Une mission de l'instance marocaine de régulation de l'audiovisuel, comprenant notamment le directeur général de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle (HACA), le Pr Jamal Eddine Naji, a achevé samedi une visite de travail de deux jours à Paris axée sur l'autorégulation, par les professionnels, de la publicité audiovisuelle et les modalités de mise en oeuvre des cahiers de charges par les chaînes de TV françaises. Cette visite d'information de M. Naji, d'un membre du Conseil supérieur de la communication audiovisuelle (CSCA), M. Mohamed Abderrahim et du secrétaire du CSCA, M. Houcine Benayach, s'inscrit dans la perspective d'une réflexion sur la régulation spécifique de la communication publicitaire, un domaine qui repose fondamentalement, dans le cas de la France, sur l'autorégulation. Ils ont ainsi mieux appréhendé la spécificité de la nature et de la mission de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) dont ils ont rencontré le président, François d'Aubert et son directeur général, Stéphane Martin et qui constitue une instance unique dans le monde basée sur le modèle de l'autorégulation. La spécificité de cette instance est qu'elle est régie par la loi sur les associations en France et contrairement à d'autres modèles, les pouvoirs publics n'interviennent pas dans le domaine de ses compétences et ne lui accordent aucune subvention. Indépendante des pouvoirs publics, elle est administrée par les trois professions impliquées dans la production et la diffusion des messages publicitaires (annonceurs, agences conseil et médias diffuseurs) qui lui assurent son indépendance financière par leurs cotisations (80 pc), le reste provenant de prestations payantes. Cette association indépendante et respectée mène une action en faveur d'une publicité «loyale, véridique et saine dans l'intérêt des consommateurs et du public» en veillant à respecter l'équilibre entre créativité et responsabilité qui est «au coeur de l'autodiscipline publicitaire» garantie par les règles d'éthique que s'imposent volontairement ces professionnels. Le régulateur de l'audiovisuel français, le Conseil Supérieur de l'audiovisuel (CSA) a gardé le contrôle à postériori, lui a transféré la responsabilité de l'avis obligatoire avant diffusion de tous les films publicitaires télévisés (+favorable+, +à modifier+, +à ne pas diffuser+). L'autre instance d'autorégulation, le Centre d'étude des supports de publicité (CESP) où les experts marocains ont été reçus par son directeur général, Denis Bied-Charrenton est, à son tour, une association professionnelle qui regroupe l'ensemble des acteurs du marché publicitaire concernés par l'étude de l'audience des médias. De par son statut d'association indépendante, elle garantit la crédibilité des études, en auditant, à l'aide de chercheurs et d'experts bénévoles, les techniques et la méthodologie utilisées par les différents centres et instituts de sondage pour mesurer l'audience de chaque média afin de crédibiliser les résultats. La HACA, vivement intéressée par l'originalité de ces mécanismes d'autorégulation qui mettent au coeur de leur mission la défense du consommateur-usager des médias, compte explorer cette voie pour aider, d'une part à l'organisation, la bonne gouvernance, la transparence et le développement de la qualité du produit publicitaire audiovisuel au Maroc et, d'autre part consolider la voie de l'autorégulation qui est indispensable à une saine régulation, a-t-on appris auprès de la délégation. Dans ce sens, les responsables marocains et leurs interlocuteurs français ont émis le voeu d'échanger des études, recherches et expertises relatives à l'autorégulation dans le domaine de la publicité audiovisuelle. La délégation marocaine a tenu, d'autre part, une séance de travail avec de hauts responsables du groupe France Télévisions (cinq chaînes du pôle audiovisuel public), centrée sur la réglementation et la manière dont ce puissant opérateur s'acquitte de ses obligations imposées par le «Cahier des missions et des charges», notamment au niveau de la liberté éditoriale et du volume de la production nationale diffusée sur ces chaînes. En France, rappelle-t-on, ces cahiers de charges sont élaborés et négociés par concertation entre le pôle public et le ministère en charge de la communication, avant de les soumettre au CSA qui se limite à donner un avis. Cependant, les chaînes de télévision sont obligées de soumettre un rapport d'exécution du cahier des charges au CSA qui se charge de l'évaluer et de le commenter avant publication. L'autorité de régulation française publie enfin, un bilan pour informer l'opinion publique dans quelle mesure chaque opérateur était en conformité avec le cahier de charges. Concernant le volume de la production nationale, le pôle France Télévisons qui ne produit plus en interne pratiquement que ses journaux télévisés, sous-traite le gros de sa production de contenus à quelque 800 prestataires privés. Ce modèle a été mis en place, non seulement pour limiter les coûts de production en interne et en frais de personnel, mais aussi pour développer le secteur privé de production nationale afin de sauvegarder «l'exception française» face à l'hégémonie des contenus anglo-saxons, et aider, en même temps, tous les métiers de la création audiovisuelle. Par ailleurs, les responsables de la HACA ont été particulièrement intéressés par la grande réussite du modèle français pour le passage de la télévision analogique à la télévision numérique (chaînes TNT) sans grand coût financier pour les ménages. La France avait opté, avant l'extinction de la diffusion de la TV analogique, pour une politique volontariste d'aide publique directe aux citoyens pour l'acquisition à un prix modique (30 euros) du matériel nécessaire à la réception de la TV numérique.