Dimanche 14 juillet, à l'écriture de ces lignes, le score du match Algérie/Nigeria n'était pas encore connu. On joint donc notre voix à celle de beaucoup de marocains pour souhaiter plein succès à nos voisins algériens qui ont démontré d'indéniables qualités lors de cette CAN 2019. A tel point que les «Fennecs» sont devenus une sorte de succédané footballistique pour des Marocains précocement sevrés d'émotions sportives suite à l'élimination des «Lions de l'Atlas» en huitième de finale. En témoignent les effusions de joie à la frontière Nord - Est du pays où Marocains et Algériens se sont donné rendez-vous, jeudi 11 juillet, sur les rives de l'Oued Kiss pour célébrer la victoire de l'Algérie contre la Côte d'Ivoire. Ces témoignages de la sympathie réciproque que se vouent Marocains et Algériens en matière de football ne sont pas inédits. Ils constituent plutôt la règle. Lorsque l'équipe nationale marocaine brille, elle est soutenue par les Algériens et inversement lorsque ceux-ci excellent, ils gagnent le soutien des Marocains, du moins jusqu'à ce que les deux équipes se retrouvent confrontées l'une à l'autre. Sans être inédite donc, cette tendance n'en demeure pas moins le symbole de la singularité des liens qui unissent Marocains et Algériens, deux peuples si proches et si lointains à la fois et dont les deux pays sont opposés dans un sérieux litige politique. Il est en effet rare que marocains ou algériens témoignent la même franche sympathie envers les équipes de la Tunisie ou de l'Egypte. L'observateur non averti considérera avec une certaine légèreté, teintée de dédain, ces histoires de ballon rond. Mais ce serait une grave méprise que de sous-estimer les impacts de la géopolitique du sport sur les relations entre pays. On rappellera à cet égard que les Marocains n'oublieront jamais le soutien des Algériens à la candidature du Maroc pour l'organisation de la Coupe du Monde 2026, de même qu'ils n'oublieront pas l'hostilité saoudienne envers cette même candidature. Mais cette influence du football est à géométrie variable. Si entre le Maroc et l'Algérie, elle fait ressortir les liens fraternels entre peuples sans pour autant avoir d'impact sur les relations politiques entre les deux pays, elle revêt un tout autre caractère lorsqu'il s'agit d'équipes comme les «Bafana Bafana» dont le pays fait figure, au même titre que l'Algérie, d'ennemi politique dans l'affaire du Sahara marocain. Malgré les chaudes accolades entre joueurs marocains et sud-africains à l'issue de leur rencontre en phase de poules soldée par une victoire marocaine, le différend politique opposant le Maroc à l'Afrique du Sud se nourrit également de l'adversité footballistique entre ces deux pays. En atteste l'appel adressé par le Président sud-africain Cyril Ramaphosa à l'entraîneur des «Bafana Bafana» la veille de son match face au Maroc, le sommant de gagner coûte que coûte cette confrontation remportée finalement par les «Lions de l'Atlas», sous le regard ravi du ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, qui a tenu à être présent ce jour-là au stade Essalam du Caire. En attendant de revenir à de meilleurs sentiments footballistiques et surtout politiques avec nos ennemis sud-africains, l'espoir se profile du côté du business. Fidèle à sa nouvelle politique conquérante à l'échelle continentale et à l'instar de sa démarche envers des pays politiquement hostiles comme le Nigeria, le Maroc a décidé d'aller de l'avant, sans préjudice du conflit politique qui oppose les deux pays, afin d'instaurer des relations économiques pérennes avec l'Afrique du Sud. La nomination d'un ténor de la diplomatie marocaine en la personne de Youssef Amrani en tant qu'ambassadeur du Royaume à Pretoria est la parfaire illustration du sérieux et du bien-fondé de cette démarche. Cette nomination est porteuse de grands espoirs, car, comme l'écrivait Montesquieu en 1748 dans son célèbre traité «De l'esprit des lois» : «L'effet naturel du commerce est de porter la paix». Majd EL ATOUABI