Entretien avec M. Laszlo Trocsanyi, ministre hongrois de la Justice : « L'autonomie proposée par le Maroc est une très bonne formule pour mettre fin au conflit du Sahara » / « Nous avons besoin de normes juridiques contraignantes en matière d'environnement » M. Laszlo Trocsanyi, ministre hongrois de la Justice, vient d'effectuer au Maroc une visite de travail au cours de laquelle a été signé un accord judiciaire entre le Maroc et la Hongrie élargissant le domaine de coopération judiciaire entre les deux pays. L'Opinion a profité de l'occasion pour réaliser avec M. Laszlo Trocsanyi un entretien au cour duquel ont été abordées des questions de l'heure ayant trait à la modernisation de la Justice, à l'immigration, à la COP22. L'Opinion : Monsieur le ministre, le Maroc et la Hongrie ont récemment signé à Rabat un accord judiciaire. Que pouvez-vous nous dire sur son contenu ? M. Laszlo Trocsanyi : L'accord a été en effet signé entre les ministères de la justice de la Hongrie et du Maroc. Cet accord prévoit plusieurs types de coopération entre les deux pays. Dans chaque Etat, la question se pose sur la manière dont il faut procéder à la modernisation de la justice. Les citoyens attendent une justice efficace, qui soit au service des justiciables. C'est la raison pour laquelle nous avons voulu savoir si nous pouvons trouver une méthode de travail, entre les deux ministères, pour faire des échanges. La modernisation de la justice est une réforme qui touche plusieurs domaines, notamment l'informatisation de l'appareil judiciaire. Nous vivons au XXème siècle où presque tout le monde utilise le téléphone portable, il y a des satellites, des moyens modernes, pourtant la justice travaille, parfois encore, à la manière du XIXème siècle, avec des méthodes classiques. La question qui se pose, c'est que les citoyens attendent peut-être une justice plus moderne. Mais comment ? Comment offrir aux justiciables une justice plus moderne ? Que le justiciable puisse demander l'état des lieux d'un procès par Internet, que les avocats puissent envoyer leurs mémoires, leurs plaidoiries par voie électronique, au lieu de la forme écrite traditionnelle. En Hongrie, c'est une question prioritaire et nous travaillons sur la « e-justice ». Il est très important que la justice puisse répondre, pas immédiatement, mais dans des délais raisonnables, quand même, aux attentes des justiciables. Peut-être que cette informatisation de la justice peut faciliter à réduire la longueur des procédures et le temps que prennent les tribunaux pour se prononcer. Au Maroc, aussi, j'ai pu voir et constater qu'il y a un certain effort pour moderniser la justice, en termes de « e-justice ». C'est la raison pour laquelle j'ai proposé un échange entre nos experts, savoir quelles sont les expériences, quels sont les défis que nous aurons tous à relever à ce sujet. Parce qu'il faut apprendre des différentes expériences. On peut commettre des fautes. Echanger d'expériences permet, justement, d'éviter de commettre à nouveau les mêmes fautes commises par d'autres. Parce que c'est très important de développer des contacts, mais pas seulement entre les politiciens, mais entre les juristes aussi. Le Droit joue un rôle prioritaire au XXIème siècle, en Europe en particulier, où il y a différentes normes juridiques. Il y a une hiérarchie des normes. Il y a le Droit européen, après le Droit de la convention européenne des droits de l'homme. Il y a également des tribunaux au niveau communautaire, notamment la Cour du Luxembourg, la Cour de Strasbourg, ainsi que les tribunaux nationaux, et je crois que le dialogue entre les juges est devenu une priorité, aujourd'hui. Parce qu'un juge, qui prend une décision, est intéressé par les jugements émis par d'autres tribunaux. Aujourd'hui, l'influence des différentes juridictions, les unes sur les autres, est énorme. Quand un juge hongrois prend une décision, il se demande comment est-ce qu'un juge allemand, français, marocain, prendrait sa décision dans une affaire similaire. Il y a une uniformisation du Droit, harmonisation et uniformisation. Et quand on parle d'harmonisation du Droit, il est indispensable de connaître les autres jurisprudences aussi. C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, le Droit comparé joue un rôle prioritaire. Parmi mes activités durant cette visite au