Le Festival National du Film (F.N.F.) vient de clôturer sa quatorzième édition. Comme tout festival de cinéma, les prix ne font jamais l›unanimité. A Venise, à Cannes comme à Berlin; à Carthage, à Ouagadogou comme à Alexandrie, la contestation des prix de la part des critiques, cinéastes ou autres professionnels , est devenue monnaie courante et les organisateurs des festivals s›attendent habituellement à de telles contestations qu›ils essaient maladroitement de justifier. Seulement, les films en compétition sont généralement d›un niveau équivalent sur le plan thématique, technique et artistique mettant le jury devant l›embarras du choix. Les films passent par une sérieuse sélection et parfois des chef-d›oeuvres sont éliminés au premier tour. Cela ne diminue en rien leur valeur et l›Histoire finit toujours par réparer l›injustice. De grands films relevant aujourd›hui des classiques du cinéma ont été ignorés par des jurys pour le moins incultes au profit de superbes navets vite jetés dans les poubelles de l›Histoire. Que dire d›un film qui compte parmi les douze meilleurs films du monde mais qui n›a jamais été sélectionné dans aucun festival? N›est-ce pas absurde? Tous les films de Charles Chaplin ont subi cette injustice et pourtant ses films sont enseignés dans les universités les plus prestigieuse et l›homme est ovationné à jamais. Quelle aberration! Quant au Festival National du Film, il n›a de festival que le nom. Depuis des années déjà, on essaie vainement de maintenir le cap en amassant une quantité de films de tout support. La difficulté est toujours de rigueur: on ne fait pas assez de films pour organiser un festival annuel. Pour sauver la face, et respecter un engagement unilatéral et précipité envers la haute sphère, on puise dans les autres supports ignorant délibérément les règlements et les lois . Les chambres professionnelles, constituées essentiellemnt de cinéastes qui ont des films en compétition, ferment lâchement les yeux et s›érigent par conséquent en complices potentiels. Le but n›est plus de distinguer les meilleures oeuvres marocaines produites ces dernières années, plutôt d›organiser une foire de cinéma où la priorité est festive groupant des jouisseurs de tout bord avec ce que cela coûte à l›Etat toujours aussi généreux en matière de festivités et rien d›autre hélas. Les membres des jurys, hier cherchés parmi les universitaires, hommes et femmes de lettres, critiques et journalistes crédibles, sont remplacés par des fidèles sans la moindre morale, prêts à vendre leur âme pour un rien. Les présidents des jurys, s›ils ne sont pas des étrangers, opportunisme oblige, sont puisés dans les rangs d›anciens ministres qui ont raté leur vraie vocation, venus chercher un peu de légitimité dans un festival qui ne sert aucunement le cinéma marocain. Et le résultat est sous nos yeux: les films qu›il nous a été donné de voir, après de timides sorties commerciales, n›honorent en rien un cinéma dit national. En quoi nos films sont-ils nationaux s›ils s›articulent étroitement autour de leur auteurs, répondent au fantasmes des cinéastes eux-mêmes ou carrément en rupture avec leur société? Ils ne portent aucune identité car leurs auteurs n›ont aucune identité. C›est ce genre de films qui est primé dans notre festival national par un jury tout sauf crédible. Les films à la puissance «zéro» sont le reflet d›un cinéma constamment en recul à l›image de notre foot-ball. C›est un cinéma dopé à l›extrême en vue de paraître sous des auspices faux et trompeurs sur lesquels nous reviendrons amplement les prochaines semaines.