Istanbul, la capitale économique de Turquie, a été le théâtre lundi matin de deux attaques, l'une contre un poste de police, l'autre contre le consulat des Etats-Unis, qui ont fait au moins trois morts, selon les médias turcs. Dans le sud-est de la Turquie, quatre policiers ont été tués lundi par un engin explosif placé le long d'une route du sud-est de la Turquie, une attaque attribuée aux rebelles kurdes, ont annoncé les médias locaux. L'attentat a eu lieu dans le district de Silopi dans la province de Sirnak, frontalière de l'Irak et de la Syrie, a annoncé l'agence privée Dogan. Ces heurts se sont produits dans un climat d'escalade des tensions due à la campagne de bombardements des rebelles kurdes du PKK par le gouvernement. Peu après minuit, lundi, l'explosion d'un véhicule a été déclenchée par un kamikaze présumé devant un poste de police du quartier de Sultanbeyli sur la rive asiatique du Bosphore, faisant 10 blessés dont trois policiers, a rapporté l'agence officielle Anatolie. Des affrontements avec la police se sont poursuivis toute la nuit de dimanche à lundi devant le poste de police pris pour cible par les tirs des attaquants. Deux militants présumés, dont l'appartenance politique n'était pas établie, ont été tués par la police lundi matin, ont annoncé les médias. Un policier a été tué dans ces affrontements, a rapporté la chaine de télévision NTV, mais sa mort n'a pas été officiellement confirmée. Dans une autre attaque, deux individus, dont une femme, ont ouvert le feu lundi matin sur le consulat, très protégé, des Etats-Unis à Istanbul, situé dans le quartier d'Istinye sur le Bosphore, ont rapporté les chaînes CNN-Turk et NTV. La femme, blessée, a été arrêtée peu après par la police, selon les médias turcs. L'attaque contre le consulat américain revendiquée Un groupe d'extrême gauche a revendiqué, hier, l'attentat contre le consulat américain à Istanbul, et un responsable turc a accusé les séparatistes kurdes turcs d'une autre attaque contre un poste de police dans la même ville. «L'attaque contre le consulat est liée au DHKP-C (Parti/Front révolutionnaire de libération du peuple», groupe radical ayant revendiqué en 2013 un attentat-suicide contre l'ambassade des Etats-Unis à Ankara qui avait provoqué la mort d'un agent de sécurité turc, a déclaré le responsable qui a requis l'anonymat. Dans un communiqué sur son site web, ce groupe a revendiqué l'attaque et promis que «la lutte continuera jusqu'à ce que l'impérialisme et ses collaborateurs quittent notre pays et que chaque pouce de notre territoire soit libéré des bases américaines». Le responsable turc a par ailleurs affirmé que le PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan, séparatiste kurde) était responsable de l'attaque-suicide qui a visé dans la nuit une station de police du quartier de Sultanbeyli sur la rive asiatique du Bosphore à Istanbul. Dix personnes ont été blessées dont trois policiers, selon un communiqué du bureau du gouverneur. Une bataille rangée a ensuite opposé les assaillants à la police toute la nuit. Outre le kamikaze, deux militants ont été tués dans les affrontements, selon le bureau du gouverneur. Beyazit Ceken, chef du département des explosifs à la police, a été blessé dans les accrochages et est décédé à l'hôpital, a ajouté la même source. Les Etats-Unis déploient leurs premiers F16 Par ailleurs, les Etats-Unis ont déployé leurs six premiers avions chasseurs F16 sur la base d'Inçirlik en Turquie. Bien que le gouvernement turc soit un allié de l'administration américaine, il a fallu un an de négociations avant qu'Ankara ne donne son accord à ce déploiement dont l'objectif est d'atteindre plus facilement les bases du groupe Etat islamique dans la région. Le site de l'armée américaine en Europe publie une photo des six avions F16, désormais stationnés dans le sud de la Turquie. Ces appareils sont arrivés dimanche, en provenance de la base d'Aviano en Italie. Les F16 sont accompagnés par un contingent de 300 militaires, indique la correspondante de RFI à Washington, Anne-Marie Capomaccio. Ce déploiement, obtenu après une longue négociation entre Ankara et Washington, place les chasseurs à 30 minutes de vol de la plupart de leurs cibles, les bases du groupe Etat islamique en Syrie. La Turquie a longtemps hésité avant de donner son feu vert. Washington refuse d'établir un lien entre ce revirement dans la stratégie turque et les récents bombardements d'Ankara sur les Kurdes du PKK. Les Américains se disent aux côtés de leur allié dans sa lutte « contre tous les terroristes, dont le PKK fait partie », dixit le département d'Etat. Les premiers bombardements américains contre le groupe Etat islamique en Syrie sont intervenus voilà un an tout juste. Selon le Pentagone, 5 600 bombes ont été lâchées depuis le 8 août 2014. Un tournant stratégique La Turquie avait déjà annoncé qu'elle autoriserait désormais les appareils américains à utiliser ses infrastructures, rappelle le correspondant de RFI à Istanbul, Alexandre Billette. Pour la première fois, des drones américains ont décollé mercredi dernier de bases turques pour effectuer des frappes contre des objectifs du groupe Etat islamique, mais jamais jusqu'à maintenant des avions avec pilotes n'avaient pu se positionner sur les bases aériennes du pays. Ankara confirme donc ainsi son revirement stratégique suite à l'attentat de Suruc le 20 juillet, qui a fait 32 morts. La Turquie autrefois réticente à combattre les islamistes radicaux pour ne pas favoriser l'émergence d'une puissance kurde dans le nord de la Syrie se dit désormais lancée dans une « bataille globale contre l'Etat islamique. »