... Saltimbanques étant pris ici au sens le plus généreux et le plus affectueux qui soit. Ceci pour lever tout quiproquo ou équivoque. Le plus admiratif aussi car là, petits chenapans, en prenant tout le monde de court par cette idée lumineuse, vous nous avez tout simplement sidérés et rien qu'en pensant à vos pitreries à géométrie variable aisément décryptables, vous me faites sauter au plafond. Pourtant, le thème est on ne plus grave et solennel et vous avez opté pour la seule formule qui vaille : le rire. Mieux vaut en rire, même au paroxysme de nos peines et déboires, les plus atroces, veillons à recourir au rire et à ses vertus balsamiques et... métaphysiques. Alors, comme ça, mes deux diablotins, vous avez décidé de prendre le chameau par les oreilles pour vous attaquer à la plus invraisemblables des situations qui puisse survenir entre deux voisins. Par l'ironie, la parodie, l'humour et le rire et ces flèches acérées que, de votre carquois, vous décochez en direction des galonnés, des chefs et superchefs, tenants et aboutissants d'une balkanisation qui ne dit pas son nom et qui vise à diviser l'indivisible : deux entités jumelles qui n'en font qu'une. Des vertus de la diplomatie du rire Fervent adepte de la diplomatie parallèle – celle des cœurs aux vertus avérées - j'avais ingénument adressé en juillet 2011 une lettre ouverte au président Abdelaziz Bouteflika avec conviction certes mais sans trop d'illusions. J'ai sauté sur la perche après le message émouvant et foncièrement chaleureux qu'il avait adressé à notre Roi à l'occasion de la Fête du Trône de la même année. Auparavant, avec mon ami Abdelghani Bensaïd, - cet autre infatigable artisan de la paix on avait programmé une marche sur Zouj Bghal et ouvert un site de nature à mobiliser, de part et d'autre, les bonnes volontés pour réclamer, d'abord, la réouverture des frontières. Bien entendu, je ne m'attendais pas - loin s'en faut - à une réponse du locataire du palais de la Mauradia. Un coup d'épée dans l'eau une bouteille à la mer, un papillon dans le désert ... Vaut mieux ça que rien du tout ! Ainsi donc, mes petits bandits, nous, on a rêvé pendant des lustres et vous deux, après avoir sévi à Jamaâ El Fna et autres sites de la Ville Ocre, l'avez fait. Bravo ! Il fallait y penser Et comme les meilleurs penseurs sont ceux qui parviennent à faire rire leurs contemporains, vous avez sauté le pas. Pour vous retrouver dans quelque check-point virtuel de la hamada et donner ainsi libre cours à votre génie, à votre patriotisme, à votre binahoualisme intelligemment assume. Je n'ai pas chronométré la durée de vos sketches, mais les 2 ou 3 minutes de votre passage sur antenne valent leur pesant d'or et autant de moments forts. Comme quoi il n'est pas toujours nécessaire de faire de grands discours pour faire vibrer les cœurs et interpeller les consciences. Le propre de l'homme Et vous y êtes parvenus, mes deux stooges, calmement sans vous forcer avec pour atout majeur dans vos prouesses ce naturel que vous n'avez jamais cherché à chasser. Ça cartonne chez vous, les enfants ! Et sans même recourir à quelque audimat, unilatéralement et aussi à l'unanimité plus ma voix, je vous décerne la « matraque d'or » pour ce petit chef d'œuvre renversant. Reste maintenant à tirer une moralité de votre travail, à faire un feed-back des deux côtés de votre frontière résidentielle, de part et d'autre de ce liseré capricieux tracé sur une mappemonde pour déchirer les coeurs. Alors, si vous le voulez bien (la formule n'est pas de moi : on la doit à un célèbre animateur du non moins célèbre jeu « quitte ou double » sur les ondes de France-inter) donnons-nous rendez-vous après Ramadan et constatons à quel point votre cri d'alarme pour remettre les pendules à l'heure aura été entendu. Il le sera. Comme vous, je fais partie de ces rêveurs impénitents qui ne désespèrent jamais. Et puisque je crois à l'efficience de ce que vous faites, continuez ainsi ; ne lâchez rien ; poursuivez votre bataille contre ces guerres qui ne disent pas leur nom ; contre l'absurde et les non-sens. Alors donc, pas de répit, mes deux gabelous de circonstance, ni pour vous, ni pour vos cibles de prédilection. Ne lâchez pas et ne changez rien à rien. C'est déjà très beau comme ça. Et puis, vous le savez mieux que moi, le rire (le propre de l'homme, dit-on) est la chose la plus sérieuse qui soit et je considère personnellement que l'une des formes les plus accomplies de l'intelligence est celle qui consiste à jouer les débiles pour faire passer les messages les plus pathétiques, les plus graves. Duo de choc Merci mes deux gaillards de nous injecter, à partir de votre environnement austère et désertique, à la fois, de grands bols d'oxygène et le plus efficace des vaccins contre la déprime, la morosité ou la désespérance ; de nous inoculer cet autre onguent miraculeux contre la hargne, la haine et le bellicisme sans cause. Vos fourberies à la Scapin invitent à la réflexion, à la méditation profonde et l'apparente légèreté de vos sentences est, pour tout bon entendeur, source d' autant de leçons de sagesse et de pragmatisme. Tandem assorti et harmonieux, duo de choc qui ne choque personne et ne bouscule rien, vous êtes en train d'accomplir de petits miracles que le plus chevronné des diplomates patentés ne pourrait égaler. Equipés de vos mousquetons (inoffensifs) de pèlerins immobiles, continuez, mes deux mousquetaires, votre, belle et grande vadrouille. Tenez bon et continuez à dénoncer cette situation ubuesque qui voudrait, contre toute logique et le plus élémentaire des bons sens, à vouloir diviser l'indivisible. N'arrêtez pas de nous faire rire avec votre humour corrosif, décapant, métaphorique et allusif et qui livre, en filigrane, toutes les leçons de coexistence et des règles de bon voisinage. Continuez à nous faire plier en deux, à nous faire rêver et émerveiller. Par les temps qui courent, les occasions de s'éclater deviennent de plus en plus rares. N'hésitez pas à nous faire rire de rien, de tout et de nous-mêmes, étant entendu que l'autodérision intime ou collective demeure le remède le plus salvateur contre les petits déboires et autres vicissitudes qui nous guettent à chaque portion de frontières. Merci Hassan, merci Abdelkader et bon vent à vous deux ! Rabat, le 07/08/2012