Maroc, j'ai donné une conférence à l'Institut de la magistrature et j'ai pu constater, avec plaisir, combien les étudiants sont motivés ici chez vous au Maroc. J'ai reçu plein de questions concernant la hiérarchie des normes. Comment fonctionne le Droit européen, quel est le rôle des juges nationaux dans l'application du Droit européen. J'ai pu aussi constater que les juges marocains étaient aussi très intéressés par la collaboration judiciaire. Par ailleurs, nous avons également soulevé la question du Droit pénal et des prisons. Partout dans le monde, les prisons sont pleines. De quelle manière les juges et les fonctionnaires du ministère de la justice doivent-ils réfléchir pour résoudre le problème ? Quelles sont les expériences des autres pays à ce sujet ? Est-ce qu'il y a des moyens plus modernes que les peines privatives de liberté ? Est-ce que nous pouvons offrir autre chose que la prison à des gens qui ont commis des infractions ? La Hongrie a aussi introduit certaines mesures pour faciliter la situation, pour trouver des solutions et c'est dans ce sens que je crois que cet échange d'informations est indispensable. Je pense que ce qu'il y a de plus important, c'est le contact personnel. S'il n'y a pas de contacts personnels, il n'y a pas de coopération. C'est l'une des raisons pour lesquelles je suis venu au Maroc ; pour établir le contact avec le monde juridique. Quand il y a des contacts personnels, ça facilite les choses. Le prochain contact sera à Budapest. Je vais inviter des juristes marocains pour discuter avec eux. Je suis très heureux que la Hongrie soit entourée de la Pologne, la Tchécoslovaquie, l'Autriche, etc, mais le monde ne s'arrête pas aux frontières européennes. La Méditerranée est une région voisine, qui est très importante pour nous. La Hongrie est membre de l'Union européenne, donc, c'est notre responsabilité que d'établir un pont avec la Méditerranée. Je pense que le monde des juristes, juges, professeurs universitaires, peut être utile, pour établir ce pont, les hommes politiques changent souvent, alors que les juristes restent toujours sur place, ils sont stables. Si nous pouvons établir des relations entre les juristes des deux rives de la Méditerranée, ça va faciliter, parce que les juristes restent sur place toute la vie. L'Opinion : Qu'en est-il au sujet de la migration, sujet qui semble susciter grand intérêt en Hongrie ? M. Laszlo Trocsanyi : Nous avons beaucoup discuté de cette question avec le ministre de la migration aussi. Il nous a raconté comment le Souverain a renforcé l'image des Droits de l'homme avec la régularisation des migrants clandestins installés au Maroc. J'ai expliqué, pour ma part, comment on vit le phénomène en Europe, quels sont les débats entre différents Etats. La Hongrie est un pays de passage. Quelque 300.000 personnes ont traversé le territoire hongrois depuis le début de la vague migratoire en provenance du Moyen Orient. Il y a un débat public dans la société aussi. Chez nous, la question a été : ces gens qui ont traversé le territoire hongrois, comment est-ce qu'ils sont entrés en Hongrie ? Tous les réfugiés, tous les migrants ont traversé sur les frontières « vertes ». Ils ne voulaient pas passer par les frontières officielles, ils voulaient entrer en Hongrie comme ils l'entendaient. Alors ils sont entrés sur notre territoire, en marchant sur des domaines privés, ne respectant pas le territoire de quelqu'un, alors le gouvernement a le devoir de faire respecter l'ordre public, c'est la raison pour laquelle la Hongrie a décidé de faire respecter ses frontières. Ce n'est pas une chose que nous aimons, mais il fallait agir aussi. Nous avons dit qu'il y a des zones de transit, qu'il est possible de frapper à la porte pour entrer, en passant par les zones de transit, et après, il y a des centres d'accueil ouverts, ils peuvent aller là-bas, pour régulariser leur passage par le territoire hongrois, il s'agit quand même de 300.000 personnes. Nous avons enregistré à peu près 200.000 personnes. Enregistrement veut dire qu'il y a une interview, demander qui est qui, quelle nationalité, arrivé comment, est-ce que sa vie était vraiment en danger, est-ce qu'il est réfugié ou migrant économique, qui veut vivre mieux que dans son pays natal, c'est un grand travail pour les fonctionnaires, il faut organiser les interviews, il