La dynamique électorale restait lundi en faveur d'Hillary Clinton au lendemain du deuxième débat contre Donald Trump, un affrontement unique dans l'histoire présidentielle américaine par la virulence et la teneur personnelle des attaques. Le candidat républicain à la Maison Blanche avait besoin de briller pour rebondir après un week-end désastreux causé par la divulgation de propos dégradants sur les femmes tenus en 2005, et stopper les défections au sein de son camp. Mais le miracle ne s'est pas produit. Durant une heure et demie d'échanges tendus, il a certes fait preuve de plus de discipline qu'au premier débat, il y a deux semaines, attaquant sans relâche Hillary Clinton comme une représentante du statu quo contrôlée par les groupes d'intérêts. Il s›est excusé une nouvelle fois pour la vidéo retrouvée et diffusée la semaine dernière, dans laquelle il est surpris racontant, avec vulgarité, la façon brutale dont il approche et touche les femmes qu›il désire, parfois sans leur consentement. Mais il a assorti ces excuses d›une contre-attaque extraordinaire, s›aventurant sur un terrain jusqu›ici considéré indigne d›un débat présidentiel: les allégations de frasques sexuelles contre le mari de son adversaire. «Si vous regardez Bill Clinton, c›est bien pire», a-t-il accusé. Dans le public, il avait invité trois femmes qui accusent depuis des décennies l›ancien président démocrate d›agressions sexuelles. Donald Trump a aussi traité Hillary Clinton de «diable», il a affirmé que son coeur était plein de haine, et promis de nommer un procureur spécial pour enquêter sur elle, la menaçant de prison. Hillary Clinton n›a pas dévié de sa ligne directrice, consistant à faire de l›élection un référendum sur la personnalité de Donald Trump, présenté comme instable et sectaire. Dans un long réquisitoire solennel, elle est revenue sur la façon dont Donald Trump parle des femmes mais aussi des immigrés et des musulmans - une tentative d›élargir le scandale au-delà de la seule misogynie, dans le but de récupérer les voix des derniers déçus du trumpisme, pour qui la vidéo représenterait la dernière goutte d›eau. Comme c›est de bonne guerre, chaque camp revendiquait la victoire dans les minutes et les heures suivant le débat. Un sondage CNN donnait pourtant l›avantage à la démocrate. Voyageant avec la candidate dans son avion pour un retour nocturne et euphorique à New York, Robby Mook, son directeur de campagne, estimait que Donald Trump n›avait pas réussi à «inverser la tendance» et obtenir le coup d›éclat dont sa candidature chancelante avait besoin. L›entourage de la démocrate estimait aussi que le républicain avait commis une faute politique en menaçant Hillary Clinton de prison, tel un «dictateur de république bananière», et sous-entendait qu›il avait eu un comportement menaçant en se tenant debout derrière elle sur le plateau du débat. «J›ai essayé, moi, de lui laisser de l›espace quand il répondait aux gens», a dit elle-même Hillary Clinton dans son avion. «Mais lui était très ... présent». Dans les couloirs du débat, qui avait lieu sur le campus de l›université Washington de Saint-Louis, les porte-parole de Donal Trump étaient assaillis de questions sur des rumeurs de séparation du ticket formé par Donald Trump et son candidat à la vice-présidence, Mike Pence, un chrétien conservateur qui s›était dit «outré» par les paroles exhumées de l›homme d›affaires. Durant le débat, Donald Trump l›a publiquement désavoué sur la Syrie; Mike Pence avait appelé à ce que les Etats-Unis attaquent directement les forces syriennes afin de venir en aide aux civils d›Alep. Mais Kellyanne Conway, directrice de campagne, a assuré que Mike Pence restait «à 100%» derrière Donald Trump et qu›il ferait activement campagne dès lundi. L›intéressé s›est aussi dit fier de la prestation de son coéquipier. Reste à savoir quel calcul politique feront cette semaine les républicains qui n›ont pas encore fait défection. Leur objectif est de conserver la majorité au Congrès lors des élections législatives qui auront lieu en même temps que la présidentielle, le 8 novembre. S›ils estiment que Donald Trump risque de les entraîner dans la défaite, la tempête politique dans laquelle le candidat est emporté depuis deux semaines pourrait se transformer en ouragan.