L'accord entre Athènes et Bruxelles est enfin acté. Après maintes tractations, les partenaires européens ont validé la liste envoyée par le gouvernement grec. C'est un accord-cadre pour des négociations, qui ne font que commencer et qui devraient quatre mois, avec une première évaluation fin avril. En vertu de cet accord, la Grèce a reçu l'aval de ses partenaires de l'Eurogroupe et du Fonds monétaire international pour la liste de réformes présentées le mardi 24 février, en contrepartie du délai de quatre mois que l'Eurogroupe avait consenti, le 20 février, pour la prolongation de l'aide financière. Après l'adoption du plan proposé par le gouvernement de gauche, dirigé par le parti Syriza, le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis a souligné : « Désormais, les fonctionnaires ne seront plus expulsés. En accordant des aides humanitaires aux défavorisés, on mettra un terme à la crise sociale et humanitaire. Les taxes directs sur les marchandises n'augmenteront pas et les logements des endettés à la banque, ne seront pas confisqués. Cette programmation a été définie, de manière que le gouvernement puisse remplir, entièrement, ses promesses électorales ». Toutefois, si l'accord a été arraché aux forceps et que le maintien de la Grèce dans la zone euro ne fait plus de doutes pour le moment, Alexis Tsipras a dû, en réalité, faire de nombreuses concessions, à commencer par plusieurs mesures de son programme électoral. Le programme présenté par Athènes à l'Eurogroupe revient sensiblement sur des promesses de campagne, telles que l'arrêt des privatisations, la hausse des dépenses sociales et le relèvement du salaire minimum. Il prévoit de consulter les partenaires de la Grèce avant de faire des réformes, qui devront être neutres pour le budget. "Tout le monde, y compris au sein de Syriza, attend de voir comment cela va pouvoir marcher dans les faits", souligne un epert grec. "Faudra-t-il demander la permission aux créanciers avant de prendre la moindre décision ? Faudra-t-il recevoir les instructions de l'étranger, comme avant les élections ?" Les premières fissures sont donc apparues au sein du gouvernement grec, le ministre de l'Énergie, Panagiotis Lafazanis, prenant le contre-pied du premier ministre, Alexis Tsipras, sur les privatisations. Le ministre de l'Énergie a affirmé que la Grèce ne procéderait pas à la privatisation du principal producteur d'électricité PPC, ni de l'opérateur du réseau électrique ADMIE, revenant ainsi sur l'engagement d'Athènes de poursuivre les cessions d'actifs publics. Panagiotis Lafazanis représente l'aile la plus à gauche du parti Syriza. Si ce courant entre en rébellion ouverte contre les décisions du gouvernement contraires aux promesses de la campagne électorale, il est en mesure d'entraîner la chute de la coalition au pouvoir. Dans ce contexte, le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis, qui pendant des années a dénoncé un plan d'aide "toxique" et "catastrophique", se retrouve lui aussi dans une situation délicate, contraint de faire accepter aux Grecs des mesures impopulaires. Yanis Varoufakis, a dressé un tableau sans concession de la situation financière de son pays. "Nous n'aurons pas de problème de liquidité dans le secteur public, mais nous aurons vraiment un problème pour rembourser des échéances au FMI maintenant et à la BCE en juillet". Il n'a donné aucune estimation du montant des besoins de financement du Trésor pour cette période, mais il est établi qu'Athènes doit verser environ deux milliards d'euros d'intérêts ce mois-ci à des créanciers publics et privés et rembourser un prêt du FMI de 1,6 milliard d'euros qui arrive à échéance en mars. Il lui faudra encore 800 millions d'euros pour assurer le service de la dette en avril et quelque 7,5 milliards en juillet et en août, notamment pour rembourser des obligations détenues par la BCE et pour payer des intérêts. Alexis Tsipras se voit, ainsi, contraint à un véritable numéro d'équilibrisme entre ses engagements envers les créanciers internationaux et sa promesse faite aux électeurs grecs de sortir le pays de l'austérité. "La situation est toujours difficile. Nous serons jugés sur notre capacité à gouverner et pas seulement sur notre compétence dans les négociations", a dit le premier ministre grec, lors d'une réunion à huis clos avec les députés de Syriza. "Il nous faut aller rapidement de l'avant dans la mise en œuvre de notre programme", a-t-il ajouté. Le chef du gouvernement, après les espérances suscitées, se doit de répondre au moins en partie aux attentes de ses électeurs et démontrer qu'Athènes a pu desserrer l'étau de l'austérité. "Jusqu'à présent nous n'avons fait que négocier, maintenant il nous faut gouverner", a insisté lors de la réunion un député de Syriza.