faut des interprètes. Après, nous avons constaté que tous ces migrants voulaient quitter notre pays, qu'ils voulaient aller en Allemagne. Le problème est de savoir si l'Allemagne est capable de recevoir un million, deux millions, trois millions de personnes ou pas. Il y a peu de migrants qui veulent rester en Hongrie, en Bulgarie, en Roumanie, même si ce sont des pays membres de l'Union européenne et sûrs. La plupart des réfugiés veulent aller en Allemagne ou en Suède. A mon avis, il faut séparer les choses. Une chose est le problème des migrants qui sont déjà arrivés, qui sont déjà sur le territoire européen. Il y a cette idée des quotas, et la Hongrie n'aime pas cette notion de quotas obligatoires, parce qu'il y a plein de questions qui se posent. Qui est-ce qui décide qui va où ? Est-ce les autorités bruxelloises qui décident que tant de personnes vont en Hongrie, tant d'autres en Bulgarie, etc ? Est-ce qu'il est possible de lancer un recours contre cette décision ? Est-ce que c'est conforme à l'esprit des Droits de l'homme ? Est-ce que c'est conforme à la souveraineté des Etats ? Il y a plein de questions qui se posent. Alors, nous avons constaté que l'Europe a cherché à résoudre le problème de façon rapide, en passant directement à l'action, sans se donner le temps de réfléchir et de parler des motifs et des racines des migrations. Il y a des conventions internationales qui disent que quand la vie d'une personne est en danger, du fait d'une guerre, d'une persécution personnelle, il faut accorder le refuge à cette personne. Mais il y a aussi beaucoup de personnes qui se disent que la vie est beaucoup plus intéressante en Europe que dans leur pays, en pareil cas, ce sont des migrants économiques, pas des réfugiés. Il faut bien séparer les réfugiés des gens qui veulent venir en Europe où ils espèrent un meilleur niveau de vie que chez eux. Autant je comprends le problème, autant l'Europe ne peut pas résoudre toutes les misères du monde, mais il faut réfléchir sur comment nous pouvons aider. Parce que c'est vrai qu'il y a un changement climatique qui pousse les gens qui en font les frais à se déplacer, il y a beaucoup de choses qui exigent de nous qu'on réfléchisse comment pouvons-nous aider ces pays qui sont en difficultés. Je pense qu'il y a un manque, en Europe, pour ces pays qui sont en difficulté. Nous souhaitons résoudre les problèmes des victimes qui ont fuit la guerre, pour ceux qui arrivent en Europe, mais nous ne parlons pas comment aider ces pays, Irak, Afghanistan, Syrie, etc, à résoudre leurs problèmes. La stabilisation de ces pays est nécessaire. Je pense que les Syriens veulent rester en Syrie, mais il faut aider à rétablir la paix, il faut donner un élan pour reconstruire le pays, c'est indispensable, sinon, c'est toujours un million de personnes, deux millions de personnes. La répartition entre les pays par quotas, à mon avis, ce n'est pas une solution et ça pose, en plus, plein de problèmes juridiques. C'est la raison pour laquelle la Hongrie a pris la décision avec d'autres pays comme la Pologne et la Slovaquie et nous sommes en contact avec la République Tchèque et d'autres pays d'Europe centrale. Nous disons que le système des quotas n'est pas un bon système. Nous avons des responsabilités, ça c'est certain, mais nous ne pouvons pas, chaque année, procéder à la répartition d'un ou deux millions de personnes. Dans dix ans, il y aura combien de millions de personnes à répartir ? ça ne marche pas, il faut penser comment aider à rétablir la stabilité des pays en proie à la guerre et les aider, c'est notre priorité. L'Opinion : Et concernant vos discussions avec les responsables politiques marocains relatifs aux changements climatiques ? M. Laszlo Trocsanyi : Nous disons toujours que les changements climatiques sont une chose très sérieuse. Nous avons un président de la République qui est très sensible aux questions de l'environnement et des ressources naturelles. Nous estimons qu'au XXIème siècle, le plus important sujet est l'eau. Il y a aura des territoires qui seront confrontés à un grave déficit hydrique, dans les décennies qui viennent. Il y a, bien sûr, des réserves hydriques souterraines, mais qui sont déjà exploitées. Si ces réserves sont plus sollicitées qu'elles n'ont le temps de se recharger, un jour, elles n'existeront plus. Alors comment