La situation économique, sociale et juridique des entreprises marocaines de presse a été au centre des discussions du Bureau exécutif de la Fédération Marocaine des Editeurs de Journaux (FMEJ) qui s'est réuni jeudi dernier à Casablanca et qui a exprimé sa vive inquiétude face à la crise qui affecte la presse écrite et qui la contraint de, non plus chercher à se mettre à niveau, mais seulement à lutter pour survivre, voire vivoter. Ce, d'autant plus que pas plus tard que la semaine dernière, de grands titres de la presse internationale tel l'anglais « The Independant », ont annoncé leur passage à l'édition électronique ou ont été obligés de procéder à de douloureuses restructurations, comme « L'Equipe » française. Outre la crise internationale, le Bureau exécutif a mis le doigt sur un phénomène que l'on peut expliquer par la fameuse « spécificité marocaine » et dont il ressort, selon une enquête menée par la FMEJ, en collaboration avec le ministère de la Communication, que sur deux millions de lecteurs potentiels des seuls quotidiens nationaux, 250.000 à peine paient leur journal, les 7/8èmes restants se contentant de faire leur « revue de presse », pour ainsi dire quasi gratuitement grâce au grand choix de titres que leur proposent les cafés... Ce qui pose, d'abord, le problème de la sous-estimation du lectorat, lequel - on le voit bien- est beaucoup plus important que les chiffres suggérés par le volume réel des ventes et, ensuite, celui des ressources financières des entreprises de presse, lesquelles dépendent, en grande partie, de la publicité qui reste tributaire, à son tour, du volume des ventes et dont la part des journaux sur le marché publicitaire marocain s'est réduite de 22 % à 17 % en un court laps de temps. Aussi, le Bureau fédéral invite-il l'ensemble de ses partenaires, pouvoirs publics, annonceurs, agences de communications, distributeurs et partenaires sociaux à s'investir dans une nouvelle génération de relations qui tiennent compte non pas des intérêts économiques, politiques et sociaux étroits, mais qui engagent la responsabilité de tous envers la préservation et la pérennité de la presse dans notre pays afin qu'elle puisse s'acquitter de sa mission fondamentale qui est de satisfaire le droit élémentaire et essentiel du citoyen à l'information et d'assumer sa responsabilité en tant que l'un des piliers de l'exercice démocratique. D'autre part, et tout en se félicitant de la suppression de certaines dispositions rétrogrades du projet initial du nouveau Code de la presse, le Bureau fédéral n'en considère pas moins que la mouture actuellement en discussion au niveau du parlement contient des dispositions aux inconvénients certains, surtout celles qui touchent les finances de l'entreprise de presse et la menacent dans son existence même à travers, par exemple, l'interdiction « idéologique » de bénéficier de la publicité d'entités publiques dont, pourtant, l'Etat lui-même tire des revenus ... Le Bureau estime, en revanche, que la promulgation des textes relatifs, l'un au journaliste professionnel et l'autre au Conseil national de la presse tels qu'entérinés par le parlement, est en-soi positive nonobstant quelques carences et imperfections ou la substitution de certaines dispositions du Code pénal à celui de la presse proprement dit... Tous griefs et remarques que le bureau de la FMEJ se propose de consigner dans un mémorandum détaillé et circonstancié qu'il adressera au ministère concerné et à tous les groupes parlementaires, indique le communiqué qui invite, instamment, l'institution législative actuellement saisie du projet de rattraper et de corriger les graves carences qui l'entachent, faute de quoi, la presse marocaine ne sera plus qu'un corps « en liberté provisoire » et présentera forcément, ainsi, une image biaisée sur l'évolution et les progrès de la démocratie dans notre pays.