Bakou : M. Akhannouch préside la délégation marocaine à la COP29    «Houris» de Kamel Daoud et les démons d'un passé algérien sanglant    Maroc : Le déficit budgétaire à 40,5 MMDH à fin octobre    Nadia Fettah persiste et signe sur le taux de croissance pour 2025    Casablanca : Trois conventions pour la transformation de la Société Gestionnaire de la Bourse en Holding    La Bourse de Casablanca clôture dans le rouge    Canaries: plus de 4,7 tonnes de haschich saisies grâce à la coopération de la DGST    Info en images. Les nouveaux maillots des Lions de l'Atlas pour la CAN 2025 dévoilés    Le tirage au sort de la Coupe du monde des Clubs 2025 le 5 décembre à Miami    Zakaria Aboukhlal remplace Ilias Akhomach    L'équipe nationale surclasse son homologue égyptienne (5-1)    La DGST aide les Canaries à intercepter plus de 4,7 tonnes de haschich    Grosse saisie de haschisch aux Canaries avec le concours de la DGST    Le DAK « Digital Arts Khouribga » : naissance d'un nouveau Festival International des Arts Numériques à Khouribga    La Mode en Lumière : Première Fashion Week au Mall du Carrousel à Rabat du 15 au 23 novembre 2024    Agadir : Le Festival international cinéma et migrations fête ses 20 ans    Pour le président du gouvernement canarien, le Maroc est "un acteur fondamental" pour la stabilité en Afrique de l'Ouest    Conjoncture : l'économie s'adapte toujours    Charte de l'investissement : un décret dédié à la TPME sera bientôt adopté    Maroc-France : la CFCIM invite 50 décideurs dans les Régions du Sud    CAN 2025. La liste de Regragui face au Gabon et au Lesotho    CAN 2025 : le stade de Meknès candidat pour accueillir des rencontres    Le Maroc accueille une retraite du CDH de l'ONU    Diabète : Sun Pharma lance une caravane de dépistage à travers le Royaume    Algerian media claims Moroccan journalists were injured in Polisario attack    Tourisme. Le président du Sénégal révèle ses ambitions    USA. Trump confie la Sécurité nationale à Mike Waltz    Protection des données de santé : la SMSM et la CNDP s'associent    Afrik Fashion Week. Une vitrine pour la mode africaine    Lancement de la 9e « Semaine de la Cuisine Italienne dans le Monde » à Rabat    Marco Rubio, probable futur chef de la diplomatie américaine et grand détracteur des relations étroites entre Moscou et Alger    Mohamed Aujjar plaide pour le retrait du dossier du Sahara de la commission onusienne de la décolonisation et affirme que le Maroc ne cédera pas aux «tentatives algériennes de pousser la région vers une guerre ouverte»    AKDITAL, Dassault Systèmes et Long Island University lancent un projet novateur en médecine 4.0 au Maroc    Commission provisoire de la presse : adoption de programmes de formation continue, de déontologie et d'éducation aux médias    Programme d'aide directe au logement : 29 000 bénéficiaires jusqu'au 11 novembre    Vers la mise en œuvre d'un projet de construction d'une usine de fabrication de rames de train au Maroc    Les couleurs du ciel de ce mardi 12 novembre    Transport : Kayouh défend les "Khettafa" et dévoilé un plan ferroviaire et aérien pour 2030    Eliminatoires CAN 2025 : Zakaria Aboukhlal remplace Ilias Akhomach    L'armée israélienne annonce la mort de quatre soldats dans le nord de la bande de Gaza    Qui est Marco Rubio, le probable prochain secrétaire d'Etat américain qui réclamait des sanctions contre l'Algérie ?    Kayouh promet la construction prochaine d'une usine de fabrication de rames de train au Maroc    Sommet arabo-islamique: SM le Roi place la cause palestinienne au rang des constantes de la politique étrangère du Royaume    Arts : La Biennale de Dakar met le design marocain à l'honneur    Patrimoine architectural : Le Maroc a beaucoup à offrir en matière de conservation, selon le Pdt de Leipziger Messe    Foot/U20: L'Egypte abrite le championnat de l'UNAF, avec la participation du Maroc    Trump nomme Thomas Homan à la tête de l'agence du contrôle des frontières et de l'immigration    Salon International du Livre: le Gouverneur de l'Emirat de Sharjah reçoit Mohamed Mehdi Bensaid    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



ENTRETIEN AVEC DR. SAID LAQABI : Safi, des atouts socio-culturels énormes à valoriser
Publié dans L'opinion le 04 - 10 - 2013

Nous avons récemment, lors de l'un de nos passages à Safi, tenu un brin de causette avec le Dr. Saïd LAQABI, écrivain marocain et élément associatif très dynamique. La discussion a porté sur l'état de lieux de la situation socio-économique, culturelle et touristique de la capitale d'Abda. Nous avons conclu que la région n'est pas aussi marginalisée que certains le laisse croire. Safi dispose en effet d'énormes atouts à fructifier, développer et à mettre en valeurs. En voici d'ailleurs l'essentiel :
- Le Nouveau port et les transferts des installations de l'OCP.
