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Tout un monde à explorer pour les Marocains : Ibn Batouta ne parlait pas la langue de Voltaire
Publié dans L'opinion le 28 - 03 - 2014

Une véritable catharsis, c'est ce qu'ont finalement vécu les Marocains à travers la récente crise entre leur pays et l'ancienne puissance protectrice devenue «partenaire et amie». Merci Asfari, Lamtalsi et compagnie. Sans oublier les «bons» chrétiens français de l'ACAT, pour leur excellente prestation des chants grégoriens du pays de Saint Augustin.
Les Marocains savaient pourtant bien, depuis la brouille entre feu Hassan II et le président Mitterrand, déjà sur fond de «séparation des pouvoirs» entre François et Danielle, que Dame France était atteinte de schizophrénie. Mais elle n'en était pas encore à fantasmer sur des relations illégitimes imaginaires. La présence dans le Royaume des grands groupes français a, pourtant, toujours été actée en bonne et due forme.
Bref, rien n'y faisait. On s'est accroché à la France comme aveuglé par notre indépendance, dans un enchevêtrement de liens, l'économique, le social, le politique, le militaire, le sécuritaire et le culturel amassés en un sac de nœuds. Francophonie et francophilie ont, donc, longtemps été les deux pieds qui traçaient la destinée du Royaume. C'est peut être la faute à Voltaire, mais sûrement pas à Rousseau, qui comprenait la signification de contrat.
Et voilà qu'est diffusé en France un nouvel épisode des «Brigades du Tigre», avec un homme en burnous et turban sur la tête, poignard suspendu au côté, dans le rôle du méchant. L'interprétation est franchement nulle, l'acteur jouant le personnage n'ayant même pas eu la décence de chercher à cacher l'accent caractéristique d'un pays situé à l'est du Oued Isly, convaincu de l'ignorance doublée de préjugés de la plupart des spectateurs et des faux semblants intéressés de quelques autres protagonistes. Allo, le vingt et unième siècle ? Euh oui... L'inspecteur Valentin a plus de copains qui portent tous maintenant des gilets pare-balles.
Les spectateurs marocains ont zappé d'une chaîne d'info satellitaire à un autre média électronique, pour vérifier si ce n'était pas, par hasard, la rediffusion d'une fiction datant d'une autre époque. Pour se rendre compte, à la fin, que ce sont le producteur étranger de ladite fiction, ainsi que l'équipe française de réalisation et autres comparses, qui restent coincés dans un trou de l'espace-temps, bérets sur la tête, avec leurs fromages, leurs litrons et leurs baguettes. On n'est même plus dans le registre usé du genre historique. On nage littéralement dans le fantastique.
Les Français ont placé le Maroc sous protectorat, il y a un siècle de cela. Et l'ont quitté, il y a plus d'un demi-siècle déjà. Les Marocains ne sont pas vindicatifs, non plus amnésiques. Leur pragmatisme que leur reprochent tant leurs voisins de l'est, ils le revendiquent. Quand nombreux ont été les pays nouvellement indépendants du Tiers-monde à céder aux chants des sirènes soviétiques, le Maroc a maintenu cap vers la démocratie libérale, contre vents et marées. Et quand l'Afrique passait, aux yeux de la plupart, pour un continent à la dérive, au passé ravagé et à l'avenir incertain, le Maroc y a cru et investit, créé des emplois et engrangé des profits. Si le pragmatisme a aussi bien réussi aux Marocains, pourquoi alors ne pas continuer en si bon chemin ?
Si les relations avec la France et les pays d'Afrique subsaharienne plongent leurs racines dans l'Histoire, récente et ancienne, il serait peut être temps, maintenant que le tronc est suffisamment solide, que le houppier de l'arbre marocain s'épanouisse au-delà de son espace géographique relationnel interétatique classique. Il y a bien d'autres monuments à admirer que la Tour Eiffel. Mais il y a bien plus important encore pour les Marocains. Se débarrasser du carcan intellectuel de la pensée cartésienne, découvrir et tester d'autres manières de concevoir et comprendre le monde. Puisque c'est de ce mode de perception que découle la détermination de notre action sur notre environnement. Or, justement, douter de tout, tout le temps, comme Descartes a réussi à façonner l'esprit des Français et des francophiles cartésiens, bride l'esprit pratique et le sens de l'action. Dans le monde d'abstraction mathématique parfait fait d'axiomes et de postulats qu'il a «cogité», sont bannis émotion et spontanéité, essence de la créativité.
En quête de nouveaux repères
Où en est la France en matière de publication d'articles dans les grandes revues scientifiques, de dépôt de brevets d'invention et autres indicateurs pertinents du dynamisme de l'esprit au sein d'une nation, comparativement aux pays anglo-saxons, adeptes de l'empirisme de Francis Bacon et John Locke ? L'anglais, vecteur linguistique international de la recherche scientifique, indispensable pour toute recherche documentaire poussée, incontournable pour actualiser régulièrement ses connaissances, devrait devenir la première langue étrangère enseignée au Maroc. Il faut se doter du bon logiciel pour se situer du bon côté de la fracture scientifique et technologique, donc économique, qui définit la nouvelle géopolitique mondiale. N'est-ce pas le français Yves Lacoste qui avait écrit qu'il fallait «poser en termes géopolitiques les rapports entre les langues» ?
