Anticiper les modifications majeures du paysage énergétique mondial impose au Maroc de s'inscrire dans une politique durable. Avec une hausse estimée à 35% de la demande énergétique mondiale, toutes les options doivent être sérieusement étudiées. En 2030, le bouquet énergétique marocain sera composé de 38 millions de tonnes TEP de produits pétroliers, 27,7 millions pour le charbon, 13,5M pour le gaz naturel et 13,7M pour les énergies renouvelables. Comment s'adapter aux évolutions du contexte énergétique mondial fortement fluctuant ? Comment concilier la hausse croissante de la demande en énergie et la protection de l'environnement ? Comment serait constitué le bouquet énergétique à l'horizon 2030 ? Ce sont autant de questions qui se posent concernant le développement énergétique sur le plan national. «Difficile de répondre à cette question cruciale sans faire un minimum de prospectives. Les études qui sont réalisées actuellement montrent qu'à l'horizon 2030 et 2040 les énergies fossiles devraient rester prédominantes malgré une croissance rapide des autres formes d'énergies», explique Moulay Abdellah Alaoui, président de la Fédération de l'énergie, qui se prononçait lors de la 9ème rencontre Euro-méditerranéenne, organisée sous le Haut Patronage de SM le Roi, par l'Association Ribat Al Fath et la Fondation Konrad-Adenauer. Une chose est pourtant sûre, l'évolution démographique et du développement économique rapide des pays émergents se traduira par une hausse de la demande énergétique de plus de 35%, entre 2012 et 2035, selon le scénario Nouvelle Politique de l'Agence Internationale de l'Energie (AIE). Quel paysage énergétique à l'horizon 2030 ? En 2010, les énergies fossiles assureraient 81% de l'approvisionnement énergétique de la planète. En 2035, leur contribution devrait être encore de l'ordre de 74%. La production mondiale du pétrole devrait se stabiliser autour de 95 à 97 M baril/jour et, en 2030, elle ne satisferait plus que 30% en besoins d'énergie. Pour le président de la Fédération de l'énergie, ce plafonnement résulte de plusieurs facteurs, notamment le déclin des gisements en cours d'exploitation, et la concentration des ressources dans des pays qui ne souhaitent pas augmenter leur production à court terme. Pour sa part, le gaz devrait représenter 25% du bouquet énergétique mondial, sachant qu'actuellement, il est à l'origine de 50% de l'électricité dans le monde. «Cette source d'énergie a plusieurs atouts : elle émet moins de gaz à effet de serre et pas de polluant en souffre, par comparaison au charbon et aux produits pétroliers. De plus, sa souplesse le rend apte à prendre le relais des énergies intermittentes par exemple l'énergie éolienne», souligne Moulay Abdellah Alaoui. Le charbon représentera en 2035, 21% du mix énergétique contre 27% en 2010. Les autres formes d'énergies primaires : hydro électricité, bio mass, énergie renouvelable, solaire, éolien, géothermie, énergie marine, croîtront de façon continue et contribueront pour un quart de l'approvisionnement énergétique en 2035. La croissance des énergies renouvelables devrait être particulièrement rapide, estime le président de la Fédération. Leur apport devrait être limité à environ 6% du total, contre 1% en 2010. Plus de 15% de l'électricité mondiale seront générés par des énergies renouvelables. Celle qui connaîtra la plus forte croissance sera l'énergie éolienne qui augmentera d'environ 8% entre 2010 et 2030. Au Maroc, le bouquet sera diversifié En 2030, le bouquet énergétique marocain sera composé de 38 millions de tonnes d'Equivalent Pétrole (TEP) pour les produits pétroliers, 27,7 millions TEP pour charbon, 13,5 millions TEP pour le gaz naturel et 13,7 millions TEP pour les énergies renouvelables. Le développement du gaz naturel limiterait le recours au charbon. Ce dernier verrait alors sa part stagner autour de 30% jusqu'en 2030. Selon le scénario de la Fédération, la dynamique de valorisation des énergies renouvelables permettra d'atteindre 1.500 mégawatts de la capacité installée en éolien et 2.000 dans le solaire. Concernant la 4ème énergie, à savoir l'efficacité énergétique, il est fort possible d'atteindre l'objectif d'économiser 12% de la consommation d'énergie d'ici 2020 et 15% d'ici 2030. «Le Maroc doit disposer d'une énergie sûre, compétitive et respectueuse de l'environnement. Notre politique doit conjuguer la nécessité de notre approvisionnement, la maîtrise de l'évolution des prix de l'énergie et la limitation de son impact sur l'environnement, notamment en matière d'émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques. Le développement des énergies décarbonées et notamment le soutien aux nouvelles technologies de l'énergie doivent être au cœur de la stratégie énergétique et constituent également une opportunité à saisir pour l'emploi et la compétitivité de l'industrie Marocaine», analyse Moulay Abdellah Alaoui. Celui-ci juge d'ailleurs que nos modes de consommation de l'énergie ne sont pas durables. Leur poursuite soulève à la fois des problèmes économiques, sociaux et environnementaux. L'efficacité énergétique, un réel défi L'augmentation de l'efficacité énergétique constitue un enjeu majeur des prochaines décennies. Cet objectif est au cœur de la stratégie nationale en matière de développement durable, qu'il s'agisse de limiter les pollutions environnementales ou d'atteindre nos objectifs d'incorporation d'énergies renouvelables, dans notre mix énergétique. Pour être durable, notre économie doit diminuer sa dépendance à l'énergie non renouvelable, en particulier. «Le développement des énergies renouvelables justifie une intervention de l'Etat, soit en amont dans le domaine de la recherche et développement, soit en phase d'industrialisation en soutien à la demande et au déploiement commercial. Le soutien à la recherche devrait être l'un des axes majeurs de la politique publique en matière d'énergies décarbonées, dans l'objectif d'accompagner les filières correspondantes vers la maturité et la compétitivité», conclut le président de la Fédération de l'énergie.