Le président Abdel Fattah al-Sissi, l'ex-chef de l'armée tombeur de M. Morsi, a promulgué en novembre un décret, fort opportun, autorisant l'expulsion des étrangers condamnés ou en instance de jugement. M. Greste a de fait été libéré puis expulsé vers l'Australie le 1er février, tandis que M. Fahmy est en passe de l'être vers le Canada. Sa remise en liberté, annoncée comme imminente depuis plusieurs jours, se fait cependant attendre et son avocate, la très médiatique Amal Clooney, a demandé à rencontrer le président Sissi pour accélérer sa libération. MM. Greste et Fahmy avaient été arrêtés en décembre 2013 dans une chambre d'hôtel du Caire où ils avaient installé, sans autorisation selon l'accusation, un bureau d'Al-Jazeera. Peu après, la police avait interpellé M. Mohamed, accusant les trois de travailler en Egypte sans l'accréditation requise pour tous les journalistes. Ces arrestations avaient eu lieu alors que l'Egypte et le Qatar étaient à couteaux tirés après la destitution et l'arrestation par l'armée égyptienne de l'islamiste Mohamed Morsi, alors le premier président jamais élu démocratiquement dans le plus peuplé des pays arabes. Al-Jazeera, qui avait largement couvert les manifestations des partisans de M. Morsi, a été accusée de soutenir les Frères musulmans, cibles d'une sanglante répression et décrétés organisation terroriste en décembre 2013 par le gouvernement de transition issu de l'armée, alors dirigée par Sissi. Dans les mois qui ont suivi la destitution, policiers et soldats ont tué plus de 1.400 manifestants pro-Morsi. Plus de 15.000 Frères musulmans ou sympathisants ont été emprisonnés et des centaines condamnés à mort dans des procès de masse expédiés en quelques minutes et qualifiés par l'ONU de sans précédent dans l'Histoire récente du monde. Al-Jazeera et ses trois employés, ainsi que les organisations internationales de défense des droits de l'Homme avaient dénoncé un procès politique, le régime du président Sissi, élu président en mai 2014, reprochant au Qatar et à la chaîne d'avoir été le principal soutien des Frères musulmans quand ils étaient au pouvoir de l'été 2012 à l'été 2013, et d'avoir soutenu les manifestants pro-Morsi après sa destitution. Le gouvernement canadien a réclamé dimanche «la libération immédiate» du journaliste égypto-canadien Mohamed Fahmy tout en manifestant son inquiétude sur la décision de la justice égyptienne de rejuger jeudi les deux journalistes de la chaîne Al-Jazeera toujours emprisonnés au Caire. «Le Canada est très inquiet par l'annonce d'une date fixée pour un nouveau procès, en dépit des assurances que Mohamed Fahmy aurait été libéré» dans la foulée de la libération de son collègue australien Peter Greste, a indiqué Lynne Yelich, secrétaire d'État aux Affaires étrangères chargée des affaires consulaires. «Le Canada lance un appel pour la libération immédiate de M. Fahmy», a ajouté la numéro deux de la diplomatie canadienne dans une déclaration écrite. Un tribunal égyptien doit rejuger à partir de jeudi les journalistes d'Al-Jazeera dont la condamnation à 7 et 10 ans de prison a été annulée en tout début d'année par la Cour de cassation. Grâce à un décret promulgué en novembre par le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, des étrangers peuvent faire l'objet d'une expulsion si ils ont été condamnés ou en instance de jugement. C'est ce qui a permis l'expulsion le 1er février du journaliste Peter Greste, rentré depuis en Australie, et qui pourrait permettre à Mohamed Fahmy, qui a renoncé à sa citoyenneté égyptienne, d'être renvoyé au Canada. MM. Greste et Fahmy avaient été arrêtés en décembre 2013 dans une chambre d'hôtel du Caire où ils avaient installé, «sans autorisation» selon l'accusation, un bureau de la chaîne qatarie. Peu après, la police avait interpellé le journaliste égyptien Baher Mohamed également collaborateur d'Al-Jazeera. Le 2 février, John Baird, qui a démissionné deux jours plus tard de son poste de ministre canadien des Affaires étrangères, avait annoncé une libération «imminente» de M. Fahmy. L'intervention dimanche de Mme Yelich accrédite la thèse que M. Baird avait reçu des assurances de cette libération rapide. Plus tôt dimanche, la famille de Mohamed Fahmy avait critiqué l'«approche conservatrice» du gouvernement canadien et avait demandé l'intervention directe du premier ministre Stephen Harper dans ce dossier. Mme Yelich a répondu qu'elle n'avait cessé, avec M. Baird, de «manifester les inquiétudes du gouvernement sur le dossier de M. Fahmy» au plus haut niveau avec les responsables égyptiens. «Je continuerai de le faire», a-t-elle assuré en restant confiante que cette affaire «serait résolue dans les délais appropriés».