C'est un réel coup de pouce pour l'économie locale, régionale et nationale. Effectivement, le nouveau port au sud de Safi permettra de fournir le combustible à la future station thermique laquelle fournira dans 4 ans 25% de la production électrique nationale et par la même occasion servira les intérêts de l'opérateur mondial en phosphates l'OCP.
Ce dernier opère récemment une bonne politique d'insertion citoyenne urbi et orbi. L'Entreprise s'implique de plus en plus dans la vie associative (hormis le football avec lequel les liens sont anciens), culturelle voire artistique. Personnellement, je salue l'action du Groupe et espère qu'elle se poursuit par des rendez-vous pérennes en collaboration avec les forces vives de Safi.
Côté investissement économique, l'OCP annonce 30 milliards de dhs de fonds qui permettront la concrétisation du hub phosphatier en face du nouveau port.
Les anciennes installations face à Sid Lghouzia subiront une reconversion vers des activités de formation et nous souhaiterons le reboisement du site afin qu'il retrouve ses traits du début du siècle ou un Guide datant de 1923 le citait (Sid Lghouzia) comme verdoyant et habitant de maintes espèces d'oiseaux comme le piaf et le martinet...
Les quais phosphatiers du port industriel actuel de Safi pourront, certainement, servir à la plaisance et les ferries.
2- L'autoroute
Safi via le Cap Cantin (Beddouza) est le point le plus avancé du Maroc dans l'Océan. Ce Finistère a, certes, attrait maritime certain mais il constitue néanmoins, un enclavement par rapport aux grands axes routiers du Royaume.
Ainsi ce projet structurant d'une valeur de 4 milliards 800 millions de dh constituerat-il, dès le début de son exploitation, une bonne décharge d'adrénaline pour la ville et sa région.
Le tracé montre une connexion à hauteur d'El Jadida pour desservir le port et la plate-forme de Jorf Lasfar, la station balnéaire d'Oualidia et Safi.
Le gain en temps, en sécurité et en confort seront non négligeables et sonneront le glas au mythe de la ville enclavée.
3- Une « Cité de la Culture et des arts », pour quoi faire ?
Présenter Safi ; little Morocco...
D'aucuns croient que Safi ne compte pas parmi les métropoles culturelles de notre pays. Certes, les medias l'évoquent rarement en termes positifs : les contraintes d'un présent imprécis mettent souvent sous le boisseau une fascinante histoire d'un melting-pot bien de chez nous.
Depuis fort longtemps, Safi était considéré comme une Médina ayant toutes les structures idoines comme la garnison, le Maristan (hôpital), la grande Mosquée pour le prêche du vendredi, des Qissarias... (Centres commerciaux spécialisés).
En outre, Safi et son hinterland constituent, à notre sens, pour les initiés, un «little Morocco» culturel diversifié, en référence à ces quartiers d'émigrés, en Amérique, où se concentrent parfois toutes les sensibilités culturelles d'une même nation, comme little Italy, China town ou little Odessa...
Ainsi le substrat de Safi est-il la résultante de plusieurs affluents qui vont être succinctement décrits ci-dessous.
L'élément européen
Au port de Safi, qui peut, à lui seul, raconter l'histoire de la ville, le visiteur sera étonné de constater la terminologie en vigueur chez les marins pêcheurs : le pidgin. C'est une suite de mots espagnols sertis d'expressions cosmopolites. Le vieux parler safiot est toujours riche en termes de cette même origine. Ce visiteur ne manquera pas de s'émerveiller à la vue du majestueux Château de Mer, chef-d'œuvre de l'architecture militaire lusitanienne du XVème siècle.
L'élément sépharade
La communauté juive assez réduite de nos jours fut autrefois fort nombreuse. L'importance de la présence juive, antérieure à l'événement de l'Islam, selon certains historiens, demeure palpable dans le mausolée Ouled ben Zmirou avec son moussem annuel, et avec les recettes succulentes d'une cuisine fort appréciée en sus d'une musique festive ( Sami El Maghribi). Cette présence commence à être revisitée, en témoignent les travaux de l'historien Brahim KREDYA, ou l'œuvre de fiction du romancier safiot Hassan RIAD, intitulée « Parchemins Hébraïques». (cf. notre recueil de nouvelles «Les Gens d'ici » suivi de « Parchemins hébraïques », l'Harmattan - Paris 2006)
L'élément subsaharien
Les liens de Safi avec le «Bled Soudan » (Territoire des Noirs) sont avérés depuis que la ville fut le port desservant Marrakech, capitale de plusieurs dynasties régnantes au Maroc. Ainsi la présence d'une culture gnaoua, avec ses « lilas » et ses rites de désenvoûtement, fait partie intégrante de la culture safiote. Cet aspect culturel longtemps dédaigné, par rapport à un passé lié à l'esclavage, commence à être réinventé par des travaux documentaires ou de fiction. (cf. notre roman «Maître Samba, le dernier des Gnaouas » Asteria-Editions - Safi 2011)
L'élément andalou
Plusieurs familles originaires d'Andalousie sont venues s'installer, le plus souvent via Fès, à Safi. De nos jours, en sus d'une gastronomie réputée, nous sommes redevables à ces familles du legs d'une musique raffinée. Rares sont les Marocains qui n'ont pas été envoûtés par les « Mawal » d'un des meilleurs vocalistes, en l'occurrence M. BAJEDDOUB. En outre, n'oublions pas que les familles andalouses ont largement contribué à l'essor de la poterie et de la céramique de Safi.
