Quand le patron du Bureau Central d'Investigations Judiciaires (BCIJ), M. Abdelhak Khiame, invite les journalistes pour une conférence de presse, c'est généralement pour informer l'opinion publique de détails relatifs à une cellule terroriste démantelée ou un attentat avorté. La conférence de presse tenue, mardi, au siège du « FBI marocain », différait des précédentes par le contenu du message transmis. On y apprend, il est vrai, que la cellule terroriste 100% féminine démantelée lundi s'apprêtait à frapper demain, 7 octobre, c'est-à-dire le jour même du scrutin législatif, en envoyant une de ses membres exécuter une opération kamikaze avec une ceinture d'explosifs. Mais le véritable trait saillant dans cette récente affaire, c'est la composition de cette cellule terroriste et tout ce que cela entend en termes de failles dans la société que Daech essaye d'exploiter au profit de son agenda criminel. 10 femmes, dont 7 mineures, 2 âgées de 15 ans, 2 autres de 16 ans et 3 de 17 ans, constituent l'ossature de cette cellule terroriste, la première du genre au Maroc, qui s'activait dans plusieurs villes réparties à travers le Royaume, à savoir Tanger, Kénitra, Sidi Slimane, Tan Tan, Salé, Zagora, Oulad Teima et Sidi Taibi. Toutes ces femmes et jeunes filles ont prêté allégeance au calife d'opérette de Daech et aucune n'a exprimé de regrets pour les faits qui leur sont reprochés. A travers leurs contacts avec des éléments de l'unité « Opérations extérieures » de Daech, les cibles qui leur ont été fixées sont « des installations sensibles et particulièrement des sites touristiques », a précisé M. Khiame. Ce qui est intéressant à noter, ce sont les liens de parenté entre certaines jeunes filles appartenant à cette cellule et des jihadistes opérant au Proche Orient, l'endoctrinement ayant commencé pour celles-ci au sein même de leurs familles, acquises à l'idéologie islamiste radicale. "Les terroristes ciblent désormais des mineurs qui plus est de sexe féminin. Ceci est inquiétant pour nous tous. C'est une sonnette d'alarme, a tenu à souligner M. Khiame, qui ne cachait pas sa profonde appréhension à ce sujet. S'il est vrai que les services de sécurité marocains ont su, jusqu'à présent, parer à toutes les tentatives de porter atteinte à la stabilité du Royaume et à la quiétude de ses citoyens, en adaptant leur stratégie aux évolutions tactiques de Daech, ce qui est tout à leur honneur, ils ne peuvent, pour autant, immuniser la société marocaine contre l'expansion des idéologies religieuses extrémistes, ce qui ne relève d'ailleurs pas de leurs prérogatives. « Les groupes terroristes tentent d'exploiter nos points faibles, en l'occurrence le relâchement du rôle de la famille, de l'école, de la société civile », a affirmé le directeur du BCIJ, une manière de signifier que la défense contre le terrorisme jihadiste doit aussi se faire en amont, les services de sécurité n'agissant qu'une fois que des individus franchissent la ligne rouge vers le takfirisme jihadiste et commencent à se préparer à passer à l'acte, pour les empêcher de nuire. L'étendue du lavage de cerveau auquel ont été soumises ces jeunes marocaines ? L'une des prévenues appréhendées, une jeune fille de 15 ans, affirme qu'elle a « contracté » un mariage virtuel avec un opérationnel de Daech, sans le consentement de ses parents, pour la simple raison que cette pauvre fille n'a littéralement aucune notion des conditions dictées par la Chariâ pour que le mariage soit valide. Pire, aucun parent ou membre de leur entourage familial, aucun enseignant, personne ne s'est rendu compte que ces jeunes filles étaient en train de glisser vers le côté obscur jusqu'à ce qu'elles se fassent arrêtées. Jusqu'à quand les Marocains vont-ils continuer à fermer les yeux pour éviter de désigner clairement tous ces courants religieux extrémistes bien implantés dans la société, qui font le lit des organisations terroristes jihadistes en diffusant une conception de la religion dont l'aboutissement logique est le passage à l'acte terroriste ?