Comment ne pas compatir devant le dessein incertain d'un Festival de dimension nationale, vitrine contestable et sans partage des arts populaires marocains pendant plus de 50 ans! C'est par devoir que notre journal lance ce énième appel (après celui publié le 23 mai 2015 en 1ère page sous le titre « sauvez le FNAP », à titre d'un cri de détresse à l'adresse des pouvoirs publics pour se porter à son secours avant l'irréparable. Pour l'histoire et par devoir de transmettre aux générations présente et future les raisons de la création de ce festival, nous avons jugé utile voire indispensable de le présenter tout en mettant l'accent sur le rayonnement de l'image du Maroc qu'il a joué aussi bien au Maroc qu'à l'étranger sans parler de l'enrichissement et de la mise à niveau d'un folklore jusqu'alors à l'état brut. « Le Festival National des Arts Populaires est non seulement la manifestation culturelle la plus importante dans l'histoire du Maroc contemporain, mais depuis 1960, cet événement bénéficie de la sollicitude Royale. Initié par Feu Sa Majesté le Roi Mohammed V, à sa mort Feu Sa Majesté le Roi Hassan II reprend le flambeau et signale par son Haut Patronage l'attachement royal à la valorisation et à la promotion des arts populaires marocains. Ainsi Sa Majesté le Roi Mohammed VI, en reprenant la tradition, veille scrupuleusement sur la continuité du Festival National des Arts Populaires de la ville impériale des Almoravides. Organisé à ses débuts par le Ministère du Tourisme, l'Association le Grand Atlas et le Groupement Régional interprofessionnel du Tourisme, devenu Conseil Régional du Tourisme, en ont eu la charge de 1999 à 2002. Le FNAP retrouve un second souffle et devient, depuis l'an 2003, l'objet d'une Association regroupant, outre ces deux promoteurs, les institutionnels traditionnels à l'origine de cet événement : l'ONMT et la Royal Air Maroc ainsi que les organes publics ralliés à la cause du Festival : le Ministère de la Culture, la wilaya, le Conseil de la Région Tensift AL Haouz et le Conseil de la Ville. A sa 40ème édition, le festival National des Arts Populaires de Marrakech, est déclaré par l'UNESCO : chef d'œuvre du Patrimoine Culturel Immatériel de l'Humanité, le 04 juillet 2005, événement ouvert sur toutes les approches interculturels, le FNAP éclipse toutes les manifestations festivalières qui foisonnent un peu partout à travers le Royaume à la même période, c'est dorénavant un univers de talents et de rêves, cette consécration internationale est plus qu'éloquente et hautement symbolique, c'est une véritable institution qui atteint des valeurs astronomiques un peu partout dans le monde, diffusé et retransmis en direct chaque soir par les médias nationaux et internationaux, le Festival National des Arts Populaires, est acclamé chaque année par un public des plus enthousiastes. Cet événement est une forte conscience culturelle et une énorme boule d'énergie qui balaye tous els clichés anti-culture. Le FNAP est l'un des tous premiers berceaux de la culture contemporaine marocaine, il présente des spectacles qui défient toutes les théories d'analyses critiques sur son désordre artistique qui est « le désordre de la magie et du rêve » dans la fantasmagorie et la grâce, l'art ne comporte aucune logique, sa construction vient des sensations qu'elle provoque dans des mises en images splendides. Dans certaines danses chorégraphiques métissées avec les danses populaires, on a sous les yeux, une somptueuse élégance, c'est une fracassante tempête d'émotions qui jette des corps bondissants qui se livrent à d'étranges et merveilleux échanges gestuels, dans les vagues hurlantes et prenantes d'une très spirituelle gestion de musique et de chant, qui exprime un monde de beauté, de légèreté et d'équilibre, par là- même un monde imaginaire de lumières magiques qui éclairent toute la scène dans un bric-à-brac de son et lumière ineffable. Le FNAP utilisait le prestigieux site Dar Badiaa pour ses scènes avant d'emménager à la Ménara, séculaire monument historique, œuvre du 12ème siècle, fondé par Yaacoub AL Mansour de la Dynastie Almohade. On est tenté de parler de ses spectacles avec les yeux grands ouverts d'étonnement, tant les acteurs paraissent comme des êtres irréels et fantasmagoriques, c'est un voyage extraordinaire que propose le