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Les subventions négativement impactées Prix à la consommation non réglementés et majorations illégales des marges
Les subventions du sucre bénéficient davantage aux populations aisées
Profit injustifié de 1,23 MMDH pour les industries agro-alimentaires Le système de compensation mis en place pour la filière sucrière vise à tenir compte de trois exigences, à savoir : l'accès de la population et des opérateurs économiques à cette denrée de base ou intrant à un prix accessible, la préservation de l'amont agricole et la compétitivité du segment industriel nationaux. Ce système engendre néanmoins un coût pour le budget de l'Etat qui est variable selon l'évolution de la production agricole et les cours internationaux du brut, et de par son caractère universel, bénéficie à l'ensemble des utilisateurs, mais en fonction de leur niveau de consommation. Comme mentionné dans le descriptif du fonctionnement de la filière, hors subventions agricoles, le sucre fait l'objet de deux formes de subventions : les subventions à l'importation du brut, permettant de maintenir la rentabilité de l'industrie de raffinage et l'autonomie relative du pays dans ce domaine, et les subventions forfaitaires à la sortie usine pour garantir l'accès à ce produit à un prix abordable réglementé. La charge globale de la subvention du sucre a quasiment doublé entre 2009 et 2011, essentiellement sous l'effet de la hausse des cours mondiaux du sucre brut dont la subvention à l'importation est passée de près de 165 millions en 2009 à près de 2,5 milliards DH en 2011. Ainsi, le montant de la subvention moyenne du sucre est passé de 2.286 DH/T à 4.101 DH/T. Les impacts socioéconomiques de la subvention Cependant, une charge fiscale d'environ 40% pèse sur ce produit, ce qui réduit le poids réel des subventions sur le budget de l'Etat. En effet, les droits à l'importation sont de 35% et la TVA à la consommation de 7%. Ainsi, comme le montre le tableau suivant, si l'on déduit le montant des prélèvements, le montant net des subventions serait ramené de 4.101 DH/T à 2.433 DH/T en 2011. De par leur impact sur le prix à la consommation du sucre raffiné (-2,74 DH/kg en moyenne en 2010 et -4,10 DH/kg en 2011), les subventions profitent directement à l'ensemble de la population. Elles ont des impacts indirects également sur les industries intégrant ce produit dans leurs processus de fabrication. Les impacts directs sont toutefois différents selon le pouvoir d'achat ; les catégories aisées de la population consomment plus de sucre et donc bénéficient davantage des subventions que les catégories défavorisées. En effet, à partir du tableau suivant qui évalue l'exactitude de ciblage des subventions du sucre, le niveau de consommation du quintile le plus favorisé de la population est 2,15 fois plus élevé que celui du quintile le plus défavorisé. Ainsi, si l'on considère, par exemple, que la subvention du sucre ne devrait concerner que le quintile le plus défavorisé, ceci aurait permis une économie de compensation supérieure à 2,8 milliards de dirhams en 2010 et près de 4,3 milliards en 2011. De même, si l'on considère que 40% de la population les moins favorisés (Q1 et Q2) devraient en bénéficier, cela équivaudrait à une économie de plus de 2,3 milliards de dirhams en 2010 et de 3,5 milliards en 2011. Concernant les impacts indirects à travers l'utilisation du sucre en tant qu'intrant par les industries agroalimentaires, celles-ci ont bénéficié des subventions à hauteur de près de 821 millions de dirhams en 2010 et de 1,23 milliards de dirhams en 2011 sachant que leur consommation annuelle est estimée à 300.000 tonnes par la COSUMAR. Une disposition réglementaire imposant à ces industries de rembourser la moitié des subventions forfaitaires sur le sucre soit 1.070 DH/T, a été supprimée pour la plupart des industries et n'est appliquée que pour les industries de sodas. Les dysfonctionnements de la filière L'examen de la filière sucrière a permis de constater, en plus des éléments soulevés au sujet de la filière de la farine de blé tendre portant sur l'hétérogénéité des textes juridiques, les dysfonctionnements suivants : Les importations de sucre brut ont représenté 56% de la satisfaction de la demande nationale en sucre raffiné en 2005 et plus de 69% en 2010. Cette situation alourdit le déficit commercial mais également les charges de compensation supplémentaires à l'importation, qui ont atteint près de 2,4 milliards de dirhams en 2011. Le segment industriel de la filière sucrière, qui compte deux raffineries et quatre sucreries, est détenu par le groupe COSUMAR depuis la privatisation des entreprises publiques opérant dans la filière en 2005. Ce monopole de fait - dans la mesure où la création de nouvelles entreprises est libre- confère à l'opérateur historique un pouvoir de marché important et exclut toute concurrence sur ce marché. Cette situation est renforcée par une forte protection tarifaire vis-à-vis des importations de sucre raffiné (les droits à l'importation varient de 42 à 60%, majorés d'une TVA à l'importation de 20%), ce qui ne favorise pas l'amélioration de la productivité et la baisse des coûts, et ne permet pas la maîtrise du montant des subventions et de leur charge sur le budget de l'Etat. Manque de transparence au niveau des marges de production et de distribution Les frais et marges industriels tant de l'extraction que du raffinage ont été ici estimés à partir du prix de référence des plantes sucrières, du prix cible du brut et du prix réglementé du sucre sortie usine, à l'instar des estimations effectuées par la Caisse de Compensation. Un examen plus approfondi des fondements de ces évaluations permettrait d'obtenir les montants réels et d'affiner le calcul des subventions. Concernant le segment de la distribution et de la commercialisation, les prix de vente publics sont fixés par l'administration tout comme les marges des grossistes et détaillants qui, cumulées, sont aux alentours de 6%. Or dans certains cas, les intermédiaires majorent leurs marges qui peuvent atteindre 17%, répercutées sur les consommateurs ce qui affecte en partie l'impact de la subvention pour le consommateur. Par ailleurs, les frais d'emballage et de transport des usines vers les centres de distribution sont évalués par l'opérateur lui-même et peuvent être surestimés. Absence de fixation du prix à la consommation et non ciblage de la subvention Enfin, il y a lieu de relever que bien que le prix du sucre est subventionné par l'Etat, son prix à la consommation n'est pas réglementé en ce sens que ce dernier diffère d'une région à l'autre et soulève la problématique du contrôle. En effet, l'arrêté se rapportant au sucre fixe uniquement les prix sortie raffinerie et les marges de distribution en omettant de fixer un prix à la consommation. Le sucre raffiné au niveau national subventionné en moyenne à hauteur de 4.100 DH/T en 2011 est destiné à tous les consommateurs. Ce système implique que les catégories les plus favorisées, de par leur pouvoir d'achat plus élevé, bénéficient davantage de la subvention que les populations défavorisées. De même que les industriels qui l'intègrent comme intrant dans des produits qui ne peuvent être considérés comme produits de consommation de base. Ainsi, le secteur industriel consommant près de 300.000 T de sucre granulé par an, il a bénéficié de plus de 1,2 milliard de dirhams de subvention en 2011. Seules les industries de sodas sont soumises au remboursement de la moitié de cette subvention. Cette aide n'est cependant pas assujettie à des objectifs de productivité qui justifierait son maintien pour une période donnée, et ne favorise pas l'amélioration de la compétitivité des outils et systèmes de production.