Traversé par de nombreux dysfonctionnements, le système d'éducation et de formation n'a pas tenu ses promesses, contenues en particulier dans la charte d'éducation et de formation, au terme de treize années après son adoption, comme le constate le rapport du Conseil de l'éducation, de la formation et de la recherche scientifique sur « les acquis, les déficits et les défis « de sa mise en œuvre. Ces acquis suscitent un constat de désolation lorsqu'on apprend, au fil de l'analyse du rapport, les retards, les abandons et la faiblesse des acquis des élèves, la démotivation, la démobilisation et la morosité des enseignant face à l'application de la charte, la gouvernance, l'absence d' évaluation du système d'éducation, etc. L'un des points abordés dans le rapport du CSEFRS est relatif à la généralisation de la scolarisation et à la déscolarisation. La généralisation de l'accès à l'enseignement primaire, à tous les enfants âgés de six ans, (sept ans avant 1998) a constitué un défi majeur et une priorité pour l'ensemble des réformes qui se sont succédées depuis l'indépendance de notre pays. Même si des progrès significatifs avaient été réalisés (le taux net d'accès à la première année du primaire est passé de 53% en 1999 à 65% en 2000), un nombre important d'enfants demeurait en dehors de l'école, hors d'atteinte de toute offre éducative. C'est dans ce contexte que la Charte a fait de la généralisation de l'accès à la scolarisation la première de ses priorités afin de rendre effective l'obligation scolaire édictée par la loi. L'objectif fixé consiste, en effet, à généraliser l'accès en première année de l'enseignement primaire à tous les enfants âgés de six ans révolus dès septembre 2002 (art. 28), à garantir le caractère obligatoire de l'enseignement pour les enfants de 6 à 15 ans révolus (art. 26), et à porter une attention particulière aux filles rurales (art. 25). La généralisation de l'accès des enfants au primaire dès la fin 2002 ciblait plus particulièrement les enfants du milieu rural. Les données montrent que depuis 1999, notre pays a réalisé des progrès importants : en 2013, plus de 95% des enfants de 6 ans sont scolarisés, soit qu'ils aient accédé à l'école primaire à temps ou en avance, soit qu'en retard, ils soient encore préscolarisés. Ce taux n'était que de 53,7% en 1999. Une approche quantitative destinée à évaluer la généralisation doit tenir compte de la spécificité du contexte marocain où l'âge légal d'accès à la première année du primaire est sujet à une flexibilité qui vise à intégrer d'autres classes d'âge. En effet, en 2013, 29% des nouveaux inscrits au primaire n'avaient pas l'âge légal de 6 ans, 17% avaient moins de 6 ans et 12% plus de 6 ans. Le taux net d'accès, qui rapporte le nombre d'enfants accédant à la première année du primaire et âgés exactement de 6 ans à la population totale âgée de six ans, pointe l'importance du phénomène du retard scolaire durant cette première année du primaire. En effet, le taux net est de 78,5% en 2013. Il en résulte que la généralisation de l'accès au primaire n'est pas encore atteinte et subit toujours le phénomène du retard d'accès et, dans une moindre mesure, celui de l'accès précoce des enfants de moins de 6 ans. Le rapport du CSEFRS relève une hétérogénéité des âges qui dévoile un retard d'accès au primaire. Le taux brut d'accès, qui rapporte l'ensemble des enfants scolarisés en première année du primaire à la population totale âgée exactement de 6 ans, montre l'importance des efforts réalisés à la fois pour scolariser tous les enfants ayant 6 ans mais aussi ceux qui sont entrés tardivement ou précocement au primaire. Généralisation de la scolarisation Des progrès conséquents ont été accomplis depuis 2000 en matière de scolarisation des enfants au primaire. Durant les années 1990, les effectifs des élèves du primaire représentaient moins de la moitié des enfants en âge d'être scolarisés tandis qu'en 2013, les taux de scolarisation des enfants âgés de 6 à 11 ans se rapprochent de la généralisation d'une scolarité primaire complète. Les efforts consentis, notamment entre 2009 et 2012, ont particulièrement réduit les inégalités d'accès au cycle primaire, au regard tant du territoire que du genre. En effet, l'évolution des taux nets de scolarisation au primaire indique que l'objectif du Programme d'urgence de scolariser 95% des enfants âgés de 6-11 ans au primaire a été atteint et même dépassé dès 2011 pour s'élever à environ 97%. Par ailleurs, le taux brut de