La question peut paraître déplacée, mais elle a son importance aussi bien pour la qualification du crime commis, que pour l'analyse de ses circonstances et de ses motivations. Les deux touristes scandinaves assassinées dans la nuit du 16 au 17 décembre 2018 aux alentours de la localité montagneuse d'Imlil ont-elles été abusées sexuellement avant d'êtres assassinées et décapitées, comme cela a été maintes fois rapporté dans la presse nationale et internationale ? Cette question nous l'avons posée à Me Khalid El Kerdoudi, Procureur du Roi en charge de ce dossier. Sa réponse a été catégorique : «Non, les deux victimes n'ont pas été violées. Le crime de viol est absent du dossier d'accusation et ne figure pas parmi les chefs d'accusation retenus contre les 24 accusés et qui sont comme suit : planification d'actes terroristes à l'intérieur du Royaume ciblant les touristes, les éléments de la Gendarmerie et de la Sûreté et certains sites touristiques, non-dénonciation de crime, apologie du terrorisme et meurtre de deux touristes scandinaves». Selon notre interlocuteur, les conclusions de l'enquête préliminaire menée par la police judiciaire sous la supervision du parquet ou celles du juge d'instruction, ne permettent aucunement d'établir l'exsitence d'un quelconque acte de viol. «Il y a certes eu violences avant, pendant et après le meurtre des deux touristes, mais ni les aveux des accusés, ni les conclusions de l'autopsie n'ont pu établir que les victimes aient été violées». Pourtant et jusqu'à aujourd'hui, plusieurs articles de presse et commentaires sur les réseaux sociaux, continuent à parler d'un hypothétique viol qui aurait été commis à l'encontre des victimes, avant leur exécution. «Durant les premiers jours de l'affaire, le viol était systématiquement cité, puis la tendance s'est atténuée, sans cependant disparaître. La méprise vient du fait que l'une des victimes filmée apparaissait dans la vidéo de son exécution en petite culotte. Ce qui avait été interprété comme le signe d'un viol. Or, l'autopsie menée sur les victimes que ce soit au Maroc ou dans leurs pays d'origine n'a pas permis d'établir l'existence d'un tel crime», nous révèle Maître Khalid El Fataoui, avocat de la famille de la victime danoise Louisa Vesterager, qui conclut : «Dans leurs aveux auprès de la police, les meurtriers n'ont jamais parlé de viol, crime qu'ils considèrent comme en contradiction avec leur idéologie extrémiste, notamment du fait de la nationalité et de la supposée appartenance religieuse des deux victimes. Fait révélateur de cette idéologie, les accusés n'ont également pas commis de vol, puisque toutes les affaires des victimes, y compris leur argent, étaient restées intactes sur place après le double assassinat». Abdallah LAHFARI