Le Secrétaire généal de l'ONU Ban Ki-moon a recommandé, avant hier, de réduire de 2 000 hommes les effectifs de la Monusco, la Mission de l'ONU en République démocratique du Congo. Malgré la persistance des rébellions dans l'Est, le secrétaire général de l'ONU veut priver cette force d'environ 10 % de ses effectifs. L'idée est d'avoir une force réduite mais plus réactive. Ce qui n'était que des bruits de botte dans les couloirs de l'ONU tend à devenir une réalité concernant la réduction des effectifs de la Mounsco en RDC. En effet, ce projet est en cours depuis près d'un an. Mais cette fois, les choses se précisent, après la remise d'un rapport de la Monusco sur ce sujet à la fin de l'année. Cela fait plusieurs mois en effet que l'ONU étudie une stratégie de sortie de la RDC, avec tout d'abord un redéploiement de l'ensemble de sa mission à l'est du pays - qui s'est fait de décembre à août 2014 - et maintenant ce plan de réduction des troupes. La demande figurait même dans la résolution du Conseil de sécurité qui a renouvelé le mandat de la Monusco pour un an, en avril dernier. La décision a été prise maintenant, tout d'abord pour des contraintes budgétaires. La mission de l'ONU au Congo est l'une des plus chères au monde. On parle d'un milliard et demi de dollars par an pour 22 000 personnes déployées - civils et militaires - et cela fait déjà quinze ans qu'elle est dans le pays. Le premier casque bleu est arrivé en 1999. Aussi, les pays bailleurs de fonds, à savoir les Etats-Unis et la Grande-Bretagne en tête – ces derniers étant également membres du conseil de sécurité – trouvent la facture lourde et font donc pression pour la réduire, ce qui a pour conséquence de réduire la mission. Cette année déjà, le mandat a été renouvelé avec un budget réduit de 73 millions de dollars. Des réactions partagées Les autorités sont ravies par cette idée de diminuer les effectifs. Le président Joseph Kabila lui-même a demandé à l'ONU de réduire la présence de ces troupes, dès cet été. Il l'a répété lors de son discours de fin d'année devant le Sénat et l'Assemblée. Pour lui, avoir 20 000 casques bleus sur le sol congolais donne l'image d'un pays toujours en guerre. Une image qu'il veut absolument corriger. Il avance par ailleurs ses arguments, comme par exemple le renforcement de son armée et la présence de groupes armés résiduels qui ont besoin d'être combattus de façon ciblée. Du côté de l'opposition et d'une bonne partie de la société civile, ce n'est pas du tout le même son de cloche. L'opposition met en avant la situation sécuritaire qui n'a cessé de se dégrader ces trois derniers mois dans l'est du pays, tout en rappelant le massacre de plus de 200 personnes en un mois dans la région de Beni et le déplacement de 500 000 Congolais dans la région du Katanga. Pour eux, il est trop tôt pour que les forces de l'ONU se retirent. L'opposition défend leur maintien, même si depuis leur arrivée en 1999, les casques bleus sont régulièrement critiqués pour leur inaction sur le terrain. Pour l'opposition, ils restent des témoins potentiels d'exactions. Les partis d'opposition craignent, en réalité, que le gouvernement congolais ne cherche, entre guillemets, à se débarrasser de l'ONU. Il faut rappeler, en effet, que les relations avec le gouvernement congolais sont souvent tendues au sujet des problématiques de droits de l'Homme, par exemple, et d'autant plus à l'approche de la présidentielle qui doit normalement se tenir en 2016. Risque de réapparition de foyers de tension Il y a quelques jours à peine, la Monusco et l'armée congolaise lançaient une opération militaire dans l'Est contre les rebelles burundanis des FNL. La région est loin d'être stabilisée et il se pourrait que ce retrait ait un impact sur la stabilité du pays. Le risque est que, très vite, des foyers de tension réapparaissent. Bien sûr, les Nations unies minimisent la réduction en disant qu'il ne s'agit que de 2 000 hommes et que le retrait sera graduel. Pourtant, rien que le redéploiement de la Monusco dans l'est du pays suscite déjà des inquiétudes, notamment à l'approche des élections qui doivent normalement se tenir en 2016. Ainsi, par exemple, les experts électoraux de la mission onusienne sont passés de plus d'une centaine à seulement quinze. Normalement, ce sont les agences onusiennes comme le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) qui doivent prendre le relais, mais pour le moment elles ne le font pas. Avec le redéploiement, la mission de l'ONU se retrouve aussi relativement absente des provinces de l'Ouest du pays dont les résultats lors des précédentes élections avaient été largement contestés. L'opposition s'inquiète de ce vide et de l'absence de regard ou même de troupes pour intervenir en cas de répression. Enfin, l'opposition rappelle que les critères pour un retrait complet sont le désarmement par la force de tous les groupes armés, ou bien la création d'une armée nationale capable de le faire – ce qui semble être une alternative peu réaliste –, mais aussi et surtout la tenue d'élections libres et démocratiques.