L'élément amazigh
Certes, l'arabe dialectal safiot est, en général, celui du littoral atlantique marocain arabophone. Cependant, c'est dans la matrice linguistique que la présence amazighe est la plus «audible». Ainsi, d'après une récente étude de l'universitaire M. LATAOUI, qui porte comme titre «Ichtionymie », il ressort que les noms de plusieurs poissons de Safi sont en berbère, par exemple « amun » qui désigne la daurade royale... Au-delà de cette ligne verte linguistique, le même poisson sera appelé «Zriqa ( le bleu)» en arabe.
L'élément
arabo-musulman
Il s'agit d'un élément essentiel, depuis qu'Oqba IBNOU NAFIE, comme le rapporte une légende consacrée, a foulé les plages de cette «Mer des ténèbres», en regrettant qu'elle soit un obstacle l'empêchant de porter plus loin le message de l'Islam.
Le second personnage est sans doute le Cheikh Abou Mohamed SALEH, qui organisa un système d'hostellerie assez performant allant de Safi jusqu'aux lieux saints de l'Islam. L'exode, prémédité par les Fatimides d'Ifriqia (Tunisie), des tribus arabes (taghriba des Beni H'lal) a scellé définitivement l'arabisation de la région et de son chef-lieu, Safi. Les plaines des Abda, lesquelles constituaient une partie de la confédération des Doukkala - les portes de Marrakech et d'Essaouira allant vers Safi portent le même nom « Bab Doukkala » -, offrent le parler de ses habitants comme matière à des études linguistiques diverses : à titre d'exemple, la bâtisse où habite quelqu'un de la plaine sera en pisé ou en béton armé, et portera le vocable «khaïma» (tente). Elle s'intègrera dan un Douar (cercle) autour d'un feu protecteur symbolique. Ne s'agit-il pas ici, de traces d'un nomadisme atavique ?
Enfin, le côté musical de cet élément demeure vivace avec cette musique qualifiée d'extra-muros, la aïta (appel), que la saga du Caïd Si Aïssa Ben Omar a rendue célèbre avec le personnage de Cheikha Kharboucha, un laideron au verbe puissant, qui harangua les Ouled Zid contre le despotisme du fameux Caïd jusqu'à leur extermination quasi-totale : la mémoire historique conserve l'appellation «Aam errafasa», ou «Année de la bousculade» qui eut lieu sous les remparts de la ville.
Pour la aïta, il est nécessaire de rendre ici hommage à un homme qui a consacré sa vie à la recherche dans ce domaine et dans tout ce qui concerne cette culture populaire, feu Mohammed Bouhmidi. (cf. «Il était une fois ...Safi» Diwane Edition - Safi 2008).
Avec une activité plastique époustouflante allant de la légendaire Fatna Gbouri,( citée comme représentante de l'art naïf nord africain dans Que sais-je ?) jusqu'à Abdelouahab Zine en passant par Rachid Taleb, Omar Gourane, Med Bakkari, Nadia Khayali, Hamid Beggar, Ahmed Mjidaoui, Sidi Hbibi, le calligraphe Med Idali...Safi est une pépinière qui gagne à être connue et reconnue.( voir « florilège des peintres à Safi » Thami Ouazzanià paraître en juin - 2013)
Et le 7ème art n'est pas du reste : Mohamed Osfour, père du Cinéma marocain, MohamedReggab, le digne héritier de la Nouvelle vague et Lakhmari avec ses films choc ; leur point commun, ils sont tous de Safi.
C'est cette mémoire alliée à une vitalité extraordinaire que la Cité de la Culture et des arts devrait développer, fructifier, transcender et offrir déclinées en spectacles vivants cherchant les valeurs cardinales universelles en puisant dans les trésors locaux.
En somme , l'Etat a fait le maximum et je souhaite qu'avec ses infrastructures, le climat de confiance regagne le terrain avec une dynamique économique dans laquelle s'engagera le secteur privé ... Demeure la problématique du niveau et de l'efficacité voire la conscience des corps élus de la ville ... mais là c'est une autre pair de manche.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.