La galerie «Oeil du cœur» à Sidi Rahal abrite les œuvres rétrospectives de l'artiste peintre Kenza El Moukdasni le samedi 7 décembr (17h30) et présente par la même occasion le livre écrit par le critique d'art et professeur chercheur Dr.Abdellah Cheikh (Kenza El Moukdasni : œil du cœur). C'est grâce à une longue quête et un travail acharné et constant que cette artiste talentueuse a pu émerger dans le paysage plastique marocain comme une des créatrices les plus sensibles de sa génération. Elle allie dans sa démarche stylistique création picturale brute et sensibilité moderne. Son potentiel artistique et son récit autobiographique cheminent ensemble. Elle ne cesse d'interroger la matière dans ce qu'elle a de puissant et de résistant. Kenza a su rendre les éléments dans ce qu'ils ont de singulier et de brut. Sa main intuitive a pu reproduire avec finesse et émotion un sens spontané du détail. Sa peinture est joyeuse au sens esthétique du terme tant elle plait au regard. Elle réveille notre curiosité aux objets quotidiens, en nous offrant une fluidité polychrome qui crée un univers d'une légèreté insaisissable. Un rappel doux des temps perdus. Elle a su rendre ce qu'elle voit avec passion et sensibilité. Dans la préface du livre écrit par Dr. Abdellah Cheikh, Daniel Couturier, écrivain et académicien, a écrit : « J'aime beaucoup cette phrase d'Abdellarif Lâabi, né à Fez en 1942 et poète considérable : « Quand l'œuvre est là, on est saisi d'étonnement, incapable de décerner dans cet étrange fruit des entrailles la part du désir initial du vécu et de l'imaginaire, de la raison et de la folie. ». Un étonnement que tout critique d'art se doit de posséder et chérir, source de ses découvertes. On peut ainsi faire confiance au Dr. Abdellah Cheikh critique d'art reconnu et apprécié depuis de longues années tant des artistes que des collectionneurs, diplômé docteur d'Université et professeur à l'Ecole des Beaux art de Casablanca, lorsqu'il s'attache et présente un artiste qu'il distingue dans le concert pictural ambiant attiré par une vibration plus intense de ses couleurs et du rayonnement de sa personnalité. C'est ainsi qu'il nous donne, dans ce livre, la joie de découvrir l'œuvre du peintre Kenza El Moukdasni dont les premières toiles ne datent que de 2009 mais surent immédiatement attirer l'œil des plus fins connaisseurs. Mon rôle n'est pas d'analyser ici cette œuvre déjà déterminante et complexe ni même de rédiger une biographie de l'artiste, c'est l'objet même de ce livre, mais bien de saisir le lien qui spontanément s'est manifesté entre l'auteur et son modèle. Kenza El Moukdasni vit depuis des années au Pays-Bas et se plait à évoquer son Maroc d'enfance dont sa mémoire conserve les images qu'elle feuillette comme un livre précieux. Autodidacte, même si elle dessine depuis son enfance, elle laisse aller sa main pour le graphisme, son œil pour l'assemblage des couleurs et ses souvenirs intimes passés au filtre de son intelligence pour l'expression du sujet, autant de facteurs qui placent son œuvre dans le domaine des arts intuitifs. N'a-t-elle pas trouvé sa place dans les expositions « d'Art singulier » voir « Hors Normes ? ». « Talentueuse, sincère, hypersensible à la beauté, aux images de la vie quotidienne, ses anecdotes et ses scènes narratives » comme l'écrit Hassan Nour, son expérience de femme et de marocaine confrontée à une civilisation nordique l'entrainent dans le monde du rêve dont elle va retenir certaines images fortes qui peuvent être tour à tour enfantines, douloureuses ou intensément joyeuses. Mais s'il y a rêve, il s'agit bien d'un rêve éveillé, distingué par l'écrivain Robert Desolle qui voyait là une possibilité d'allègement par la suggestion d'images heureuses de l'être alourdi par le prosaïque quotidien. Il s'agit pour l'artiste de s'engager dans une ascension imaginaire, une ascension qu'il se doit d'illustrer par des images ordonnées suivant la psychologie du moment offrant à l'artiste des images concrètes qui accélérant le psychisme montant n'a de valeur que si l'artiste se sent entrainé dans l'acte de peindre toujours plus haut, lui apportant une grande confiance en elle-même. Mais les idées et les faits, les images fugaces ne sont que les matériaux de l'art, et l'art du peintre consiste dans le choix de ce qu'il représente et surtout dans ce qu'il évite de peindre, dans le choix des perspectives qu'inconsciemment, peut être, le peintre s'est fixé. ». Et d'ajouter : « L'art ne consiste pas à décrire didactiquement des choses ou à faire passer quelque message mais à créer un langage unique et ponctuel qui, d'une manière infaillible, place de spectateur dans un certain état poétique. C'est cet état poétique qui en harmonique que avec la grande culture de Dr.Abdellah Cheikh à su les réunir. Reste l'habilité avec laquelle le peintre va s'exprimer, il est plus habilité que moi à en rendre compte au lecteur, un peintre autodidacte réserve toujours quelques surprises, irrésistibles impulsions, qui s'expriment dans un primitivisme artificiel que l'artiste a consenti avec le temps à perfectionner en choisissant les moyens le plus propres a reconstituer exactement ses sensations. Mais parfois on sent que Kenza El Moukdasni se trouve confronté à un éclairage fantastique qui peut être révèle de façon fugace son moi véritable, alors que ces images fantastiques ne signifient pas toujours ce que l'on en pense et son intelligence est vite confronté a une sensibilité de psychologie d'intimité. Son maintient strict, le foulard serré entourant son visage, son habit traditionnel et ses larges lunettes claires ne sont pas des éléments incitants à la confidence mais c'est toujours une joie d'aborder l'œuvre d'une femme peintre qui reste pourtant un entier mystère même si parfois on devine dans ses toiles un pan libéré de sa personnalité. Il est grand, il est bon de voir la femme marocaine s'exprimer par le graphisme et la couleur qui offrent l'avantage de transposer avec pudeur ses pulsions de liberté et de reconnaissance. Que ce livre dans lequel l'illustration complète pour sa compréhension si bien le texte de Dr.Abdellah Cheikh vous attache à la destinée artistique d'un peintre dont l'avenir radieux s'ouvre devant elle si bien accompagné. ».