scolarisation au primaire, qui a dépassé 100% dès 2002, renseigne sur la capacité additionnelle développée dans ce cycle en vue d'accueillir les élèves qui ont du retard ou qui ont accédé précocement à l'école (avant 6 ans). En 2012, la scolarisation des 6-11 ans a été quasiment généralisée. Cette marche vers la généralisation de la scolarité primaire a certes été lente, mais elle a été nettement accélérée à la fin de la décennie. Il est à noter que le rythme qui a conduit à cette généralisation pour les 6-11 ans a été plus élevé durant la mise en oeuvre du Programme d'urgence que pendant la période précédente, entre 2000 et 2009. Pour les filles du milieu rural, les progrès ont été notables puisque le taux de scolarisation est passé de 88,3% en 2009 à 96% en 2012. Ainsi les disparités de genre et les écarts entre les milieux rural et urbain ont sensiblement diminué entre 2000 et 2012. On constate que l'évolution du rythme de progression a été de 12 points durant les 9 années de la décennie (de 2000 à 2009), et qu'il a été de 7 points durant les trois années 2010-2012. Cette évolution accélérée de la fin de la décennie a été favorisée par les mesures socioéconomiques du Programme d'urgence : un appui social a été accordé aux enfants et aux familles, notamment par la distribution gratuite de cartables, mais aussi par le biais du programme « tayssir », le renforcement du transport scolaire et l'amélioration du dispositif d'internats et de cantines scolaires. Concernant la scolarisation au secondaire collégial, les efforts ont été certes importants, comme en témoigne la forte augmentation du taux de scolarisation des 12-14 ans dans le cycle collégial entre 2000 et 2012, mais l'objectif de généralisation n'est que partiellement atteint. En 2013, 86% des 12-14 ans étaient scolarisés. Cependant, le taux de scolarisation de cette tranche d'âge dans le cycle secondaire collégial est moins important. En effet, 58% seulement des 12-14 ans ont accédé au secondaire collégial durant la même année, et plus du quart (28%) des enfants de cette tranche d'âge sont toujours inscrits au primaire. Ces résultats témoignent de la persistance du retard scolaire qui a crû continuellement au fur et à mesure que les taux de scolarisation des 12-14 ans augmentaient. Le retard croît avec l'avancée en âge des enfants au point de rendre impossible la généralisation qualitative de la scolarité obligatoire (c'est-à-dire sortir du collégial à l'âge requis). Globalement, le rythme de scolarisation des 12-14 ans a augmenté de manière importante durant la mise en oeuvre du Programme d'urgence en gagnant 15,5 points entre 2009 et 2013. En milieu urbain, la scolarisation des 12-14 ans est passée de 88% à la quasi-généralisation. En milieu rural, une hausse similaire a été enregistrée, néanmoins les taux de scolarisation indiquent que seuls les deux tiers des enfants de cette tranche d'âge ont été scolarisés dans ce milieu. L'évolution du taux net de scolarisation, qui n'était que de 27% en 2000, a été croissante et continue durant toute la décennie, avec un rythme en moyenne de 6% par an. Ce rythme s'est accéléré durant la période du Programme d'urgence pour dépasser 7% en moyenne annuelle. En milieu rural, le rythme de progression de la scolarisation au secondaire collégial a été soutenu tout au long de la période 2000-2013 (11% en moyenne annuelle). L'écart entre les taux réalisés en 2012-2013 et ceux prévus dans le cadre du Programme d'urgence reste tout de même important, il est de 32% au niveau national, de près de 59 % au milieu rural et près de 63% parmi les filles rurales. Il est évident que la différence des taux de scolarisation spécifiques entre les filles de milieu urbain versus le rural est notoire. Si dans le cas des premières, l'effort de généralisation a abouti, pour les secondes, il est loin d'être atteint. C'est ainsi que l'objectif consistant à atteindre un taux net de scolarisation de 90% au secondaire collégial pour les enfants de 12-14 ans en 2012-2013, tel qu'il a été préconisé par le Programme d'urgence, n'a pas encore été atteint, surtout en milieu rural et pour les filles. Obligation scolaire pour les 6-15 ans et retard scolaire Cette évaluation de l'effet des politiques visant à généraliser l'accès au primaire et au secondaire collégial, montre que, globalement, depuis 2000, la scolarisation des 6-15 ans a connu des avancées non négligeables. En effet, le taux de scolarisation des enfants de 6 à 11 ans a fortement progressé, notamment