C'est le titre d'un film franco-italien des années 60 conçu autour de Fernandel, coréalisé entre Giorgio Bianchi et probablement Sergio Leone bien avant la vogue des "Dollars". Et ce titre s'avère trompeur car il n'évoque nullement le thème de la musique, plutôt un film sur la seconde guerre sur un ton de comédie. Il nous sert ici d'introduction à un thème récurrent, un élément qui compose le film, un art à part entière peut-être le plus ancien. Dès la projection des frères Lumière en ce décembre 1895, la musique est déjà là. Un pianiste joue quelques morceaux en vue de distraire les rares spectateurs, les premiers fans de cette curiosité technique capable de reproduire la vie. L'accompagnement musical avait un autre but cette fois loin de l'art: camoufler le bruit insupportable du projecteur placé juste derrière les 33 spectateurs qui composaient le premier public de cinéma, et parmi eux Georges Méliès dont la vie va coïncider avec celle du cinéma. On ne manquera pas par la suite de faire appel aux musiciens, pianistes, violonistes ou accordéonistes, à l'occasion des innombrables projections qui vont révolutionner l'art du spectacle. De ce fait, la musique s'érigeait en élément extérieur au film, composait différemment selon les compositeurs, les lieux de représentation. Des partitions complètes ont été écrites durant la période muette. Ensuite, elle va constituer l'apport le plus important du cinéma parlant. Mais, il s'agissait là de musique écrite pour accompagner des films et non pas de musique de films au sens exact du terme. On peut d'autre part penser que les réalisateurs les plus exigeants et les plus hautement conscients des possibilités de leur art finissaient par en composer eux-mêmes la musique. Car au cinéma, la musique a une fonction physiologique considérable, déjà reconnue au temps du muet: celle de donner au spectateur la sensation d'une durée effectivement vécue et de le délivrer du terrible poids du silence. Elle a aussi une fonction esthétique et psychologique de très haut degré, créant un état onirique, un climat et des chocs affectifs exaltant l'émotivité. Cependant, la musique ne doit pas paraphraser l'expression visuelle. Elle n'a pas à commenter l'action, à jouer un rôle explicatif, à accompagner, à soutenir ou à amplifier les effets visuels. Tout comme le dialogue de cinéma, elle n'a aucune valeur en soi. Elle est un élément constitutif, un simple élément de signification du spectacle audiovisuel qui doit évoquer, suggérer subtilement et discrètement, susciter des opérations de conscience.