Jonathan Goodluck, le président sortant du Nigéria, a vu sa chance l'abandonner, en voulant bénéficier de la «Baraka des Chorfas». Celui qui brigue un nouveau mandat présidentiel, le 28 mars prochain, a cherché à améliorer son image ternie auprès des musulmans de son pays, qui constituent la moitié de l'électorat nigérian, en se drapant de la légitimité religieuse du Commandeur des Croyants. Un refus catégorique lui a été signifié à propos de sa demande de communication téléphonique avec SM le Roi, suivi d'un cinglant démenti du ministère marocain des Affaires étrangères quand au déroulement d'une telle discussion. A force de croire en sa bonne étoile (Good luck signifiant bonne chance en anglais), Jonathan Goodluck en a perdu tout sens des réalités. Comment avoir l'outrecuidance, comme si de rien n'était, de vouloir exploiter la position du Maroc dans une entreprise électoraliste alors que le Nigéria a toujours soutenu ouvertement le Polisario ? Compter sur sa chance à ce niveau d'exercice de la politique relève plutôt de la bêtise. Il ne s'agit pas de traiter avec quelque gouverneur corrompu d'un État fédéré du Nigéria. Il est question du Roi du Maroc et de l'image de marque du Royaume auprès des pays africains. La règle d'or des Marocains est d'éviter de se mêler des affaires intérieures des autres pays, exactement comme ils ne supportent pas qu'on se mêle de leurs affaires. La bénédiction du Commandeur des Croyants ne saurait, par ailleurs, être accordée à celui qui maintient les populations musulmanes du nord du Nigéria dans un coupable dénouement. Boko haram, l'organisation terroriste jihadiste née au Nigéria, est passée de quelques centaines d'illuminés à plusieurs milliers de combattants aguerris, sous la présidence du pays par Jonathan Goodluck. Maintenant, elle se permet de frapper également les pays voisins et vient de nouer une alliance stratégique avec Da'ech. Si ce n'était l'efficacité de l'armée tchadienne, Boko Haram aurait déjà déferlée sur toute la région. Le Nigéria, premier producteur de pétrole d'Afrique, est aussi le pays le plus peuplé du continent. Mais sur les 177 millions de Nigérians, les deux tiers vivent en dessous du seuil de pauvreté absolue. Malgré une abondance de main d'œuvre et de richesses naturelles, qui en font le 3ème PIB d'Afrique, l'économie du Nigéria est moins dynamique qu'avant l'indépendance de ce pays et n'est toujours pas entrée dans l'ère de l'industrialisation. Une aubaine pour le dragon chinois gourmand de débouchés, dont les produits représentent un cinquième des importations du Nigéria. Dans son approche spécifique de la lutte contre le terrorisme jihadiste, le Maroc insiste toujours sur le développement socioéconomique en tant qu'instrument majeur et incontournable pour une réussite dans la durée, en parallèle avec le traitement proprement sécuritaire du fléau et l'enseignement des véritables préceptes de l'Islam. Le Nigéria, sous Jonathan Goodluck affiche un bilan des plus désastreux sur tous les plans. La perte de contrôle du nord du pays, abandonné à Boko haram, ainsi que les attentats à répétition témoignent de l'échec patent des dirigeants politiques actuels du Nigéria. Le premier poids lourds démographique africain a tout pour être une économie émergente, pourtant, il ne l'est pas. Ce qui n'empêche pas ses dirigeants politiques d'afficher la prétention d'intégrer les BRICS, autrement plus stables et dynamiques. Ce n'est pas, toutefois, la folie des grandeurs qui éviterait à ce grand pays africain de sombrer dans le chaos s'il continue politiquement sur la même voie.