entre 2009 et 2013. L'accès au primaire est en conséquence général, même si les phénomènes de retard et de redoublement sont patents. Par ailleurs, le rythme de progression a été très important entre 2009 et 2013 puisque le taux de scolarisation des 12-14 ans est passé de 70,6 % à plus de 86 %. En revanche, le rythme des réalisations ces dernières années dans l'accès au collégial doit se maintenir afin d'espérer une généralisation de l'obligation scolaire. Le rapport met en évidence l'évolution du taux de scolarisation des 6-15 ans, quel que soit leur niveau d'enseignement (primaire, secondaire collégial ou qualifiant). Les indicateurs rendent compte des prémices d'une généralisation de l'obligation scolaire, notamment depuis 2009. La part des 6-15 ans scolarisés a augmenté de 24 points, pour atteindre 93% en 2013 contre 69% en 2000. En milieu urbain, l'obligation de scolariser les 6-15 ans est quasiment effective. Bien que les inégalités entre milieux et genres aient été réduites, la généralisation de la scolarisation des filles du milieu rural se heurte encore à des difficultés. En 2013, le taux spécifique de scolarisation en milieu rural est de 79,3% pour les filles contre 86,7% pour les garçons. Toutefois, le taux spécifique de scolarisation des filles du milieu rural a connu le rythme d'évolution le plus élevé entre 2000 et 2013 (plus de 3,7 points chaque année). A partir des simples taux de scolarisation par âge, on constate des retards scolaires, particulièrement au cycle primaire. Le rapport indique que presque la moitié des élèves de 12 ans sont toujours au primaire et accusent à cet âge-là un retard d'au moins une année scolaire. Un autre constat tout aussi important est celui de la baisse importante des taux de scolarisation à partir de cet âge, ce qui indique que les décrocheurs ont majoritairement 13 ans et plus. Sous l'effet de la déscolarisation, qui intervient surtout au collégial (quasiment 95% des enfants ayant 12 ans sont scolarisés alors que seuls 70% le sont à l'âge de 15 ans), la proportion d'élèves en retard baisse chez ceux entre 13 et 14 ans avant d'augmenter fortement chez les jeunes de 15 ans, qui devraient être en première année du secondaire qualifiant alors que seuls 25% le sont effectivement: plus de 41% d'entre eux sont toujours scolarisés au collégial et sont exposés à un fort risque d'exclusion. Extension du secondaire qualifiant La Charte n'a pas fixé d'objectif précis en termes de proportion d'enfants âgés de 15-17 ans à scolariser au secondaire qualifiant. Néanmoins, elle a arrêté des objectifs en matière de rétention jusqu'au baccalauréat et d'un taux d'obtention du bac de 40% en 2011 pour les élèves inscrits au primaire lors de la mise en oeuvre de la Charte. Au niveau de l'évolution quantitative, la scolarisation des jeunes âgés de 15 à 17 ans s'est nettement améliorée depuis 2000, passant de 35,4 % à 59,2% en 2013. Une analyse des données indique cependant deux réalités marquantes sous-jacentes à la progression de la scolarisation de ces jeunes. La première est que les progrès accomplis ont été beaucoup plus importants entre 2009 et 2013 puisque la scolarisation de cette tranche d'âge a progressé de quasiment 9 points sous l'impulsion du Programme d'urgence. La seconde est que près de 60% des jeunes scolarisés, qui ont exactement 15 ans en 2013, sont encore inscrits au secondaire collégial et près de 5,6% d'entre eux ont cumulé un retard considérable puisqu'à cet âge avancé, ils sont toujours scolarisés au cycle primaire. Ce phénomène du retard accumulé tout au long de la scolarité touche toute la tranche d'âge des 15-17 ans : 25,4% sont scolarisés au collégial et 1,7% au primaire. L'évolution des taux nets de scolarisation au secondaire qualifiant pour les jeunes âgés de 15 à 17 ans montre qu'en 2013, presque un tiers (32%) des jeunes de cette tranche d'âge est scolarisé au secondaire qualifiant. Les filles sont plus scolarisées que les garçons au secondaire qualifiant (35% contre 30%). Le taux net de scolarisation des 15-17 ans au secondaire qualifiant a enregistré une progression durant la décennie de la Charte alors qu'il était de 11% en 2000. Mais il demeure faible, surtout en milieu rural où la progression est la moins importante, en raison du nombre limité d'établissements d'enseignement secondaire, ce qui contraint les lycéens originaires du milieu rural à poursuivre leur scolarité en milieu urbain. Les différenciations les plus importantes ont trait au taux