Écrire en voyageant, voyager en écrivant, est devenu pour le géniteur de l'avatar Bouzghiba et l'aventurier de l'art que je crois être, une sorte de drogue douce dont je suis un irréductible et inassouvissable accro. L'âme des lieux et l'âme de ceux qui les occupent transparaissent en filigrane à travers ces textes écrits quelquesfois à la hâte, mais portant l'empreinte du temps qui passe et les senteurs de la lande foulée du pied. Ainsi, au lieu du très fugace et coûteux vol aérien entre le ciel de Rabat et puis la voûte romaine, une ligne aérienne si pauvre en dépaysements, puisqu'à travers les hublots, on ne voit que les hélices qui fouettent les nuages amoncelés au grès des vents, j'ai choisi, comme pour le voyage parisien, la voie terrestre. Certes, elle est contraignante physiquement, mais enrichissante à plus d'un titre. Par ailleurs, sur le plan financier, elle coûte moins cher. Trois jours d'affilée, cela ressemble à une pénitence. Pour aller à Paris , il fallait morceler le trajet au moins en deux tronçons et faire escale à Marseille me parut meilleur. Cela m'a permis une bonne récupération. Le TGV semblait le moyen le plus adequate pour monter vers le nord, malgré le prix élevé du ticket. Quand à l'ancienne capitale impériale d'où Caesar transmettait ses ordres à ses généraux éparpillés sur le portour méditérranéen, c'est devenu un Etat-fils au sein d'un Etat-père . Rome une ville dont l'histoire est si riche et regorgeant de vestiges datant de l'époque gréco-romaine est devenue si vétuste. Son présent n'est pas aussi reluisant que son passé , puisque la ville s'est étendue indéfiniement en créant des problèmes insurmontables aux services municipaux. Le graffiti maladroit et inésthétique a fait de ses murs et des rideaux de magasins une ardoise pour déssinateurs mal inspirés. Ainsi, pour le trophée-2015 revenant Ennio Morricone j'aurais dû l'envoyer par voie aéropostale, mais je m'en suis abstenu, car je voulais voir Rome et je ne regrette dans ce voyage culturel qu'une seule chose, le froid alpin qui a quelque peu désenchanté les randonnées urbaines. A Rome, à pareille époque, les rayons d'Apollo valent de l'or. La grande botte de mousquetaire qui veut shooter les deux iles de Sicile et Sardaigne ne m'a que trop séduit et m'interpellait à découvrir ses mysteres. Pour aller à l'Accademia Nazionale di Santa Cecilia où je devais déposer le trophée, il a fallu effectuer tout un périple, sachant que les journées romaines sont désespérément courtes. A peine finit-on de déjeuner , le crépuscule se profile à l'horison. Arrivé au fameux Collosseo, un tourbillon de pensées s'empare irrésistiblement de moi. Je revois dans la vastitude de cette arène les combats mortels de titans et de gladiateurs et la foule avide de la vue du sang qui rappelle celle des corridas espagnoles. Voir Rome sans allonger le pas jusqu' au Collosseo aurait été un voyage raté. (Rome, 19 Janvier 2016)