L'allemand Haushofer et l'anglais Mackinder ne comprendront plus rien au monde d'aujourd'hui. Il n'y a plus ni Est ni Ouest. La guerre froide est finie. Les loups de mer et les loups de terre ont toujours des crocs et continuent bel et bien à s'affronter. Sauf qu'ils se sont faits astronautes et hackers et leurs théâtres d'opération, ce sont l'espace orbital et le cyberespace. Il n'y a plus, aussi, ni Nord, ni Sud. Le Brésil, pays du sud, est la huitième puissance économique mondiale. La Grèce, pays membre de l'Union Européenne, est le symbole de l'impuissance financière du club des vingt huit. Avec l'Ukraine, cela fera vingt neuf et une ardoise de 35 milliards de dollars de dettes à ajouter à celles, déjà contraignantes, des autres membres du club. La dernière blague à Pékin, c'est l'histoire des Européens blancs qui ne vont pas tarder à rire... jaune !
Franchement, jouer le fou néo-nazi sur l'échiquier de la place Maïdan, soi dit en passant, c'était gravement sous-estimer la position de la tour de Crimée dans la stratégie du maître du pays de Karpov et Kasparov. Et comme le gaz qatariote n'est pas prêt de passer par la Syrie pour irriguer le marché européen, du fait du déploiement de la flotte russe en Méditerranée orientale... Victoire par Ippon pour le judoka Poutine.
Remarquez que tout ça n'est pas l'affaire des Marocains. Ces derniers n'ont pas de difficultés à se faire comprendre des Russes, quand il est question d'empêcher le démembrement de vieilles nations par des bandes terroristes et la création de micro-États voyous aux frontières de ces dernières. Avec les Chinois, non plus, d'ailleurs. Eux aussi ne portent pas les terroristes séparatistes sur leur cœur.
Il est fort instructif pour les Marocains de connaître les «quatre enseignements» tirés par les sages du pays de Confucius et de Sun Tzu de la crise ukrainienne. Parmi celles-ci, énumérées dans un article publié par le Quotidien du Peuple, daté du 17 mars, «la lecture erronée de l'histoire par l'Occident est un facteur déclenchant de troubles». Une conclusion à laquelle les Marocains ne peuvent qu'adhérer, eux qui peinent également quand il s'agit d'expliquer aux Occidentaux le principe juridique de la Beïa qui a lié pendant des siècles les tribus des provinces du sud du Maroc aux Sultans marocains, à l'instar d'autres régions de l'Empire chérifien.
A Moscou, donc, comme à Pékin, l'arbre marocain devrait déployer quelques branches, pour goûter à des vents nouveaux. Il y a beaucoup à apprendre de la lecture de Sun Tzu, référence principale en matière de stratégie militaire des états-majors russes et chinois, pour qui le sommet de l'art de la guerre est de vaincre sans combattre. Sa subtilité est venue à bout, en Ukraine, de la montée aux extrêmes de Clausewitz, qui a profondément imprégné la pensée stratégique occidentale.
Centres et périphéries
Il est également plus que temps de cesser de réfléchir comme Oqba Ibn Nafî, dont le cheval de conquérant musulman a été arrêté par les vagues de l'océan Atlantique. Pour regarder de l'autre côté, vers les Amériques. La superficie du territoire maritime du Maroc représente le double de celle de son territoire terrestre. Et les quatre cinquième de son commerce extérieur passent par la voie maritime. Les Marocains ont, néanmoins, toujours des difficultés à raisonner en terme d'espace lisse, faute d'une tradition maritime bien ancrée et d'une réflexion académique sur la thalassocratie.
Outre l'accord de libre-échange avec les États-Unis, le marché du sous-continent sud-américain, ce sont 400 millions de consommateurs au pouvoir d'achat grandissant. Il y a un pont à construire au dessus de l'Atlantique, avec les outils de la coopération sud-sud, le Maroc s'étant déjà forgé une réputation de champion en la matière, en Afrique subsaharienne. Car si les Marocains ne se dépêchent pas de franchir le pas vers les Latino-américains, ces derniers finiront, de toute manière, par débarquer en Afrique subsaharienne. Eux aussi sont en quête de débouchés pour leur industrie émergente.
Dans l'antiquité, c'était la Méditerranée, le centre du monde. Puis ce fût l'océan Atlantique, avec la découverte des Amériques. Enfin le Pacifique, depuis la montée en puissance économique, mais également militaire depuis quelques temps, des dragons asiatiques. La position du Maroc à la périphérie du nouveau centre géoéconomique mondial sied bien à sa taille géographique et démographique. Il s'y épanouira plus aisément, comme carrefour logistique adossé au marché prometteur africain et aux capacités économiques et technologiques européennes.
Tout en restant un point stratégique de première importance sur la carte du monde, le détroit de Gibraltar ayant regagné rapidement, ces derniers temps, sa valeur d'antan. Les Etats-Unis ont, en effet, commencé le déploiement, à l'entrée de la Méditerranée occidentale, de leur système naval de défense anti-missile Aégis. Ce qui a incité les Russes à y faire manœuvrer, au début de cette année, leur seul croiseur porte-avion, l'Admiral Kouznetsov, flanqué d'autres bâtiments de guerre. La nouvelle base maritime marocaine de Ksar Sghir est aux premières loges pour assister aux ballets navals qui sont appelés à se succéder dans cette zone sensible.
L'une des premières définitions de la géopolitique lui a été donnée par le suédois Rudolf Kjellén. Ce serait «la science de l'État en tant qu'organisme géographique tel qu'il se manifeste dans l'espace». Dans le cas du Maroc, le déterminisme géographique joue en sa faveur. Il reste juste à fructifier ce don divin et inépuisable en prenant bien soin de déployer, dans toutes les directions, les branches de l'arbre marocain. Les eaux de la Seine n'étant plus très saines, tout compte fait.


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