peut-on mener une politique de l'eau de manière responsable ? Les gens ont toujours tendance à croire que l'eau, qui a toujours existé, existera également toujours, ce qui n'est pas vrai. C'est comme le pétrole, un jour ça n'existeras plus. Qu'est-ce qui va se passer quand les populations de territoires entiers vont se retrouver à court d'eau ? Elles vont chercher à se déplacer vers les autres territoires où il y en a encore. C'est la raison pour laquelle nous organisons, après deux semaines de la tenue de votre COP22, un congrès mondial de l'eau, le Budapest Water Summit 2016. Ce sera la deuxième fois que nous organisons un congrès mondial de l'eau, parce que nous pensons qu'il faut mobiliser et responsabiliser les dirigeants politiques aussi, au sujet du déficit hydrique croissant, notamment dans cette région du globe. L'Opinion : Vous avez évoqué avoir discuté avec les responsables marocains des aspects juridiques de la COP22. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ? M. Laszlo Trocsanyi : Il y a des conventions internationales qu'il faut respecter. Quand nous parlons d'émissions de CO2, il y a toujours différents plans, différentes idées. Il faut voir si nous pouvons adopter des normes qui soient contraignantes. Parce qu'il y a toujours des politiques derrière, alors qu'il y a des dates ultimes. Nous devons voir comment résoudre ce problème, que l'Europe ne peut pas résoudre toute seule. Il faut que des pays comme les Etats-Unis, le Brésil, la Chine, acceptent aussi les résolutions contraignantes, c'est indispensable. En Hongrie, on croit que c'est un sujet sur lequel nous devons tous travailler ensemble, il faut des règlements contraignants aussi, sans quoi, nous allons toujours dépendre de la bonne volonté des Etats. Et cette volonté des Etats est influencée par les intérêts industriels, la question de l'emploi et autres considérations qui empêchent. Je pense qu'il faut responsabiliser les Etats. Nous avons donc besoin de normes juridiques contraignantes dans ce domaine. C'est indispensable. C'est notre responsabilité à tous envers les générations à venir. Ce ne sont pas seulement des discours des politiciens dont nous avons besoin, il faut que les juristes travaillent aussi pour établir ces normes juridiques dont nous parlions. L'Opinion : Quels sont les autres sujets évoqués avec les responsables marocains que vous avez rencontré au cours de cette visite ? M. Laszlo Trocsanyi : Avec le ministre marocain chargé des questions de la migration, qui est le grand sujet de l'heure, nous avons échangé informations et expériences. J'ai présenté la position de la Hongrie à ce sujet, en disant que nous devons respecter le Droit humanitaire, mais que nous devons aussi admettre que nous ne pouvons pas prendre en charge toutes les misères du monde. D'autre part, nous avons constaté qu'entre le Maroc et la Hongrie, il y a beaucoup de similitudes. Il y a 5 millions de Marocains qui habitent à l'étranger, autant que les Hongrois. Comment maintenir le contact avec nos compatriotes qui habitent dans différents pays ? Quelles responsabilités de la mère-patrie envers ces citoyens qui habitent à l'étranger ? La Hongrie a adopté une loi qui accorde le droit de vote aux Hongrois résidant à l'étranger. La représentation des Hongrois expatriés au Parlement hongrois est une chose importante. Nous avons déjà organisé une élection ou nous avons donné la possibilité de vote par correspondance aux Hongrois habitant en Roumanie, en Serbie, aux Etats-Unis, en Australie, etc. J'ai mentionné aussi qu'il y a une certaine angoisse chez certains hommes politiques hongrois envers les Hongrois qui habitent à l'étranger, qui peuvent influencer les résultats des élections. Dans la réalité, il y a seulement une partie de la communauté hongroise expatriée qui participe effectivement aux élections nationales. Ils ne peuvent donc influer sur les résultats. Mais, c'est quand même un geste politique hautement symbolique, qui permet de créer des ponts avec les Hongrois de l'étranger. Le ministre marocain m'a expliqué, pour sa part, les liens entretenus avec la communauté marocaine expatriée. Il y a l'aspect investissement qui est aussi pris en considération, parce que nous espérons que les Hongrois qui vivent à l'étranger viennent investir en Hongrie et faire du lobbying au profit de leur patrie d'origine