Festival National des Arts Populaires de Marrakech, qui présente un mélange de stars internationales et nationales des plus célèbres sur des scènes et des sites qui semblent revivre pour nous les légendes les plus fantastiques, excessives, passionnées qui ne remplissent pas que la vue d'une très beau public à l'âme d'enfant, mais dévoile toute la magie des gestuels corporels, dans leur diverses expressions et registres artistiques. Enfin le but du festival, c'est aussi celui de remettre l'homme au cœur d'une authentique fraternité à travers le monde tout en faisant rêver à travers ses spectacles qui distillent subtilement un massage universel : celui de la paix, de l'authenticité culturelle dans cette fresque mosaïque de culture et de couleurs des quatre coins du monde ». Demandez au chorégraphe et grand metteur en scène Lahcen Zinoun qui est à la fois membre fondateur et membre du bureau du réseau international « DBM » Danses du Bassin Méditerranéen la place qu'occupait le FNAP sur l'échiquier artistique mondial ? Interroger le célèbre musicologue Ahmed Aydoum sur le considérable impact du FNAP sur la musique marocaine ? Renseignez-vous auprès des professionnels du tourisme sur le boom que connaissaient le secteur touristique et ses activités parallèles tout au long de la période du FNAP ? Allez savoir l'ambiance festive où évoluaient les différentes troupes régionales retenues à l'issue d'une sélection, une question à poser aux membres des troupes folkloriques eux-mêmes en l'occurrence: Abidat Rma – Aglagal- Ahidous- Ahouach Taourirt- Ait Bougemmaz- Ahouach Iminitanout- Ahidous Lakbab- Aklal Sif- Dakka- Gnaoua- Gadra- Hmadcha Hssada- Hait Tissa- Le Haouzi- Kelaat Mégouna- Mizane Houara- Tissent Taskiouine- Rokba. Si leurs témoignages ne vous suffisent pas, demandez aux artisans, artistes peintres et autres hommes de lettres, comment le FNAP attirait autant de monde et suscitait autant d'intérêt quant à ses programmes artistiques et culturels qui faisaient venir des médias de tous les coins du monde pour la couverture ? TV5 Monde par exemple qui en était partenaire et qui transmettait en direct la représentation de l'ouverture en sait quelque chose. Aujourd'hui qu'est-ce qui reste de tout ça ? Le néant depuis qu'une soi disante Fondation des Arts Populaires à pris en mains sa destinée. Assurément l'adage selon lequel « un outil délicat se fausse sous une main maladroite » n'a jamais été aussi bien justifié comme c'en est le cas pour les piètres copies qu'il nous a offertes ces dernières années. Rendons à César ce qui lui appartient et reconnaissons que sous la présidence de l'Association le Grand Atlas en la personne du Dr Mohamed Knidiri, le FNAP avait vécu ses meilleurs jours : - Il disposait d'une date de programmation immuable - Il faisait partie du pack que commercialisaient les agents de voyage - Il était ponctué de conférences, de séminaires et autres débats autour de notre patrimoine culturel et artistique. - Il animait la ville par des concours sur la gastronomie, la meilleure vitrine, le vestimentaire traditionnel et autres expositions picturales. Tout ça explique l'attrait qu'il exerce sur les visiteurs potentiels. Même les hôtels réservaient des espaces d'une vingtaine de places chacun pour leurs clientèles respectives pour un traitement en VIP comme le palace la Mamounia. En retour ceux-ci offraient des nuitées aux invités du FNAP. A son tour la RAM fait cadeau d'un certain nombre de billets à titre de contribution. De tout cela, il n'en reste que des vestiges à faire pleurer. N'est-il pas malheureux de le voir péricliter au moment où de récents festivals régionaux ont gagné des galons. Le FNAP peut encore renaître de ses cendres pour peu qu'on confie son organisation à des personnes compétentes, ( et Dieu sait que Marrakech en regorge), et qu'on mette à leur disposition les moyens financiers conséquents. Si, à Dieu n'en plaise, les départements concernés (Culture – Tourisme – Wilaya – Région – Mairie) persistent dans leur laxisme et leur désintérêt à l'égard d'un levier artistique qui a fait ses preuves et montré la voie à de « petits festivals » qui ont grandi et se sont internationalisés grâce à des organisateurs compétents et aguerris, l'histoire retiendra à jamais l'ampleur de leur forfait pour ne pas dire de leur crime parfait.