de scolarisation des filles en milieu urbain (83%) et à celui des filles du milieu rural (19%). Le niveau socioéconomique et la pauvreté des familles rurales, la non disponibilité des structures d'accueil des jeunes filles dans des internats et des maisons d'accueil scolaire (Dar Attaliba), la migration des petites et jeunes filles vers les villes à la recherche du travail domestique (71) pour subvenir aux besoins des familles rurales, sont autant de facteurs qui expliquent le constat d'une non généralisation de l'éducation qui touche essentiellement les filles. Rétention et déscolarisation Le pourcentage des élèves qui achèvent l'ensemble des cycles scolaires est un indicateur de rendement interne du système éducatif. La réussite de ce dernier est liée à sa capacité à retenir les élèves pour poursuivre l'itinéraire scolaire et arriver à terminer les cycles de la scolarité. Partant de ce principe, la Charte a précisé les objectifs en matière d'achèvement des cycles par les élèves. Elle recommande (dans le levier 1 - art. 28-c) que pour la rétention des apprenants : « les élèves inscrits en première année du primaire au démarrage de la mise en oeuvre de la Charte, parviendront en fin d'école primaire, pour 90% d'entre eux en 2005 ; en fin d'école collégiale, pour 80% d'entre eux en 2008, à l'obtention du baccalauréat, pour 40% d'entre eux en 2011 ». Ceci implique un examen des dispositifs mis en oeuvre pour favoriser la rétention. La réalisation des objectifs fixés par la Charte supposait une réduction des déperditions scolaires de manière substantielle. Or, les niveaux de redoublement et d'abandon ont été assez élevés au début de la dernière décennie et de ce fait, ont reporté l'atteinte de ces objectifs au-delà de 2011. En 2009, le Programme d'urgence a réactualisé les objectifs de la Charte en matière de rétention des élèves dans les différents cycles, mais a reporté l'objectif d'un taux de réussite de 40% au baccalauréat à 2021, pour la cohorte des nouveaux inscrits en primaire en 2009-2010, désignée comme la « cohorte de l'école de la réussite ». Le Programme d'urgence, dans le cadre de l'extension de l'offre et de lutte contre le décrochage scolaire, a relancé l'effort en faveur de la rétention en précisant les résultats à atteindre : 90% des élèves scolarisés en 2009 parviendront à la fin du primaire en 2015, 80% parviendront à la fin du secondaire collégial en 2018, et 60% parviendront à la fin du secondaire qualifiant en 2021. En examinant les taux d'achèvement de parcours de trois cohortes d'élèves nouvellement inscrits dans le primaire public en 2000, 2001 et 2002, on constate que sur 100 élèves inscrits en première année de l'enseignement primaire public en 1999-2000, 35% sont parvenus à la fin de ce cycle en 2005 sans aucun redoublement, 18% sont parvenus à la fin du secondaire collégial en 2008, 6% sont parvenus à la fin du secondaire qualifiant en 2011 mais seulement 3% ont obtenu le baccalauréat la même année sans aucun redoublement. Les taux d'achèvement ne se sont pas améliorés pour les cohortes 2001-2012 et 2002-2013. En ce qui concerne la cohorte de « l'école de la réussite », sur 100 élèves inscrits dans le primaire en 2009-2010, 57% sont arrivés à la quatrième année du primaire en 2013 sans aucun redoublement. En effet, les déperditions scolaires, notamment le décrochage précoce, a légèrement baissé durant la période de mise en œuvre du Programme d'urgence. Ainsi, en matière d'achèvement des cycles par les élèves, les objectifs de la Charte ne sont pas atteints. Toutefois, les actions menées durant la mise en œuvre du Programme d'urgence pour réduire le retard scolaire ont permis d'améliorer sensiblement les taux d'achèvement de tous les cycles. Les taux actuels de redoublement et d'abandon moyens sont de l'ordre de 26% au secondaire collégial et de 25% au secondaire qualifiant. Ces taux, conjugués avec les analyses menées sur le retard scolaire, montrent que les efforts en matière de rétention doivent être sérieusement renforcés, en lien avec ceux déployés pour atteindre la généralisation globale de l'éducation. La rétention est tributaire de plusieurs facteurs, à savoir la qualité des enseignements, la pertinence des méthodes pédagogiques, l'attractivité du climat de l'école, les conditions sociales favorisant la scolarité des élèves, l'appui social et la prise en charge de ceux qui sont menacés par l'abandon scolaire. Ces facteurs qui déterminent la survie scolaire, représentent des leviers