Dans la crise des étudiants en médecine, le gouvernement est allé jusqu'au bout de sa myopie et de son entêtement. Ce n'est pas pour étonner tant que c'est la marque de fabrique de cet Exécutif qui a la manie de laisser les conflits s'enliser, se souciant peu de leurs conséquences néfastes sur les affaires, sur la stabilité sociale et sur le développement en général. Quitte à finir par lâcher du lest sur presque tout sans jamais capitaliser sur rien. On l'a vu lors du conflit des enseignants contractuels qui a duré trois mois avant que le gouvernement ne cède et on a vu comment le dialogue social a été gelé pendant sept années avant que l'Exécutif ne revienne à la table, contraint et forcé. Entre-temps, c'est à chaque fois du temps précieux de perdu, beaucoup de gâchis, un capital confiance citoyen de plus en plus laminé et une nouvelle introduction au risque de l'explosion sociale. Au fait, au-delà de l'absence d'innovation, de l'incapacité manifeste à trouver des solutions et du déficit de cohérence et de solidarité gouvernementale, l'équipe en place, exactement comme celle qui l'a précédée, souffre d'un mal chronique profond qui a pour nom « la complotite », une pathologie que les psychologues définissent comme une affection mentale attribuant l'ensemble des phénomènes à une théorie du complot. Dès qu'une action de revendication ou qu'un mouvement de protestation se fait valoir, des composantes principales du gouvernement crient à la manipulation et au complot. Du coup, l'Exécutif se fige dans une posture de fermeté tout aussi absurde que contre-productive et oublie son rôle de gestionnaire des conflits pour lequel il est juridiquement, administrativement et financièrement outillé. Il se donne alors délibérément et débilement un rôle d'adversaire constamment à fleur de peau, d'où d'ailleurs son autisme notoire et vérifié. Cette phobie a de nouveau frappé avec la crise des étudiants en médecine lorsque les deux ministres en charge du dossier ont laissé entendre que le mouvement de grève résulterait d'une manipulation. Trois professeurs boucs-émissaires ont même été suspendus dans ce qui s'apparente à une fuite en avant et à une tentative désespérée de se soustraire à sa responsabilité. Or, en démocratie, lorsqu'il y a dysfonctionnement ou défaillance, il est généralement admis que les lésés expriment librement leurs doléances et, plus encore, participent au processus décisionnel qui sert les intérêts des uns et des autres. C'est un principe social fondamental étant entendu que le dialogue et le partenariat sont indispensables à la démocratie et au développement. Mais notre gouvernement, culturellement et idéologiquement attaché à son diktat, ne voit jamais dans la contestation qu'une tentative visant sa déstabilisation. Pourtant, les étudiants n'ont fait que revendiquer des conditions convenables pour les études et la pratique hospitalière, le décongestionnement des classes et l'équité et l'égalité des chances entre les étudiants du public et ceux du privé. Rien donc qui puisse justifier une ossification de la position du gouvernement qui a préféré camper sur son entêtement et maintenir la date des examens sachant pertinemment que ces derniers allaient être boycottés pour raison de grève. Peu importent alors les retombées, dans l'immédiat et à court et moyen termes, sur le dispositif de santé du pays, déjà en grande souffrance. Que peut-on donc encore espérer de ce gouvernement qui joue le pourrissement des situations et excelle dans l'invective et les rancœurs, ne faisant que collectionner les ratages, cumuler les échecs et hypothéquer l'avenir ? Jamal HAJJAM