysages médiatiques, a insisté Sonnac. S'en est suivi également une multiplication des modes de diffusion et plus particulièrement leur fédération sur des plates-formes qui sont désormais devenus multiples, a-t-elle poursuivi. En se penchant sur l'analyse du secteur de la presse, et plus particulièrement quotidienne, Sonnac a expliqué que ce domaine se trouve confronté à des difficultés d'ordre économique et financier qui sont générées essentiellement par une structure déséquilibrée des coûts. "Nous sommes dans des économies d'échelle, l'information coûte chère, et il faut savoir la collecter, la traiter, l'analyser", a-t-elle fait remarquer. Cette donne s'explique par de lourdes charges d'impression et de distribution, un nombre important de journaux qui ne sont pas vendus, un marché publicitaire exigu et une crise à l'échelle planétaire de la conjoncture économique et financière. Cette crise de la presse écrite repose sur "l'érosion du lectorat ", a-t-elle affirmé, en citant à ce propos un chercheur américain qui a écrit que "la presse en ligne a siphonné le papier". Sonnac ajoute que dans ce domaine, il devient difficile de distinguer l'" information" du "divertissement" qui, a-t-elle dit "se mélangent désormais, les frontières sont brouillées à ce niveau". De surcroît, il n'est pas aisé de distinguer "le professionnel de l'amateur", dans cette multiplication des supports d'information, a-t-elle renchéri. Abordant ensuite la télévision, cette spécialiste de l'économie des médias et du numérique a expliqué que ce secteur a été marqué notamment, à l'instar de la presse, par des avancées technologiques, en l'occurrence les chaînes thématiques, les services interactifs et la multidiffusion". "Nous sommes passés d'une économie de l'information à une économie de l'attention : tout le monde est en ligne", a-t-elle fait observer. Ces progrès technologiques ont non seulement agi sur l'offre des programmes mais ont entraîné une modification substantielle profonde au niveau des paysages audiovisuels et sur le plan de regarder le petit écran, a-t-elle expliqué. La spécialiste de l'économie des médias a insisté, à cet égard, sur la dimension de la "régulation" qui "doit jouer un rôle majeur" et la question des "droits de propriété intellectuelle" et son corollaire qu'est "le piratage" qui doivent être sérieusement pris en compte dans cette révolution numérique et convergence technologique.