Le rythme annuel de progression du crédit bancaire s'est inscrit en ralentissement continu depuis le second semestre 2008, reflétant en grande partie un ajustement à la baisse, après une période de forte expansion entre 2007 et début 2008, note Bank Al-Marghrib dabs son dernier rapport annuel. Durant les derniers mois, la décélération du crédit a été particulièrement prononcée, son rythme d'accroissement s'étant établi à 4,6% en décembre 2012, après un pic de 31,7% en janvier 2008 et une hausse moyenne de plus de 22% entre 2007 et 2009. Cette orientation a concerné l'ensemble des catégories de crédit, destiné aussi bien au secteur privé qu'au secteur public. Dans l'objectif de comprendre son évolution et d'identifier d'éventuels déséquilibres sur le marché du crédit marocain, une étude des services de la Banque s'est basée sur la méthode économétrique proposée par Maddala et Nelson (1974), qui consiste à estimer un modèle, dit de déséquilibre, pour détecter l'origine du ralentissement ou de la contraction du crédit. Ce type de modèle a l'avantage de permettre l'estimation simultanée, à travers deux équations de comportement, de l'offre et de la demande de crédit qui sont des variables inobservables, le minimum entre ces deux quantités étant le volume de crédit réellement observé. Pour le cas du Maroc, le modèle de déséquilibre a été estimé, en utilisant des données en fréquence trimestrielle. L'offre de crédit est déterminée principalement par le taux d'intérêt, rapproché par le taux moyen pondéré sur le marché interbancaire en termes réels (TIB). Le deuxième déterminant de l'offre de crédit est la capacité d'offre (Cap), calculée comme la différence entre les dépôts bancaires et la réserve monétaire (en termes réels), et dont le coefficient devrait ressortir positif. L'indice des prix immobiliers (IPAI) a également été introduit, afin de capter l'effet de la valeur du collatéral exigé par les banques lors de la distribution des crédits. Son appréciation devrait conduire à une hausse de la richesse nette des emprunteurs, à une baisse de la prime de risque et à une augmentation de l'offre de crédit par les banques. Enfin, la variable créances en souffrances (ratiosouffr), indicateur de solvabilité de la clientèle largement déterminé par l'activité économique et les incertitudes qui l'entourent, devrait avoir un impact négatif sur la distribution des crédits. Du côté de la demande, le crédit est expliqué par le taux d'intérêt réel (TIB), représentant le coût de financement pour les entreprises et les ménages, et devant avoir un coefficient négatif. Il est également déterminé par l'activité économique mesurée par le PIB non agricole réel (PIBNA), ainsi que par les prix des actifs immobiliers (IPAI). Une hausse des cours des actifs immobiliers entraînerait une valorisation du patrimoine des emprunteurs potentiels et contribuerait à faciliter leur accès au marché du crédit. Enfin, le ratio de la capitalisation boursière (ratcapit) a été introduit comme indicateur de profit et par conséquent, de capacité d'autofinancement, notamment pour les emprunts des entreprises non financières. Cette variable sert à déterminer le degré de substitution entre les financements interne et externe de l'entreprise et devrait être négativement corrélé avec la demande d'emprunt. Pour ce qui est du Maroc, les estimations ressortent globalement en ligne avec la théorie économique. Ainsi, pour ce qui est de l'offre de crédit, les résultats confirment l'impact positif anticipé de l'augmentation de la capacité de distribution d'emprunts, qui pourrait résulter d'une amélioration des dépôts ou d'une réduction de la réserve obligatoire. Pour sa part, l'indice des prix des actifs immobiliers a un impact positif et significatif sur l'offre du crédit, alors que le ratio des créances en souffrance exerce plutôt un effet négatif. Du côté de la demande, l'activité économique non agricole et le prix réel des actifs immobiliers ressortent avec un effet positif significatif. Pour sa part, le lien négatif entre le ratio de capitalisation boursière et la demande des crédits est conforme aux anticipations. Ces résultats indiquent l'existence d'un déséquilibre entre l'offre et la demande sur le marché du crédit. Depuis fin 2008, la demande de crédit évolue à un rythme supérieur à celui de l'offre. L'écart est devenu plus important sur la période 2011-2012, avoisinant 25 points de pourcentage en moyenne. Cette orientation du marché s'expliquerait d'une part par un durcissement des conditions d'octroi de crédits attribuable principalement au resserrement des trésoreries bancaires, au ralentissement des dépôts, ainsi qu'à la montée des incertitudes relatives à la conjoncture économique. Elle s'expliquerait d'autre part par une faiblesse de la demande en lien avec la conjoncture et le climat d'attentisme des opérateurs économiques.