sur lesquels il faudrait agir pour généraliser l'éducation pour tous. La généralisation de la scolarisation se heurte à l'ampleur des déperditions liées au redoublement et à l'abandon scolaire, en particulier durant les transitions entre les différents cycles de l'enseignement scolaire. La question du devenir de ces déscolarisés se pose avec acuité, d'autant plus que ni l'Éducation Non Formelle, ni la Formation Professionnelle ne sont en mesure d'offrir une solution au « stock » constitué d'année en année par les déperditions. L'évolution de l'abandon scolaire pousse à s'interroger sur les causes et les conséquences des sorties précoces du Système de l'Éducation et de la Formation, particulièrement des sorties sans qualifications et/ou sans diplôme. Les sorties précoces du système éducatif interviennent principalement à deux niveaux du système scolaire. Le premier est lié à l'obligation scolaire et couvre les cycles fondamentaux (primaire et collégial), le second se rapporte aux abandons qui surviennent à partir de la 3ème année du secondaire collégial et concerne les élèves qui quittent le système sans alternative de formation adéquate ou de qualification utile à leur insertion dans le marché du travail. Déscolarisation C'est en s'appuyant sur l'analyse des stocks d'abandon scolaire au regard de la capacité d'absorption du système de l'Éducation non Formelle et de la Formation Professionnelle que l'on peut évaluer l'ampleur du problème. En effet, une proportion importante de la population déscolarisée quitte le système national d'éducation et de formation lors des cycles fondamentaux sans bénéficier en retour d'un accompagnement en formation, que ce soit par une réintégration dans le système scolaire ou par un renforcement des acquis grâce à des formations qualifiantes dotant ces jeunes d'atouts en vue de leur entrée dans la vie active. L'analyse des flux cumulés de l'abandon entre 2000 et 2012, aux niveaux de formation susceptibles d'offrir une alternative en dehors du système scolaire, renseigne sur l'ampleur des problèmes posés par le cumul des jeunes n'ayant pas atteint le niveau d'études correspondant en principe à la fin de l'obligation scolaire. Ces sorties massives de la scolarité engendrent une forte pression sur les systèmes d'éducation non scolaires, en l'occurrence l'Éducation Non Formelle et la Formation Professionnelle, qui ne disposent pas de capacités d'accueil suffisantes pour absorber de tels flux d'abandon. De 2000 à 2012, environ 3 millions d'élèves déscolarisés ont quitté les bancs de l'école avant d'atteindre la dernière année du secondaire collégial, et la moitié d'entre eux n'a pas atteint la fin du primaire. A ce niveau de formation, les capacités d'accueil de l'Éducation Non Formelle et de la Formation Professionnelle (niveau spécialisation) réunies ne représentent que 28% du stock d'abandon total. Ce constat amène à s'interroger sur le sort des 72% de cette population qui interrompt ses études avec de faibles niveaux de scolarité sans autre alternative réelle venant du système national d'éducation et de formation. La capacité d'accueil du système de Formation Professionnelle est insuffisante pour offrir à la majorité des sortants au niveau post-obligatoire, une voie de formation complémentaire pouvant les amener vers une certification professionnelle. Plus précisément, les sorties de la dernière année du secondaire collégial et des deux premières années du lycée auraient produit un cumul d'abandon scolaire qui s'élevait à 1,3 millions de personnes entre 2000 et 2012. Par contre, la capacité d'absorption par la Formation Professionnelle est proportionnellement beaucoup plus importante lorsqu'il s'agit des sortants au niveau de la deuxième année du baccalauréat (73). Les flux cumulés d'abandon durant la même période atteignent 558 000 lycéens. La capacité de la Formation Professionnelle couvre 91% de la totalité des stocks de sorties. Cette différenciation selon les niveaux de sortie de la scolarisation montre comment le Système de l'Éducation et de la Formation crée des inégalités d'accès à la formation post-obligatoire professionnelle. Malgré les liens organiques entre le système éducatif et la Formation Professionnelle, l'insuffisance de la capacité à absorber tous les sortants du système éducatif, crée ainsi des inégalités d'accès aux différentes spécialités offertes par la FP et empêche le développement d'un continuum cohérent en termes de cursus entre les deux systèmes de formation.