La croissance économique et démographique dans le monde, principalement dans les pays émergents, va entraîner un double bond très important de la demande en eau et en énergie d'ici 2050 qui accroît le risque d'épuisement des ressources, a averti l'Onu vendredi. Dans son «rapport sur la mise en valeur des ressources en eau» publié à la veille de la Journée mondiale de l'eau, l'Unesco souligne que l'eau et l'énergie sont fortement interconnectés et que leur croissance pourrait gravement affecter les ressources limitées de la planète. Si les deux tiers des prélèvements en eau dans le monde sont liés à l'agriculture, 15% proviennent du secteur énergétique et 90% de la production d'énergie dans le monde qui utilise des quantités importantes d'eau, rappelle le rapport. «La demande en eau douce et en énergie va continuer à augmenter au cours des prochaines décennies pour répondre aux besoins de populations et d'économies en croissance, des changements de mode de vie et de consommation, amplifiant ainsi grandement les pressions existantes sur les ressources naturelles limitées et les écosystèmes», selon le rapport onusien, présenté vendredi à Tokyo. Actuellement, 768 millions de personnes n'ont pas accès à une source sûre et régulière d'eau, 2,5 milliards n'ont pas de sanitaires corrects et plus de 1,3 milliard ne sont pas connectés au reseau électrique. Et environ 20% des aquifères de la planète sont surexploités, selon l'ONU. Parmi les principales prévisions du rapport, figure une hausse prévue de 55% de la demande mondiale en eau. Or d'ici là, plus de 40% de la population mondiale vivra dans des zones en stress hydrique «sévère», principalement dans une grande zone s'étendant du Nord de l'Afrique au Moyen Orient jusqu'à la partie ouest de l'Asie du Sud. Tensions géopolitiques L'Asie devrait être la zone la plus tendue en terme de tensions autour de l'eau, dont les sources sont situées près des frontières nationales. «Les zones de conflit incluent la mer d'Aral et les bassins du Gange et du Brahmapoutre, de l'Indus et du Mekong», souligne l'Onu. Côté énergie, la demande mondiale devrait augmenter de plus d'un tiers d'ici 2035, dont 60% rien que pour la Chine, l'Inde et le Moyen-Orient. Quant à l'eau consommée (et pas ramenée à sa source) par le secteur énergétique, elle devrait passer de son niveau de 2010 de 66 milliards de mètres cubes d'eau douce, plus que le débit annuel du Nil en Egypte, à près du double (+85%) en 2035. Les centrales électriques thermiques et nucléaires, qui nécessitent des volumes importants d'eau pour leurs systèmes de refroidissement, tireront notamment cette hausse des besoins. Les gisements d'hydrocarbures de schiste et de sables bitumineux, pour l'heure quasi exclusivement exploités en Amérique du Nord, sont particulièrement consommateurs d'eau. Quand bien même, «ils sont dépassés de très loin par les biocarburants», qui nécessitent notamment de l'eau pour les cultures agricoles dédiées, souligne Richard Connor, le chercheur qui a dirigé l'étude. Les ressources renouvelables, y compris l'hydroélectricité, qui utilise évidemment l'eau mais n'en utilise que très peu par évaporation dans le réservoir, ou encore l'éolien et le solaire, représentait environ 20% de la production d'électricité mondiale en 2011. L'Afrique et l'Amérique Latine notamment ont un potentiel très élevé pour des barrages, souligne l'Onu, même si plusieurs grands projets sont controversés. Mais la part des renouvelables ne pourra augmenter massivement que si les subventions aux énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) sont amputées, souligne l'Unesco. L'étude appelle également à des efforts en efficacité, en pointant les pays arides du Moyen-Orient, où entre 15 et 60% de l'eau est gaspillée via des fuites ou de l'évaporation avant même que le consommateur n'ouvre son robinet. Environ 2,5% des ressources en eau sur Terre sont de l'eau douce. 70% de cette part se situe dans les pôles et les glaciers, un peu moins de 30% dans le sous-sol et seulement 0,3% en surface, selon des données de l'Onu.