dans les pays d'accueil. Le Hongrois qui habite aux Etats-Unis garde ses racines hongroises, même s'il ne parle plus hongrois, parce qu'il est de la deuxième ou troisième génération de migrants. Mais il sait quand même qu'il vient de Hongrie, pays d'origine de son père ou grand père. Donc, nous essayons de voir comment les Hongrois et les Marocains qui vivent à l'étranger peuvent servir leurs pays d'origine. C'était une occasion d'avoir des échanges très intéressants avec le ministre marocain chargé de la migration sur ce sujet. J'ai également eu des échanges avec le président du Conseil consultatif des Droits de l'homme. Nous avons discuté de la manière dont les droits fondamentaux et les droits de l'homme jouent un rôle important au 21ème siècle. J'ai expliqué que la Hongrie a adopté une nouvelle constitution en ce 21ème siècle, en mentionnant les droits collectifs et individuels et quelles connexions entre ces droits. J'ai mentionné aussi qu'il y a différentes visions concernant les droits de l'homme. Il y a certaines écoles qui disent que le plus important, c'est l'individu, les droits de l'individu. D'autres qui estiment que l'individu vit dans la communauté, qu'il faut donc une harmonie entre les droits des individus et ceux de la communauté. Il est vraiment difficile de trouver le juste équilibre entre les différentes visions. Il y a un véritable affrontement entre les écoles qui représentent les différentes visions des droits de l'homme. J'ai également discuté avec le chef du gouvernement qui m'a reçu avec beaucoup de gestes amicaux, qui a souligné l'importance des contacts entre nos deux pays. Nous avons parlé aussi de la question du Sahara. Nous allons vous soutenir à ce sujet, parce que nous savons que c'est, politiquement, très important pour les Marocains. La proposition marocaine d'autonomie au Sahara peut être une solution, nous disons bien comprendre votre position, politiquement, et nous avons également parlé de la question des droits dans la société et des liens entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judicaire. Il est très important de maintenir l'indépendance de la justice, mais il est quand même important qu'il y ait un dialogue entre ces deux pouvoirs. Quels types de dialogue faut-il, donc, entamer ? Le chef du gouvernement, qui n'est pas juriste, comprend parfaitement, en tant que politicien, l'enjeu de ce dialogue. Nous avons aussi parlé de la nouvelle constitution que nous avons adoptée en 2011, combien est important le préambule de la constitution, qui met en évidence quelques valeurs, dont l'importance est indéniable. Sans ces valeurs citées en préambule de la constitution, nous avons un texte neutre, applicable dans n'importe quel pays, mais ça ne saurait être une constitution. Vous avez vos valeurs, nous avons aussi les nôtres. Bien sûr, il y a les valeurs communes aussi, universelles, tel le respect dû à la dignité humaine, la liberté d'expression. Mais d'un autre côté, il y a chaque pays qui a ses propres spécificités. L'Opinion : Quel soutien peut apporter la Hongrie au Maroc au sein de l'UE concernant le recours contre la décision du tribunal européen relative à l'accord agricole entre le Maroc et l'Union européenne ? M. Laszlo Trocsanyi : Je suis venu au Maroc également pour comprendre les enjeux de ce problème et ce qui se passe dans la réalité, pour pouvoir procéder à une analyse juridique. D'un autre côté, le Tribunal de première instance du Luxembourg qui a pris cette décision, a présenté une argumentation douteuse pour justifier sa décision. Je pense qu'il y a déjà des Etats européens qui sont intervenus du côté du Maroc, dont le France, la Belgique, l'Espagne et le Portugal, pour faire appel à cette décision. Nous allons également envisager une telle démarche, en rentrant à Budapest, en examinant la chose avec les juristes, et nous pourrons alors prendre une décision en conséquence. D'autre part, politiquement, nous avons bien compris la position du Maroc. Nous disons publiquement aussi que nous sommes à côté du Maroc. Comme l'a déclaré notre ambassadeur, M. Tromler, au journal L'Opinion, nous estimons que l'autonomie proposée par le Maroc est une très bonne formule pour mettre fin à cette affaire, un dossier ouvert depuis assez longtemps, et nous espérons que les Nations Unies soutiennent également cette idée.