Le Forum de la culture à Casablanca (ex. Cathédrale Sacré Cœur) a abrité récemment la première rencontre nationale des arts plastiques organisée par l'Association Bassamat des Beaux Arts sur le thème « Artiste dans chaque maison », en hommage à la création au pluriel. Cette exposition créative a été marquée par la présentation d'un registre diversifié d'œuvres plastiques, toutes tendances confondues, dont figurent les tableaux de l'artiste talentueuse Khadija Bennani. Temps à l'état pur, ses œuvres contemporaines font voyager la trace et expriment la quintessence de notre faculté cérébrale : c'est la nature intérieure qui est mise en toile pour nous faire voir notre dimension spirituelle. Chaque tableau oscille entre immanence et transcendance. Il s'agit de l'image-mémoire qui crée un sentiment d'appartenance : la trace demeure l'élément focal de cette peinture symbolique soucieuse de conjuguer habilement et harmonieusement la rigueur et la sensibilité créatrice de l'artiste rêveur à la plus grande imagination conceptuelle, le tout en palimpsestes et en des formes estompées mais combien telluriques : « Ce sont les traces qui persistent et qui nous font rêver ». Unités visuelles de référence en termes de plasticité et de picturalité, les œuvres de Khadija Bennani (vit et travaille à Casablanca) témoignent d'un grand effort pour saisir ce qu›il y a d›essentiellement nouveau et percutant. En développant ces apports plastiques, elle pose les jalons d›un système iconographique axé sur la production du nouveau (ou création d'autres atmosphères à base de la trace détournée), et qui célèbre ainsi la vie idéalisée, ce qui explique d'ailleurs des états d'âme. L'artiste tente d›élaborer un « acte plastique transcendantal ». Son langage créatif repose sur une conception neuve de la trace gestuelle (comme expression symbolique et non pensée canonique), tout en mettant en évidence la vie (où trace et couleur ne font qu›un), ce qui a marqué une avancée décisive dans le déploiement de son vocabulaire plastique. Pour Khadija Bennani, « la création au sens plastique du terme est l›art de former, d›inventer et de revisiter des concepts préétablis ». C'est l'acte d'interpréter notre monde effectif, et d›en tirer de grandes émotions, ou de renouveler complètement sa perception esthétique : « Il faut les deux ailes, œil et esprit, ne serait-ce que pour nous emporter artistes et passionnés d'art vers une limite commune. ». La rhétorique de cette artiste hypersensible est celle d›une transcendance captivante. Pas d'immanent, pas de répétition, pas d'imitation, mais un « carrefour d›affects et d'intellects», une « culture de la joie active », une «lecture radicale de notre capital symbolique ». Dans chaque tableau, il ya une partie dirigée vers nous-mêmes. A l'instar des déserts, les traces nous habitent, elles nous poussent à repenser notre espace vécu. Elles croisent ici encore une fois nos intérêts pour la vie épurée. Lauréate de l'Ecole Supérieure du design et des Arts Visuels, Khadija Bennani esquisse le prolongement de ses idées et ses méditations. Elle donne dans ses œuvres métaphoriques des pistes de réflexion sur la trace et la plasticité, en affirmant que seule l'approche conceptuelle est susceptible de mettre en valeur l'essence de la réalité comme élément plastique voué à la visibilité. L'analyse que Khadija Bennani fait de la trace s'appuie sur l'œuvre ouverte marqué par la profondeur chromatique et la fluidité gestuelle : Matière, trace et mémoire. D›un point de vue esthétique et de manière très simplifiée, la perception humaine suit la vie des formes. Elle est donc fondamentalement l'interface entre les contenus et les contenants. Contrairement à des idées répandues, les perceptions de cette artiste aventureuse ne sont pas de simples copies mentales de notre contexte. C›est-à-dire qu›elles ne se résument pas à un simple jeu de reproduction analogique. Elles traitent les choses et les êtres afin d›envisager les rapports possibles qui constituent la matrice symbolique de notre perception.