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Les temps forts de la science en 2012
Publié dans L'opinion le 02 - 01 - 2013

L'année 2012 ira à son terme. Plus vraiment de doute désormais. La fin du monde, promise par certains Cassandre, sera pour plus tard... Et les Mayas, involontaires fauteurs du trouble, sont entrés dans une nouvelle ère avant tout le monde, le 21 décembre dernier, après avoir sans doute bien ri de la panique engendrée par la fausse interprétation de leur antique calendrier.
Du coté de la vraie science, la cuvée 2012 restera sans doute dans les annales comme particulièrement riche. Aussi bien en succès qu'en couacs. Pour faire bonne mesure, revenons sur trois grands moments dans ces deux catégories et sur leurs principaux acteurs.
Trois succès :
1°/ Peter Higgs, le père du boson
4 juillet 2012. Un jour peut-être, lorsque les manuels de physique auront intégré un minimum d'histoire des sciences (espérons que cela arrive avant la prochaine nouvelle ère du calendrier Maya), la photo de Peter Higgs ornera cette date du 4 juillet. Dans l'amphithéâtre du CERN, Peter Higgs pleurait. Il racontera ensuite que l'ambiance y était celle d'un stade de foot après la victoire de l'équipe locale.
Ce jour là, les résultats des deux expériences menées avec le LHC ont montré qu'ils convergeaient vers la valeur de 125 GeV. Soit la masse du boson dont l'existence avait été prédite par Peter Higgs et ses collègues, parmi lesquels François Englert et Tom Kibble sont toujours vivants, en... 1964. Fantastique succès, donc, pour ces théoriciens qui voient, 48 ans plus tard, leurs calculs vérifiés par l'expérience.
Il faudra néanmoins attendre le mois de mars 2013 pour une confirmation définitive des résultats. Et septembre pour un possible (probable ?) prix Nobel de physique pour Peter Higgs. En 2013, notons donc sur nos tablettes: “Le boson", saison 2.
2°/ Curiosity, le rover sur Mars
6 août 2012. 7h32 heure française. Le rover Curiosity se pose en douceur sur Mars après un voyage de 567 millions de km qui a duré 8 mois et demi. Comme au CERN un mois plus tôt, c'est l'explosion de joie dans la salle de contrôle du Jet Propulsion Laboratory (JPL) de la Nasa à Pasadena (Californie). C'est la première fois qu'un robot de ce calibre (3 x 2,7 m sur 2,2 m de haut, 899 kg) est expédié sur une planète du système solaire. Près de 7000 personnes ont travaillé sur le projet qui a coûté la bagatelle de 2,5 milliards de dollars.
On comprend le soulagement apporté par l'atterrissage réussi. Pour autant, la véritable mission de Curiosity a commencé après cet exploit. Et force est de constater qu'elle n'a pas, pour l'instant, été à la hauteur des espoirs mis en elle.
Le comble étant que c'est plutôt son petit prédécesseur, Opportunity, qui fait l'actualité avec ses découvertes géologiques. Curiosity, de son coté, doit découvrir des traces de vie passée sur Mars. Pour lui aussi, la saison 2 pourrait être décisive.
3°/ Serge Haroche, prix Nobel de physique
9 octobre 2012. A Stockolm, la nouvelle prend presque tout le monde par surprise. Alors que l'on attendait le Britannique Peter Higgs, c'est le Français Serge Haroche qui décroche le prix Nobel de physique avec l'Américain et David J. Wineland. Après des années où ce prix allait plutôt à des chercheurs en physique appliquée, c'est le grand retour du fondamental.
Avec Serge Haroche, la mécanique quantique et le chat de Schrödinger sont à l'honneur. Le Français, issu du même laboratoire de l'Ecole Nationale Supérieure (ENS) de la rue d'Ulm, à Paris, que deux précédents Nobel, a réussi à maintenir des particules dans cet état improbable où la matière hésite et se trouve, un bref instant, dans deux situations contradictoires.
Comme un chat qui serait à la fois mort et vivant... Seuls les physiciens quantiques peuvent imaginer un tel paradoxe. Serge Haroche a été plus loin et a réussi à maintenir réellement des particules dans cet état assez longtemps pour faire des mesures. La médiatisation de son prix Nobel a révélé l'impact de cette distinction dont la science française avait besoin. Depuis Claude Cohen-Tannoudji en 1997, elle n'avait été primée qu'une fois avec Albert Fert en 2007.
Trois échecs :
1° / Les neutrinos trop rapides
16 mars 2012 : Eh oui ! Einstein a dû en rire dans sa tombe. Les scientifiques du CERN, eux, ont dû rire jaune en devant admettre, en mars 2012, que les neutrinos ne vont pas plus vite que la lumière. Pas moins de 6 mois ont été nécessaires pour débusquer l'erreur de manip. Une vulgaire fibre optique mal branchée. Au CERN de Genève ! Le temple de la physique doté du plus gros instrument, le LHC !
Avec des milliers de scientifiques venus du monde entier... Bien entendu, l'erreur est humaine. Ce qui l'est aussi, sans être aussi défendable, c'est le désir irrépressible de communiquer le résultat d'une expérience avant d'être absolument certain du résultat. Risqué, surtout lorsque ce résultat viole l'une des lois fondamentales de la physique : l'impossibilité de dépasser la vitesse de la lumière établie par Albert Einstein lui-même.
Nul doute que la mésaventure laissera des traces et favorisera, à l'avenir, une plus grande prudence.
2°/ Les OGM trop médiatiques
19 septembre 2012. Gilles-Eric Séralini, biologiste de l'université de Caen, avait préparé son coup de longue date. Plus de deux ans pour mener à terme une étude d'impact des OGM et de l'herbicide Roundup sur une vie entière de rats. Et puis, le 19 septembre, coup de tonnerre médiatique. Le Nouvel Obs titre: “Oui, les OGM sont des poisons". Si les physiciens du CERN ont manqué de prudence, nos confrères de l'hebdomadaire n'ont pas eu la moindre retenue lorsqu'ils ont conçu cette Une. Les ventes ont sans doute suivi.
Le ridicule, aussi, lorsqu'il est apparu que l'étude était très contestable. En déduire que les OGM sont des poisons, en laissant entendre “pour les hommes", est pour le moins regrettable. En revanche, le coup de Gilles-Eric Séralini a mis en lumière les carences des procédures de test des OGM. Sil en reste là, ce sera une terrible défaite, aussi bien pour la science que pour les médias.
3°/ Voir Doha et bouillir...
8 décembre 2012. Si c ‘était encore possible, la 18e conférence internationale sur le réchauffement climatique qui s'est tenue à Doha, capitale du Qatar, du 26 novembre au 6 décembre 2012 avec prolongation jusqu'au 8 décembre, aura battu tous les records de ridicule.
On retiendra deux images : la grossièreté du vice-Premier ministre Abdallah al-Attiya et l'émotion de Naderev Saño, négociateur en chef de la délégation des Philippines, parlant du typhon Bopha qui a fait plus de 500 morts dans son pays. Quelle distance entre ces deux personnages.
Aucun dialogue n'a pu s'établir dans ce pays qui est le plus pur symbole de la contribution éhontée au réchauffement climatique (numéro un mondial en émission de CO2 par habitant). La conférence s'est soldée par un échec cuisant. Un de plus. Au point de conduire à s'interroger sur l'utilité de tels rassemblements. Forts coûteux en énergie.
(Michel Albergant)


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